L’ILLUSIONNISTE : Joile résurrection

lillusionnisteafficheIl est des œuvres qui prennent leur temps pour voir le jour. L’Illusionniste en fait partie. A l’origine, il aurait du être un film de Jacques Tati, mort en 1982 avant que le scénario ne soit achevé. 30 ans plus tard, Sylvain Chomet, le réalisateur des Triplettes de Belleville, a repris le flambeau et a porté cette histoire à l’écran, sous la forme d’un film d’animation. Une jolie réussite et un bel hommage qui fait revivre cet univers si particulier…

Tatischeff est un illusionniste dont la carrière bat de l’aile. En cette fin des années 50, le music-hall traditionnel ne fait plus recette. Il décide alors de tenter sa chance à Londres, mais la situation n’est guère différente. Un jour, au fin fond de l’Ecosse, il croise le chemin d’Alice une jeune adolescente un peu naïve qui se décide à le suivre dans sa tournée.

J’avoue être bien embêté pour écrire cette critique car l’univers de Jacques Tati ne m’a jamais enthousiasmé comme il devrait. J’ai toujours vu ses films avec un intérêt poli et amusé, mais sans jamais crier au génie. Alors évidemment, L’Illusionniste m’a fait un peu la même impression. Par contre, si je dois reconnaître un immense mérite à Sylvain Chomet, c’est celui d’avoir réussi à faire revivre cet univers à la perfection. La tentation a du être grande de profiter des possibilités offertes par le cinéma d’animation pour en rajouter des tonnes. Ici, il reste dans un univers visuel qui aurait pu être celui d’un film dans des décors réels. Seul le lapin apporte une petite touche cartoon, mais qui reste tout à fait dans l’esprit.

L’Illusionniste est bien plus poétique que vraiment comique. Là encore la fidélité avec Tati est respecté. On ne rit que très rarement, pour ne pas dire jamais, aux éclats. Mais on savoure avec un œil amusé et étonné ce personnage improbable et intemporel évoluer dans un environnement où rien ne semble vraiment fait pour lui. Lunaire apparaît comme le terme le plus approprié pour le définir. Du coup, il ne sait guère que faire de cette jeune fille attachante mais qui n’a pas sa place dans sa vie d’artiste solitaire.

lillusionnisteL’Illusionniste respecte aussi l’absence quasi totale de dialogues, si caractéristiques du cinéma de Tati. Non que le film soit muet et les personnages incapables de parler, mais tout passe ici par le visuel, les expressions, les postures, les gestes et les relations avec les objets. Il y’a dans ce film, comme il y’a toujours eu chez Tati, une certaine nostalgie du cinéma muet où le moindre élément d’un décor tout ce qu’il y’a de plus anodin et quotidien pouvait devenir source de burlesque et de comique. Une vraie créativité visuelle qui est évidemment facilitée ici par le recours à l’animation mais qui, encore une fois, reste dans totalement dans l’esprit du cinéma dont il s’inspire.

Graphiquement, on retrouve la qualité de l’animation des Triplettes de Belleville. Une animation traditionnelle mais à l’animation fluide, aux personnages expressifs et surtout au décors fourmillant de détails. L’animation traditionnelle a encore de beaux jours devant elle, j’en suis certain et l’Illusionniste contribue largement à le prouver. Il y’a un charme particulier, différent de celui des créations Pixar, et qu’il serait vraiment dommage de voir disparaître de nos écrans pour cause d’une supposée ringardise.

Tous les fans de Jacques Tati trouveront donc leur bonheur avec l’Illusionniste. Ceux comme moi, dont son cinéma a toujours laissé quelque peu indifférent, pourront tout de même apprécier le travail en tout point remarquable de Sylvain Chomet.

Fiche technique :
Production : Django films, Cine B, France 3 Cinéma
Distribution : Pathé distribution
Réalisation : Sylvain Chomet
Scénario : Jacques Tati
Montage : Sylvain Chomet
Décors : Isabel Stenhouse, Bjorn Erik Aschim
Musique : Sylvain Chomet, Jean Goudier
Effets spéciaux : Olivier Malric
Directeur artistique : Bjarne Hansen
Durée : 80 mn 

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