FIGHTER : Des acteurs vainqueurs par KO

fighterafficheLa boxe et le cinéma vivent une folle histoire d’amour. Pourtant, si j’aime passionnément le second, je voue le plus grand mépris au premier, qui n’a rien du noble art qu’il prétend être. Mais je dois admettre que quand les deux sont réunis, cela nous offre souvent de très beaux moments de cinéma. Raging Bull, Ali, Rocky, Million Dollar Baby… autant de films devenus des classiques qui m’ont tous beaucoup marqués. Cela sera également le cas de Fighter, un très beau film sur cet univers, récompensé par deux Oscars.

Dick Eklund a connu la gloire 15 ans plutôt en remportant un match de boxe contre Sugar Ray Robinson. Mais aujourd’hui, il n’est plus qu’un drogué accro au crack, même s’il continue à parler d’un éventuel come-back. Il coache pourtant son demi-frère, Micky Ward, managé par leur mère qui ne lui trouve que des combats de seconde zone. Ce dernier possède pourtant un certain talent, mais la présence écrasante de sa famille empêche sa carrière de prendre son envol. Un jour, il rencontre Charlene, barmaid, mais aussi une des rares personnes du coin à avoir fréquenté l’université. Saura-t-elle l’arracher à cette médiocrité dans laquelle sa famille le maintient ?

Fighter nous raconte la véritable histoire de Dick Eklund et Micky Ward. Enfin, aussi vraie que peut l’être un film, dont le scénario romance forcément plus ou moins la réalité des évènements. L’apparition des véritables protagonistes lors du générique de fin nous permet d’apprécier pleinement le travail de Christian Bale et Mark Wahlberg pour leur ressembler. Mais je reviendrai sur l’interprétation, qui constitue la plus grande force de ce film.

Fighter n’est pas qu’un film de boxe. Elle constitue un prétexte, un support à un propos qui n’a rien à voir avec le sport. Enfin, les amateurs de ce dernier apprécieront tout de même le combat final, qui confirme le caractère profondément cinémagénique de cette activité qui me semble n’être qu’une pure barbarie sur petit écran. Pour résumer, ce film nous parle surtout des rapports familiaux au cœur de l’Amérique profonde. Bon depuis Winter’s Bone, on sait que l’on trouve toujours une Amérique encore plus profonde, mais bon, celle-là est déjà pas mal dans son genre.

Comment échapper à la médiocrité intellectuelle du milieu où l’on naît n’est pas un thème vraiment nouveau. C’est sans doute là que réside la plus grande limite de Fighter qui nous raconte une histoire maintes fois contée. Mais David O.Russel nous livre là une vision particulièrement fine et intelligente de ce thème, qui n’a tout de même rien d’éculé. Aucun manichéisme, aucun stéréotype social ici. Il nous offre une vision du rêve américain loin du glamour hollywoodien habituel. Pas de noirceur pessimiste pesante, mais pas d’optimisme béat non plus. Du coup, on apprend à aimer tous ces personnages, même ceux qui, dans un premier temps, nous mettait quelque peu mal à l’aise. On rentre alors totalement dans l’histoire et devenons les premiers supporters de Micky Ward. Et c’est alors qu’on comprend que le réalisateur a parfaitement réussi son pari.

fighterEt si Fighter a donc un minimum de fond, il brille encore plus sur la forme. Le film s’ouvre sur le visage de Christian Bale, les yeux hallucinés, considérablement amaigri pour le rôle. Des ces premières secondes vous sentez que vous aurez affaire à un vrai moment de cinéma. Un acteur ne se transforme pas ainsi pour un rôle médiocre. Son Oscar du second rôle est amplement mérité et on attendait pas forcément cet acteur talentueux et solide à un pareil niveau de composition. Sa performance est un aspirateur à superlatifs de incroyable à hallucinant, en passant par énorme et inoubliable.

Un vrai film d’acteurs donc, car le reste du casting n’est pas en reste. Elle aussi récompensée aux Oscars, Melissa Leo, qui interprète la mère des deux boxeurs, livre une performance peut-être moins spectaculaire mais beaucoup plus subtile et ambiguë. Les rapports d’amour-haine qu’elle entretient avec ses enfants sont remarquablement bien décrits grâce à la crédibilité qu’elle apporte à son personnage qui aurait pu facilement devenir auto-parodique.

Enfin, Mark Wahlberg, dans le rôle principal, est lui aussi étonnant. Certes, il est quelque peu éclipsé à l’écran comme dans le scénario par son frère et Christian Bale, mais il n’en reste pas moins qu’il a su lui aussi élever son niveau de jeu, pour reprendre une expression sportive, et être à la hauteur de ses coéquipiers. De plus, les demoiselles apprécieront sa plastique impeccable… Je penserai désormais à lui quand je soulèverai mes haltères, même si je crains ne jamais avoir, de près et même de loin, le même torse que lui…

Fighter fait pour l’instant partie des meilleurs films de cette année. Je n’y ai toujours pas trouvé toutes les raisons d’un enthousiasme complet, mais bien assez pour une admiration sans bornes pour le remarquable, et parfois étonnant, travail artistique et scénaristique accompli.

Fiche technique :
Production : Paramount Pictures, Mandeville Films, Relativity Media, Closest to the Hole Productions
Distribution : Metropolitan FilmExport
Réalisation : David O. Russell
Scénario : Scott Silver, Paul Tamasy, Eric Johnson (II)
Montage : Pamela Martin
Photo : Hoyte Van Hoytema
Décors : Judy Becker
Musique : Michael Brook
Costumes : Mark Bridges
Directeur artistique : Laura Ballinger
Durée : 113 mn

Casting :
Mark Wahlberg : Mickey Ward
Christian Bale : Dicky Eklund
Amy Adams : Charlene
Melissa Leo : Alice Ward

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