LE CHOIX QUE JE N’AI JAMAIS EU

delinquanceLa dérive sécuritaire, teintée de xénophobie, du gouvernement fait couler beaucoup d’encre. Ce qui était sous-jacent depuis plusieurs années se déchaîne avec une telle violence que la majorité semble prête à exploser. C’est surtout la poursuite d’une politique uniquement axée sur la répression, ce qui, partout dans le monde, a prouvé son inefficacité. Mais ce n’est pas grave, on en change pas une politique qui perd, surtout si ça permet de récupérer les électeurs du Front National.

La stigmatisation systématique de franges défavorisées de la population est un exercice auquel la droite s’attelle depuis des décennies. Si les indigents du XIXème siècle ont laissé place aux immigrés, ou Français d’origine étrangère, la logique reste la même. C’est vrai que quand on voit les BMW des caïds des banlieues ou les caravanes luxueuses des Roms, je me demande bien pourquoi j’ai choisi le droit chemin et les études et non la délinquance et le trafic de drogue. Bah oui, au fait, pourquoi ?

Si j’ai réussi à ne pas devenir un délinquant comme toutes ces « racailles », c’est peut-être tout simplement que c’est un choix que je n’ai jamais eu à faire. Ai-je donc vraiment le moindre mérite à être resté sur le droit chemin quand rien, jamais ne m’a incité à en sortir ? Honnête ou malhonnête, voilà bien une question que je n’ai jamais eu à me poser. Quel aurait été mon choix face à cette alternative ? Je l’ignore et je suis très heureux de pas le savoir.

La nature humaine étant ainsi faite, face à un tel choix, il y’en aura toujours pour choisir le mauvais côté. Et vous pourrez réprimer, incarcérer, expulser, karcheriser tant que vous voudrez, vous n’y changerez rien. Lutter réellement contre la délinquance consiste donc à lutter contre les éléments qui mettent des êtres humains face à un tel choix : la misère, l’abandon, l’exclusion.

Porter un jugement moral sur les couches défavorisées dont sont issus nombre de délinquants est dont tout simplement abject. Surtout que certains comportements dans les hautes sphères financières, patronales et politiques montrent bien que l’argent et l’éducation ne rendent pas les humains meilleurs et que son origine sociale ne présage en rien de ses qualités morales.

Evidemment, tout acte de violence et de délinquance est condamnable et doit être condamné. Mais aux dernières nouvelles, nous avons des codes civil et pénal qui permettent largement de le faire. La frénésie législative sarkozienne en matière de sécurité est donc aussi ridicule qu’inefficace et n’a évidemment réglé aucun problème. C’est d’autant plus absurde quand dans le même temps on fait des coupes sombres dans le budget et les effectifs de la police et qu’on ferme des tribunaux. En effet, s’il est largement démontré que si la dureté des peines n’a que peu d’effet sur le taux de récidive, la rapidité des sanctions joue un rôle positif. Et pour que la justice soit rapide, il faut des moyens.

Sur le long terme, la politique socio-économique sarkozienne a évidemment des conséquences encore plus désastreuses. Où est le plan Marshall pour les banlieues qui était promis ? En creusant les inégalités par le bouclier fiscal, le gouvernement n’a fait que renforcer le sentiment d’exclusion ressentie par une partie de la population et a donc largement entretenu le cercle de la délinquance et de la violence.

Mais le pire dans tout ça, c’est que Nicolas Sarkozy en personne est un symbole de ce qui aboutit aujourd’hui à une tension et une violence permanente dans certaines franges urbaines. En tant que Maire de Neuilly, il a combattu le développement d’une vraie mixité sociale sur son territoire avec un cynisme sans borne. Mais comment casser la logique de ghettos, dont les grandes villes françaises ont tant de mal à se sortir, quand les plus aisés s’isolent dans ce qui ressemble à des forteresses pour riches ? Tout cela ne fait que renforcer encore une fois le cercle vicieux de l’exclusion qui entraîne la violence qui entraîne l’exclusion. Et quand il prétend que les habitants de Neuilly y habitent parce qu’ils le méritent, on voit bien à quel point les fondements de son idéologie sont abjects et nauséabonds, sans même parler de leur caractère contre-productifs. Les seuls qui ont du mérite, ce sont ceux qui on fait face au choix que j’évoquais plus haut et qui ont choisit de se battre par les études ou le travail acharné. Ce ne sont pas ceux qui naissent avec une cuillère d’argent dans la bouche et qui sont voués dès leur plus jeunes âges aux grandes écoles.

Nicolas Sarkozy pompier pyromane de la délinquance. Mais en attendant, ce n’est pas lui qui la subit au quotidien. Lutter contre la délinquance est définitivement un travail de longue haleine, qui passe avant tout par des politiques sociale, éducative et urbanistique efficaces et coordonnés. C’est un travail souvent décourageant et dont les résultats peuvent parfois paraître contradictoires, s’il n’est pas généralisé. Car, par exemple, déconstruire un ghetto, peut revenir à renforcer le sentiment d’exclusion de ceux qui restent en l’état. Et évidemment, déconstruire un ghetto ne doit pas être synonyme de concentrer encore plus certaines populations dans le ghetto d’à côté.

Le gouvernement actuel n’a jamais lié ses politiques sécuritaire et sociale. Mais comment le pourrait-il quand cette dernière est inexistante ? Du coup, il se condamne à mener une guerre vaine qui n’aboutira qu’à attiser la haine entre les Français. Et condamne surtout toutes les futures victimes d’une violence qu’ils n’auront pas su (voulu) endiguer.

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