Le génie peut-il s’expliquer… Il n’est pas très difficile d’expliquer pourquoi quelque chose est excellent, brillant, intéressant, beau, voire même splendide. Mais comment faire comprendre pourquoi quelque chose est génial. C’est à dire que quelque chose transcende tous les critères objectifs pour nous offrir un moment de bonheur, de grâce, d’éternité artistique ! Quentin Tarantino fait partie des rares êtres humains capables de nous offrir de tels moments. Avec Inglourious Basterds, il nous livre une dernière heure qui fera date dans l’histoire du cinéma.
Dans la France occupée par les Nazis, un groupe de commandos, composé en grande partie de juifs américains, sème la terreur dans les rangs de la SS. Leur particularité, faire preuve de cruauté pour se forger une terrible réputation, acquise notamment par le scalp de leurs victimes. Pendant ce temps, à Paris, une grande première cinématographique se prépare avec tout le gratin nazi… et peut-être même le Führer en personne. Mais sans le savoir, Goebbels choisit un cinéma tenue par une juive, dont le frère avait été massacré sous ses yeux par le terrible Hans Landa, le « chasseur de Juifs ».
Comme beaucoup de Tarantino, Inglourious Basterds est proche du film à sketches. Les scènes sont très peu nombreuses et chacune est presque un court métrage à elle toute seule. Cependant, contrairement à Pulp Fiction, il y’a une vraie intrigue qui lie tous les évènements, tous les personnages, pour un final… Mais j’y reviendrai.
L’admiration que j’éprouve pour Tarantino est sans limite. Il est pour moi, d’un point de vue purement technique, le plus grand réalisateur de l’histoire avec Welles et Kubrick. Le seul « bémol » que j’apporterais à ce jugement par rapport à ses glorieux prédécesseurs est que, même si son œuvre balaye des genres très divers, il existe une patte Tarantino, qui fait que l’on différencie ses œuvres du premier coup d’œil. Inglourious Basterds n’échappe pas à la règle. Les interminables dialogues qui précèdent un déluge de feu et de sang restent bien sûr la figure la plus caractéristique de son art.
Mais quand on fait si bien quelque chose, pourquoi s’en priver. Quand on porte l’art de la réalisation, de la photographie, de la composition de l’image, du montage aussi haut, il est difficile de formuler réellement des reproches. Et comme d’habitude, en ce qui concerne l’utilisation de la musique, on touche au sublime, même si Inglourious Basterds est sans doute le film de Tarantino où elle est le moins omniprésente. Mais tout de même, le générique n’a pas commencé depuis trois secondes, que l’on se dit déjà que la musique que l’on entend est LA musique qui devait être là, à cet instant, sur cette image… Pourquoi, on ne le sait pas, mais on le sait, c’est tout.
Tarantino est aussi connu pour sa capacité à diriger les acteurs comme personne. Il n’y a qu’à voir combien les acteurs se battent pour un rôle dans un de ces films pour s’en rendre compte. Dans Inglourious Basterds, la star, ce n’est pas Brad Pitt… qui tient pourtant là un des rôles les plus marquants de sa carrière. Non, il s’agit bien de Christoph Waltz, récompensé à Cannes. Mais comment Quentin Tarantino a-t-il eu cette idée parmi les plus géniales de la longues histoire des idées géniales d’aller chercher cet acteur totalement inconnu ? Sa prestation demanderait d’inventer de nouveaux superlatifs, tant le mot extraordinaire semble bien faible pour la décrire.
Mais soyons chauvin et glissons donc un mot sur Mélanie Laurent. Elle figure depuis un moment déjà parmi les valeurs sûres du cinéma français. Mais franchement, on ne l’imaginait pouvoir dégager un tel charisme et une telle présence à l’écran. Evidemment, le talent de direction de maître Tarantino y est forcément pour beaucoup, mais il serait injuste d’ôter tout mérite à la belle Mélanie.
Mais Inglorious Basterds marquera les mémoires pour le moment de bonheur cinématographique inoubliable, sublime, fantastique, grandiose… que constitue la dernière heure de ce film. Une longue scène qui fait du cinéma bel et bien le 7ème art, non un simple divertissement. Tarantino nous y offre un des plans les plus… En fait, à ce niveau, il n’y a même plus de mot. Ces quelques secondes, vision apocalyptique sublime, dégageant une force incroyable, vous laissent dans un état second, un de ces moments où vous faites corps avec ce qui se passe à l’écran, où la frontière entre la réalité de la salle et les images qui défilent n’existe plus. Un moment où vous oubliez que vous êtes au cinéma, vous oubliez que ce n’est qu’un film, où vous oubliez tout…
Alors, un seul conseil, n’oubliez pas d’aller voir Inglourious Basterds.
Fiche technique :
Production : The Weinstein Company, A Band Apart Pictures, Universal Pictures, Lawrence Bender prod.
Réalisation : Quentin Tarantino
Scénario : Quentin Tarantino
Montage : Sally Menke
Photo : Robert Richardson
Décors : David Wasco
Distribution : Universal Pictures International France
Musique : Ennio Morricone, David Bowie, Charles Bernstein, Elmer Bernstein, The Arrows, Gianni Ferrio
Effets spéciaux : John Dykstra
Costumes: Anna B. Sheppard
Durée : 148 mn
Casting :
Diane Kruger : Bridget von Hammersmark
Christoph Waltz : Hans Landa
Melanie Laurent : Shosanna Dreyfus
Eli Roth : Sgt Donnie Donowitz
Mike Myers : Général Ed Fenech
Brad Pitt : Lt Aldo Reine
Daniel Brühl : Frédérick Zoller
Jacky Ido : Marcel
Michael Fassbender : Lt Archie Hicox