SUCKER PUNCH : Le premier waouh ! de 2011

suckerpunchafficheMon année 2011 attendait encore son premier « waouh ! » cinématographique, un film méritant la note maximale de 5 étoiles. Je l’ai refusé aussi bien à Black Swan, Le Discours d’un Roi ou encore True Grit, pour diverses raisons. Je commençais à me demander si cette année n’était pas maudite. Et puis, un éclair est venu déchiré l’obscurité. Un éclair venu d’un film dont je n’attendais pourtant pas grand chose, voire même dont je redoutais le pire. Un éclair inattendu donc, mais non pas moins brillant. Un éclair nommé Sucker Punch.

Une jeune fille est enfermée dans un hôpital psychiatrique par son beau-père, qui cherche avant tout à récupérer l’héritage qu’il convoitait. A l’aide d’une jolie somme d’argent, il la condamne à la lobotomie sous cinq jours. Mais d’ici là, elle est bien décidée à monter un plan d’évasion avec l’aide de quelques compagnes d’infortune. Un plan qu’elle va vivre entre rêve et réalité.

Zack Snyder est un réalisateur qui ne laisse pas indifférent. Ses films possèdent tous une esthétique extrêmement marquée. Du coup, si on n’accroche pas visuellement, on sent vite la nausée monter. Ainsi, ses deux œuvres principales, 300 et Watchmen, m’ont laissé des impressions quelque peu contrastées. D’un côté, un de mes pires souvenirs cinématographiques avec des hommes en slips qui beuglent « Spaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaartians » pendant deux heures, me plongeant dans une consternation totale. De l’autre, un film culte, d’un ésotérisme fascinant, visuellement superbe et d’une incroyable profondeur. Honnêtement, surtout vu ce que j’en avais lu, je craignais vraiment que Sucker Punch tienne plus du premier que du second. Mais il n’en est rien.

Sucker Punch est une œuvre qui s’apprécie à différents niveaux. Au premier, il est vrai que l’on peut trouver ça parfois ridicule. Des nymphettes en costume d’écolière qui se battent contre des zombis nazis ou des orcs en armure, cela peut laisser quelque peu circonspect. Vous lirez d’ailleurs très certainement souvent ce même reproche, teinté d’un mépris condescendant, à propos de ce film : il ne s’agit que d’un grand jeu vidéo. Et bien oui, disons-le haut et fort, ce film, dans sa structure même, est marqué par cette culture. Mais après tout, en quoi serait-ce forcément négatif ? Les jeux vidéos sont depuis plusieurs années les produits culturels les plus vendus, il est logique que des éléments qui y sont nés irradient vers d’autres formes d’expression artistique.

Mais Zack Snyder ne se contente pas de s’inspirer de la culture des jeux vidéos. Il puise également largement dans le cinéma de science-fiction ou fantastique, dans l’héroic fantasy et également dans l’univers du manga. Bref autant de domaines estampillés « sous-culture », auquel Sucker Punch rend un splendide hommage. Car ne nous y trompons pas, ce film n’est pas la mauvaise adaptation d’un jeu vidéo. Sucker Punch n’est pas non plus un film, comme Tron, cherchant à nous prouver que finalement les geeks sont eux-aussi des gens formidables. Sucker Punch n’est pas un film sur l’univers des jeux vidéos. Non, simplement, Sucker Punch reprend des éléments culturels nés sur ce support, des codes et aussi une structure narrative bien particulière. Pendant une bonne partie du film, le scénario ressemble à la succession des niveaux d’un jeu vidéo, avec un aspect quelque peu redondant, telle la déclinaison d’une même idée sous diverses variantes. Certains y verront la preuve de l’absence d’un scénario vraiment solide. D’autres, retrouveront simplement une manière familière de raconter une histoire, certes inhabituelle au cinéma, mais nullement dévalorisante.

Sucker Punch exploite en fait des dizaines, voire des centaines d’éléments issus de ces cultures. On peut trouver l’idée des nymphettes en costume d’écolière ridicule, il n’empêche que pour moi et beaucoup d’autres pour qui les mangas font intégralement partie de notre univers culturel, elles font partie de notre imaginaire, au même titre que les figures du cow-boy dans les westerns ou du détective privée dans un polar, qui sont, au cinéma, très éloignées de ce qui existe dans le monde réel. Zack Snyder n’est pas le premier à mettre sur grand écran une guerrière en jupette, Tarantino l’avait fait avant lui dans son Kill Bill, avec un second degré peut-être plus évident, mais tout aussi réel.

