HORS-LA-LOI : Pas à la hauteur du sujet

horslaloiafficheAprès le succès mérité de Indigènes, Rachid Bouchareb s’attaque à un autre épisode douloureux du passé de notre pays et des relations avec ses anciennes colonies. Avec Hors-la-loi, il s’attaque également à un sujet peu connu, celui des conséquences de la guerre d’Algérie sur le territoire métropolitain. Malheureusement, il se montre cette fois loin d’être à la hauteur du propos qu’il essaye de tenir.

Chassé de leur terre, Abdelkader et ses deux frères voient leur vie bouleversée par le massacre de Sétif en 1945. L’un va en prison, l’autre part faire la guerre d’Indochine, le troisième emmène sa mère pour s’installer à Paris, dans le bidonville qu’est alors Nanterre. Mais les évènements sur le territoire algérien vont vite les rattraper tous les trois et chacun réagira différemment face au combat mené par, mais également au sein, de leur communauté.

Hors-la-Loi est donc une fresque familiale qui s’étale sur plusieurs décennies. Il est donc assez classique dans la forme, même si le contexte est une nouvelle fois encore relativement inexplorée par le cinéma hexagonal. Il y’a une certaine ambition dans la reconstitution historique du scénario, qui cherche à la fois à développer une intrigue et à la fois posséder un caractère démonstratif et explicatif. Je ne rentrerai évidemment pas dans la polémique autour de ce dernier aspect. Ce n’est pas non plus un documentaire, mais une œuvre forcément empreinte de la subjectivité de son auteur mais qui m’a, personnellement, donné envie de creuser le sujet un peu plus profondément.

Reste donc l’intrigue, et c’est là que ça pêche. Hors-la-loi est basé sur le parcours parallèle des trois frères, dont les destins se croisent, s’épousent et parfois se heurtent. Il s’agit donc là d’un triple portrait de trois archétypes des personnages qu’une telle situation peut engendrer : l’indifférent qui cherche à faire son beurre, l’idéaliste jusqu’à l’aveuglement et l’homme de main. Mais les trois personnages sont bancals, pas toujours vraiment crédibles et pas toujours très intéressants.

horslaloiRachid Bouchareb a cherché à montrer comment les évènements peuvent écraser les personnalités. Ces dernières sont ici trop caricaturales pour réserver la moindre surprise. Du coup, les relations entre protagonistes sont convenues et cela nuit considérablement à l’intérêt de l’ensemble. De plus, certaines scènes frisent le ridicule, notamment celle où Jamel Debouzze débarque au milieu d’une fusillade dans sa voiture de parvenu et arrive échapper, en compagnie de ses deux frères, à une petite armée de policiers qui ont visiblement une conception assez étrange de l’encerclement.

Le trio Jamel Debouzze, Sami Bouajila et Roschdy Zem retrouve sa complicité acquise avec Indigènes. On sent bien que la fraternité va au-delà de l’écran. Malheureusement, la faiblesse de leur personnage ne leur permet vraiment pas de briller. Leur jeu sonne souvent faux, mais pas plus faux que les personnages auquel ils tentent tant bien que mal de donner vie. Bien que le propos soutenu par le film leur tient très certainement particulièrement à cœur, leur talent n’était pas suffisant pour vraiment transformer Hors-la-loi en réussite.

Le plus grand mérite de Hors-la-loi est celui d’ouvrir un débat et de posséder malgré tout un caractère « documentaire ». Mais sur le sujet, on préférera cent fois revoir l’Ennemi Intime qui était moins démonstratif, mais constituait une vraie réussite cinématographique.

Fiche technique :
Production : Tessalit productions, Novak production, France 2, StudioCanal
Réalisation : Rachid Bouchareb
Scénario : Rachid Bouchareb
Montage : Yannick Kergoat
Photo : Christophe Beaucarne
Décors : Yan Arlaud
Distribution : StudioCanal
Musique : Armand Amar
Costumes: Edith Vesperini

Casting :
Jamel Debbouze : Saïd
Sami Bouajila : Abdelkader
Roschdy Zem : Messaoud
Bernard Blancan : Colonel Faivre

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