Le cinéma anglais sait mieux que tout autre marier comédie et social. C’est presque devenu une marque de fabrique, si bien qu’on parle souvent de « comédie à l’anglaise » pour désigner ce genre de production. Voici un nouvel exemple avec We Want Sex Equality, un film tiré d’une histoire vraie, se déroulant en 1968, mais qui reste, bien malheureusement, toujours d’actualité.
Rita est ouvrière dans un des usines Ford installées en Grande-Bretagne. Les femmes y sont peu nombreuses et sont surtout payées nettement moins que les hommes. Pour remédier à cette injustice, elles se décident à mener une action que l’on pensait typiquement masculine : elles se mettent en grève. Si le mouvement reçoit d’abord la sympathie de leur collègue du sexe soi-disant fort, quand il finit par bloquer toute la production et par mettre tout le monde au chômage, leur combat n’est plus vu avec un œil si favorable.
Les inégalités salariales entre les hommes et les femmes restent malheureusement une réalité toujours bien présente. En voyant We Want Sex Equality, on peut se dire que l’on revient de très loin et qu’il y a eu déjà beaucoup de progrès accomplis. Mais enfin, l’optimisme enthousiaste du texte qui début le générique prête un peu à sourire. Enfin, cela n’enlève rien à la portée de ce film et du combat que Rita et ses collègues ont mené à l’époque.
Il est évidemment toujours difficile de mesurer exactement la part de fiction dans cette reconstitution qui se veut fidèle. Le générique de fin nous montre des photos de l’époque et nous présente les protagonistes tels qu’elles sont aujourd’hui (autant dire qu’elles ont bien vieillis). C’est une technique de plus en plus utilisée (cf. Fighter), comme si cela constituait une caution sur la véracité des évènements tels qu’ils apparaissent dans le scénario. Cela reste évidemment à prouver… mais honnêtement on s’en fout !
We Want Sex Equality est un film, pas un documentaire. Et c’est un film très réussi. Sûrement pas la comédie anglaise du siècle, mais une production fort sympathique, parfois même enthousiasmante. On prend très vite le parti de ces ouvrières contre leurs collègues mâles, dont la solidarité connaît très vite ses limites. C’est d’ailleurs là, l’élément le plus intéressant de ce film où de nombreux personnages se voient tiraillés entre une solidarité entre classes sociales et une solidarité entre genres. Marx peut parfois aller se rhabiller quand il s’agit de défendre le machisme !
We Want Sex Equality mélange avec bonheur le rire, l’émotion et la critique sociale. L’équilibre trouvé par Nigel Cole est remarquable et chacun pourra donc trouver son bonheur dans ce film. On ne s’y ennuie jamais, l’intrigue avance toujours avec un rythme suffisant pour maintenir notre attention du début à la fin. Le dénouement est amené en conservant un certain sens du suspense, ce qui constitue une barrière radicale contre l’ennui.
Mais We Want Sex Equality brille surtout pas la sympathie que nous inspire tous les personnages. Si cela n’avait pas été le cas, si nous n’avions pas envie de mener le combat avec elles, ce film n’aurait évidemment pas connu la même réussite. Bien sûr, le personnage de Rita, parfaitement interprété par Sally Hawkins, définitivement une valeur sûre du cinéma britannique, est particulièrement mis en avant, mais c’est tout le casting féminin qui est à salué. Mais ne soyons pas non plus sexiste et n’oublions pas ce bon vieux Bob Hoskins, qui se fait désormais plutôt rare, mais que l’on retrouve ici avec bonheur comme contremaître épousant totalement le combat de ses protégées.
We Want Sex Equality ne va certainement pas devenir aussi culte qu’un Full Monty ou qu’un Looking For Eric, mais il prouve s’il en était encore besoin que les Anglais sont les champions incontestés de la comédie sociale.
Fiche technique :
Production : Paramount Pictures UK, Number 9 Films Ltd., BBC Films, Audley Films, UK Film Council
Distribution : ARP Sélection
Réalisation : Nigel Cole
Scénario : William Ivory
Montage : Michael Parker
Photo : John De Borman
Décors : Andrew McAlpine
Musique : David Arnold
Directeur artistique : Grant Armstrong, Ben Smith
Durée : 113 mn
Casting :
Sally Hawkins : Rita O’Grady
Bob Hoskins : Albert
Rosamund Pike : Lisa Hopkins
Miranda Richardson : Barbara Castle