SALAUDS DE PAUVRES OU LE CHOIX QUE JE N’AI JAMAIS EU 2, LE RETOUR !

laurentwauquiezCet article, voilà plus d’une semaine que j’avait l’intention de l’écrire, mais je n’ai malheureusement pas eu le temps de le faire plus tôt. Evidemment, depuis l’actualité a complètement changé de sujet. J’aurais pu laisser tomber et commenter ce qui occupe depuis trois jours les médias du monde entier. Mais honnêtement, vu où en sont les choses, je n’aurais pas grand chose d’intéressant à dire et je n’écris pas ici pour me livrer à de la politique fiction autour d’un fait divers sordide. Je préfère donc continuer à me concentrer sur ce qui, espérons-le très fort désormais, va nous emmener jusqu’à l’élection présidentielle de 2012 : le débat d’idées !

Les propos abjects tenus par Laurent Wauquiez il y a une dizaine de jours m’ont fait me poser cette question existentielle : quel est le jour où j’ai décidé de ne pas être un assisté et j’ai préféré devenir un cadre supérieur ? Evidemment, ce jour n’existe pas car en fait la question n’a pas de sens. Pour la simple et bonne raison que je suis bel et bien un assisté !

Quoi ? Comment ? Pourquoi ? Mais enfin, certains me diront que je travaille, que je cotise et que je paye des impôts ! Je ne suis donc pas un parasite. Mais dans ce cas-là qui l’est ? En effet, premièrement, tout le monde paye des impôts ! La plus grande invention française de l’histoire s’appelle la TVA et son succès est universel et mondial. Elle a ceci de magique qu’elle vous fait payer des impôts quand vous payez votre baguette de pain sans que ne vous en rendiez compte. Pourtant, elle représente près de la moitié des recettes de l’Etat (130,9 milliards sur 271,8), soit 2,5 fois plus que l’impôt sur le revenu (52,2 milliards) payés par les seuls « méritants ».

Bon, ok, les impôts ne sont pas un critère, mais bon je travaille… Enfin, il serait plus judicieux de dire que je suis salarié. Si on considère que travailler signifie être utile et créer de la richesse, pourquoi l’activité d’une mère célibataire, restant à la maison et vivant du RMI et des allocations, n’aurait pas la même valeur que celle d’une femme de ménage qui fait exactement la même chose ? On touche là la limite des indicateurs de richesse comme le PIB qui ne sait comptabiliser que les échanges qui se font sous forme monétaire. Pourtant, quand on connaît le coût pour la collectivité de l’ouverture d’une place de crèche, une mère au foyer enrichit toute la communauté en lui faisant faire des économies. Le travail domestique est un facteur objectif de création de richesses, au même titre que le salariat, mais il est dévalorisé pour la seule raison qu’il rentre difficilement dans les équations des économistes les plus libéraux.

Mais bon, reste l’argument ultime, je cotise ! En entretenant les assistés, je cotise à pertes et c’est injuste… Sauf que dire ça n’a aucun sens puisque par définition cotiser à un système d’assurances se fait à perte pour la majorité des assurés… Sinon, comment payer ceux qui en bénéficient au-delà de leurs cotisations lors « d’accidents » graves. On peut toujours mettre en avant le système bonus-malus des assurances automobiles qui vient contrer ce phénomène… sauf qu’il ne vient que l’atténuer car le système a fondamentalement besoin d’une majorité de cotisants à perte pour fonctionner. Le système assuranciel de la protection sociale est lui pleinement solidaire, même si certains voudraient le remettre en cause.

Bon bah si je cotise à perte, pourquoi je cotise ? Parce qu’il existe une chance que je sois du mauvais côté de la barrière un jour. J’aurais alors besoin de ce système solidaire qui impliquera forcément que d’autres cotisent pour moi à perte. En attendant, je me réjouis plutôt de voir mon argent partir vers d’autres, signe de revenus réguliers et d’une santé de fer.

Il semblerait donc que la frontière entre moi et les personnes dénoncées avec tant de haine par Laurent Wauquiez ne soit pas si nette que ça ! Diantre ! Vais-je devoir moi aussi faire des heures de travail d’intérêt général ? C’est fort possible, car lorsque l’on creuse encore, on s’aperçoit que ma situation est encore pire que ça. En effet, comment suis-je devenu ce cadre qui travaille, cotise et paye des impôts ? J’ai fait des études, pardi ! Après le triptyque primaire-collège-lycée, deux années en classe préparatoire puis grande école, 5 ans pendant lesquelles j’ai coûté plus cher à la collectivité que n’importe quel autre étudiant, coût dont j’ai, ou plutôt mes parents n’ont supporté qu’une infime partie. Tous les contribuables, y compris le RMIste qui achète sa baguette de pain, ont donc mis la main à la poche pour m’offrir la possibilité de gagner confortablement ma vie ! Je ne peux donc que le remercier chaleureusement !

Le contre-argument à ce que je viens de présenter est évidemment que je vais finir par rembourser ma dette à la société par mon travail, mes impôts et mes cotisations, alors que l’éternel RMIste non. Sauf qu’il y a une énorme différence entre lui et moi. C’est que moi, j’ai eu le choix et bizarrement, j’ai choisi de bien gagner ma vie. Et je ne connais personne qui ait fait le choix inverse.

Les propos de Laurent Wauquiez sont symptomatiques d’une certaine droite et de son électorat qui font des pauvres non des victimes, mais des coupables. Une vision de la société qui prédominait au XIXème siècle (relisez Zola à ce propos, il croque certains personnages qui vous rappellerons certains de nos contemporains). Ce genre de discours qui amène certains à développer des concepts aussi funestes que la « responsabilisation des malades »… Vous me rappelez la dernière fois que vous avez fait exprès d’être malade ?

Mais le plus choquant reste l’inexactitude de son discours purement idéologique, qui reposait sur des affirmations tout simplement mensongères. On peut alors se demander ce qui est le plus inquiétant : l’idée qu’un ministre puisse mentir volontairement ou qu’il base ses convictions sur des idées qu’il n’a jamais pris la peine de vérifier ? Mais être imprécis est si facile. Rappelez que le RMI est financé par l’impôt, que tout le monde paye, je le rappelle, et non les cotisations sociales et vous passerez pour un technocrate ennuyeux. Encore une fois les idées trop simples sont souvent de simples prétextes aux idéologies les plus nauséabondes.

Le pompon a été cette idée des travaux d’intérêt général à faire réaliser par les RMIstes. On passera sur le parallèle clair entre pauvreté et délinquance ou sur les arguments de l’UMP sur les difficultés d’organisation (par contre, moralement, il n’y a aucun problème ???). Mais enfin, soit on fait faire des choses inutiles à ces gens et dans ce cas là, on est vraiment dans la sanction, comme le bagnards qui cassaient des cailloux. Soit les tâches qu’on leur demanderait seraient utiles et dans ce cas-là, au lieu d’exploiter les pauvres, il serait plus intelligent de les faire accomplir dans le cadre d’un travail salarié, qui sortirait certains « assistés » de la précarité de manière durable. Du bon sens, dont Laurent Wauquiez semble totalement dénué.

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