Sucker Punch est par bien des aspects dans la même lignée que le cinéma Tarantino. Il reprend à son compte des éléments tirés de ce que certains jugent comme de la sous-culture pour en faire une œuvre originale réalisée avec un infini talent. Je veux bien admettre que Zack Snyder le fait avec moins de subtilité, moins de détachement que Quentin Tarantino. D’ailleurs, si on doit faire un reproche à ce film, c’est paradoxalement sa richesse quasi infinie. Il y a une référence à la seconde, si ce n’est plus. Par exemple, le temps d’un plan extrêmement court, on s’aperçoit que les jeunes filles portent à la ceinture des pistolets ressemblants fort aux mousquets que l’on retrouve sur l’affiche de Pirates des Caraïbes. C’est juste un détail, mais qui parle à l’imaginaire des familiers de ces univers. Et on trouve ici des centaines de clin d’œil de ce type. Alors, il est vrai, parfois, cela donne un peu une impression de catalogue, de zapping. Mais cela avant tout constitue un jeu dans lequel on peut facilement rentrer avec enthousiasme. Personnellement, ça me donne fortement envie d’aller le revoir pour essayer de repérer toutes les références que j’ai ratées, et je pense qu’elles sont extrêmement nombreuses.

suckerpunchMais Sucker Punch est avant tout un film visuellement superbe, à la personnalité extrêmement prégnante. C’est à la fois sa plus grande force et sa plus grand faiblesse, puisque soit on aime, soit on déteste. Cependant, on ne peut que s’incliner devant l’incroyable travail de Zack Snyder. Rassembler autant d’éléments disparates pour en tirer un univers esthétique aussi cohérent et personnel ressemble à un tour de force. Cela prouve également que ce réalisateur n’est pas doué uniquement pour adapter à l’écran des univers visuels nés dans des pages de comics. Il sait créer un monde bien à lui, sublimé par un travail de photographie prodigieux, une bande-son incroyable et des effets spéciaux à couper le souffle.

Bon, c’est bien tout ça, mais ça a quand même ses limites. Le festival de références, agencées en une structure de jeux vidéos, c’est amusant, mais relativement vain si on s’arrête là. Et une des plus grande qualité de Sucker Punch est de savoir, à un moment donné, abandonner son concept de base pour apporter une vraie conclusion à tout ça. Le dénouement de ce film est en tout point remarquable, avec un vrai retournement de perspective inattendu. Il n’y a pas qu’un talent de metteur en « image » chez Zack Snyder, il y a aussi beaucoup d’intelligence dans son écriture scénaristique. Ce n’est pas la qualité qu’il met le plus en avant dans ce film, c’est incontestable, mais en nous livrant une vraie fin, il fait définitivement de Sucker Punch un vrai grand et beau moment de cinéma.

Soyons honnêtes, il sera quand même difficile à ceux à qui la grand majorité des références vont échapper d’apprécier pleinement Sucker Punch. Mais, il n’est pas impossible qu’ils se laissent charmer par cet univers esthétique ésotérique et fascinant, tout à la fois extrêmement personnel et chargé des œuvres dont il s’inspire. Ils ne pousseront peut-être pas un waouh ! aussi enthousiaste que le mien, mais un petit waouh ! quand même.

Fiche technique :
Production : Warner Bros. Pictures, Lennox House Films, Legendary Pictures, Cruel and Unusual Films
Distribution : Warner Bros. France
Réalisation : Zack Snyder
Scénario : Zack Snyder, Steve Shibuya
Montage : William Hoy
Photo : Larry Fong
Décors : Rick Carter
Musique : Tyler Bates, Marius De Vries
Effets spéciaux : John DesJardin
Directeur artistique : Patrick Banister, Todd Cherniawsky
Durée : 110 mn

Casting :
Emily Browning : Babydoll
Vanessa Hudgens : Blondie
Abbie Cornish : Sweet pea
Jena Malone : Rocket
Carla Gugino : Le docteur Vera Gorski
Scott Glenn : Le sage

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