APPRENDRE DE SES VICTOIRES

benoithamonApprendre de ses défaites constitue une des plus grandes preuves d’intelligence. Mais savoir apprendre de ses victoires est aussi un exercice difficile que peu de gens savent mener à bien. Visiblement, Benoît Hamon n’a pas su le réussir. Tout ce qu’il lui avait permis de l’emporter sans contestation face à Manuel Valls lors des primaires semble s’être évaporé, jusqu’à le faire ressembler par certains côtés à son ancien adversaire. Temporairement ?

Benoît Hamon a réussi un exploit depuis son intronisation. Celle de démultiplier l’intérêt médiatique porté à Yannick Jadot, qui n’en demandait pas tant. Il se situe ainsi dans la grand tradition socialiste de permettre à tout un tas de partis politiques sans base réelle de survivre. Tout militant PS sait que ces derniers savent très bien qu’ils doivent être prêts à s’effacer lors d’élections locales pour laisser place à des parfaits inconnus issues, au choix, des Verts, du PRG, du MRC, du MUP, des groupuscules écolos divers et variés. Je mettrai à part le Parti Communiste, avec qui la situation est parfois inverse dans certains de ses fiefs. Tous ces partis n’ont d’élus que par la bonne grâce du Parti Socialiste, sur qui il crache pourtant allégrement tout le reste du temps.

Puisque la compétition s’annonce serrée, il est facile de se dire que Benoît Hamon aura besoin des 2% que pèserait le candidat d’EELV. Mais la manière dont il s’est englué depuis 15 jours dans des discussions avec un groupuscule sans militant, ni même ligne politique claire, l’a renvoyé à son image d’homme d’appareil dont il était parvenu à se défaire brillamment pendant les primaires. Au final, l’élan issu de la primaire semble s’être tassé et il a sûrement perdu ainsi bien plus des 2% qu’il espère conquérir.

L’union de la gauche… Voilà un mythe qui a la vie dure. On répète à l’envi que la gauche ne l’a emporté que quand elle était unie au niveau national. Déjà c’est faux (1988 ou 2012) et surtout il y a derrière cette une idée une dramatique erreur de diagnostic. Si l’union de la gauche a une vertu, ce n’est pas dans par elle-même, que parce qu’elle permet au PS de faire ce qu’il devrait toujours faire et qu’il ne fait que trop rarement : parler à l’immense majorité des électeurs qui se tamponnent totalement le coquillard de ces histoires d’alliance de parti (et au fond, ils ont bien raison).

Le PS a toujours cette affreuse habitude de penser que le monde n’est composé que des personnes hautement politisées. Or c’est faux ! Aux élections locales, vu le taux d’abstention et puisque ces dernières votent bel et bien, cela peut porter ses fruits. Mais à l’élection présidentielle qui rassemble la quasi totalité du corps électoral, cela constitue une erreur funeste qui lui a valu bien des déconvenues. Benoît Hamon est devenu totalement inaudible pour cette majorité silencieuse, celle qui lui fera éventuellement gagner cette élection. Il aurait mille fois mieux valu qu’il laisse EELV dans le grand néant où il se situait.

Quant à l’alliance éventuelle avec Jean-Luc Mélenchon, c’est juste une farce à laquelle personne n’a jamais cru, d’un côté ou de l’autre.

Benoît Hamon est également très mal parti dans son attitude vis-à-vis d’Emmanuel Macron. Il serait bon qu’il se rappelle comment il est apparu comme le grand vainqueur du débat face à Manuel Valls. Hamon exposait ces idées, Valls les commentait. La victoire d’Hamon fut nette et par K.O. Aujourd’hui, force est de constater que la place de celui dont tout le monde parle est bien Emmanuel Macron. Si Benoît Hamon pense une seule seconde qu’il va refaire son retard en mettant en lumière toutes les faiblesses, réelles, du leader de En Marche, il commettra la même erreur grossière de jugement que Manuel Valls quand il pensait inverser la tendance en « pilonnant son adversaire ».

Benoît Hamon a remporté les primaires en étant l’homme qui défendait une idée forte et tous ses adversaires se sont évertués à en faire le centre du débat et lui offrir la victoire sur un plateau. Qu’il continue sur cette voie s’il compte l’emporter. La principale question est de savoir s’il possède encore des munitions pour reprendre la main. S’il compte s’asseoir à l’Elysée avec le seul revenu universel comme étendard, il va au devant d’une grande désillusion.

J’ignore s’il a encore des idées fortes sous le coude. Mais sa victoire sera à ce prix. Et uniquement à ce prix !

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