WINTER’S BONE : Là où vous ne passerez pas vos vacances

wintersboneafficheVous pensez avoir une vie de merde ? Vous trouvez que les gens qui vous entourent ne sont ni intéressants, ni sympathiques, ni très fréquentables ? Vous estimez que l’endroit où vous habitez est un trou sans fond duquel il est dur de sortir ? Et bien, venez rencontrer la jeune Ree Dolly, héroïne du film Winter’s Bone, sorti en catimini en France, mais nominé pour l’Oscar du meilleur film cette année. Vous changerez sûrement alors d’avis et surtout vous aurez l’occasion de voir un excellent film.

Ree Dolly a 17 ans, habite au fin fond du fond du Missouri, et tient sa famille à bout de bras. Sa mère malade ne peut guère l’aider à prendre soin de son petit frère et sa petite sœur. Elle est sans nouvelle de son père, jusqu’au jour où on vient lui annoncer qu’il a mis en gage leur maison pour payer sa caution et sortir de prison, en attendant son jugement pour trafic de drogue. Et s’il ne se présente pas à ce dernier, elle sera alors saisie. La jeune Ree décide donc alors de le retrouver pour ne pas finir à la rue avec sa famille. Mais le moins que l’on puisse dire, c’est que la population locale ne se montre pas très coopérative.

Winter’s Bone est un vrai et beau film noir. Si la première demi-heure donne à penser qu’il s’agit plutôt d’un film social, sur la misère financière (et disons-le intellectuelle) de l’Amérique tellement profonde qu’on a du mal à croire qu’elle existe, l’heure qui suit nous plonge en plein polar parfois dur, parfois violent, mais jamais inutilement spectaculaire. Rassurez-vous, la jeune fille ne finit pas par venger son père en tuant tous les dealers locaux à grands coups de mitraillette. Il s’agit avant tout d’un vrai film de personnages, mais porté par une véritable intrigue, dont on attend avec impatience de connaître le fin mot.

Un personnage domine largement les autres dans Winter’s Bone. Il s’agit bien sûr de l’héroïne principale dont le courage et la détermination sont inversement proportionnels à son âge et son gabarit, plutôt frêle. Elle est particulièrement attachante, par l’admiration qu’elle force, face à des évènements et circonstances plutôt défavorables. Un vrai combat auquel on a particulièrement envie de contribuer. Bref, on entre vraiment de plus en plus dans l’histoire au fur et à mesure que celle-ci s’accélère.

Winter’s Bone est donc un excellent film noir dans un contexte et avec des protagonistes quelques peu inattendus. Cette plongée dans une Amérique profonde qui disons-le fait vraiment peur contribue évidemment également à l’intérêt de ce film, en lui conférant un certain « exotisme ». Des personnages terrifiants qui hantent un monde sauvage, où la loi du plus fort règne en maître. Un monde où votre voisin cherchera bien plus souvent à assurer sa propre survie qu’à vous aider. La jeune Ree semble bien frêle pour frayer son chemin dans un tel contexte, mais c’est justement ce qui rend son histoire aussi admirable.

wintersboneWinter’s Bone est une histoire de femmes. Debra Granik signe là un second long-métrage (le premier distribué en France) réellement remarquable et surtout superbement réalisé. Une nomination aux Oscars amplement méritée pour un film qui souffre simplement d’un léger manque de rythme dans la première demi-heure. On atteint jamais un rythme effréné, car sa caméra s’attache toujours à nous montrer avec précision l’environnement dans lequel le film se déroule. Mais il y a une vraie élégance dans la photographie et comme tout film noir, l’ambiance générale l’emporte largement sur l’action.

Autre nominée aux Oscar, la jeune Jennifer Lawrence, que l’on avait pu découvrir en 2009 dans le très beau Loin de la Terre Brûlée, pour lequel elle avait reçu un prix à la Mostra de Venise. Un tel palmarès à 20 ans, ce n’est pas donné à tout le monde et on espère la revoir longtemps à l’écran. Sa performance est à l’image de Winter’s Bone. Pas forcément spectaculaire, mais d’une justesse remarquable. Un mot tout de même, sur un troisième nominé, en la personne de John Hawkes, que les amateurs de la série Deadwood seront heureux de retrouver enfin sur grand écran. Surtout que c’est là une vraie réussite.

La dernière nomination de Winter’s Bone était pour l’Oscar du meilleur scénario. Cela résume très bien la qualité de ce film parfois vraiment noir, mais réalisé avec une sensibilité et une élégance toute féminines.

Fiche technique :
Production : Anonymous Content, Winter’s Bone productions
Distribution : Pretty Pictures
Réalisation : Debra Granik
Scénario : Debra Granik, Anne Rossellini, d’après le roman de Daniel Woodrell
Montage : Affonso Gonçalves
Photo : Michael McDonough
Décors : Mark White
Musique : Dickon Hinchliffe
Durée : 100 mn

Casting :
Jennifer Lawrence : Ree
John Hawkes : Teardrop
Kevin Nrezhnahan : Little Arthur
Dale Dickey : Merab
Garret Dillahunt : le Sheriff
Shreyl Lee : April
Lauren Sweetser : Gail

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