Après le prostitué accro au crack, la jeune Marocaine en plein déni de grossesse. Tout cela, dans la même soirée cinématographique. On imaginera facilement que j’en ai connues des plus légères et des plus enjouées. Mais j’en aurais aussi connues surtout des plus décevantes en termes de qualité. En effet, si Sauvage restait imparfait, Sofia est un film qui sort du lot pour plusieurs raisons. Certes, pas par son humour, mais il existe bien d’autres raisons pour apprécier un long métrage. En tout cas, il constitue une nouvelle preuve de la vitalité d’un cinéma nord africain qui retranscrit l’aspiration d’une jeunesse à la liberté et la disparition des carcans. Notamment ceux qui pèsent sur les rapports homme-femme.
Sofia bénéficie en premier lieu d’un scénario réellement brillant. On pourrait penser assister à une histoire relativement balisée. Il n’en est rien. Elle réserve au contraire de vraies surprises qui prend le spectateur au dépourvu et le force à quitter un point de vue trop consensuel. Le film échappe à tout manichéisme et s’il porte une dénonciation et une colère, il montre aussi à quel point les acteurs de l’oppressions ne sont pas toujours (que) ceux que l’on attend. Meryem Benm’Barek traite à travers son film bien des problématiques et des fractures qui parcourent la société marocaine, pas seulement celles liées au poids des traditions et de la religion. Elle livre également une réflexion humaniste à la portée largement universelle.
La réalisation de Meryem Benm’Barek reste relativement sobre, sans effet de style spectaculaire. Mais elle sait mettre parfaitement en lumière les personnages et leurs émotions, qui constituent le ciment de cette histoire. Maha Alemi restera la jolie révélation de Sofia, donnant vie à son personnage avec un naturel déconcertant. Lubna Azabal attrape la lumière à l’écran de manière beaucoup plus forte que sa partenaire, mais tout cela colle parfaitement avec la personnalité des deux protagonistes qu’elles incarnent. Elles donnent le ton d’un casting qui est tout entier sur ce registre. Ils contribue tous à faire de ce film infiniment plus riche que les moyens (et l’exposition médiatique) dont il a visiblement bénéficier.
LA NOTE : 14/20
Fiche technique :
Réalisation et scénario : Meryem Benm’Barek
Photographie : Son Doan
Montage : Céline Perréard
Durée : 80 minutes
Casting :
Maha Alemi : Sofia
Lubna Azabal : Leila
Faouzi Bensaïdi : Faouzi
Nadia Benzakour : Fatiha
Nadia Niazi : Zineb
Sarah Perles : Lena
Ghita Fokri : Sanaa