J’AI RENCONTRE LE DIABLE : Noir paroxysme

jairencontrelediableafficheRares sont les films distribués en France avec la mention « interdit aux moins de 16 ans ». C’est le cas pourtant de J’ai Rencontré le Diable, un film noir, très noir, très très noir, très très très très noir. Un film aussi extrêmement violent et assez dérangeant, mais qui ne manque ni d’intérêt, ni d’une certaine intelligence et encore moins de profondeur dans le propos. Ames sensibles s’abstenir néanmoins.

Kyung-chul est un tueur psychopathe et sadique particulièrement redoutable. Cependant, sa dernière victime est la fille d’un chef de la police retraité et fiancée à un agent des services secrets coréens. Les deux hommes vont donc décider de mener leurs propres recherches. Mais traquer ainsi un homme pour se venger et le faire souffrir ne fait-il pas du chasseur un être aussi cruel que sa proie ?

Les chasses à l’homme et la vengeance représentent des thèmes classiques des films noirs. On les retrouve d’ailleurs très souvent dans le cinéma coréen qui excelle plus que tout autre dans ce genre cinématographique. J’ai Rencontré le Diable en constitue une nouvelle preuve, tant il arrive à marquer sa différence. Tout est poussé à son paroxysme dans ce film, mais avec assez d’intelligence, et non gratuitement, pour lui donner une force et intensité incroyable.

J’ai Rencontré le Diable va notamment incroyablement loin dans l’ambiguïté des personnages. On semble pourtant parti pour un film extrêmement manichéen et très vite tout bascule. Au final, on se demande même qui est bien le Diable dont parle le titre du film. C’est pourquoi, ce film est particulièrement troublant et nous offre une vraie réflexion sur la violence qui sommeille en chacun de nous, sur l’existence ou non de raisons valables pour la mettre en œuvre et sur la manière dont elle peut dévorer et faire perdre tout contrôle à celui qui s’y adonne.

Le tout est mise en image de manière particulièrement crue. On ne se situe pas dans un cinéma d’horreur où on cherche à faire couler l’hémoglobine pour le spectacle et le plaisir. Mais si elle coule autant dans J’ai Rencontré le Diable, c’est parce qu’elle est la conséquence de la violence que mette en œuvre le chasseur et sa proie dans leur lutte sans merci. Une violence qui se situe autant dans l’intrigue elle-même que dans les images, ce qui justifie pleinement l’interdiction aux moins de 16 ans. Le sang qui coule ici ne fait pas rire, c’est ce qui le rend si dérangeant.

J’ai Rencontré le Diable souffre néanmoins d’un défaut non négligeable. Sa longueur, 2h12. Je le répète à chaque fois que je parle d’un film coréen, mais le cinéma du pays du Matin Calme ne ressemble en rien à ses confrères chinois ou japonais. Le rythme de narration est souvent nerveux et rapide, comme n’importe quel film occidental. C’est aussi le cas ici, car jamais le scénario ne traîne en longueur, allongeant inutilement une scène. Par contre, à un moment donné, il tourne un peu en rond et on aurait pu arriver au dénouement plus rapidement, sans que le film n’y perde. Cependant, on ne peut jamais vraiment parler d’ennui.

jairencontrelediableSi j’apprécie autant le cinéma coréen, c’est aussi pour les incroyables acteurs qu’il est capable de nous offrir. La palme revient sans contexte à Choi Min-sik, absolument extraordinaire dans son rôle de tueur psychopathe, à côté duquel Hannibal Lecter est un bisounours. Il nous avait déjà époustouflé dans les fabuleux Ivre de Femmes et de Peinture et Old Boy et on peut vraiment le considérer comme un des tous meilleurs acteurs au monde. A ses côtés, au plutôt en face, Lee Byung-Hun, que l’on avait découvert dans le jouissif Le Bon, la Brute et le Cinglé et qui avait gagné de l’argent en jouant dans GI-Joe. Si son personnage est sans doute moins charismatique que son adversaire, il s’en acquitte avec un aplomb et un talent magistraux.

J’ai Rencontré le Diable est peut-être LE film noir de l’année, malgré quelques défauts. Une œuvre forte, un paroxysme du cinéma coréen, qui n’a d’égal en Occident que les Promesses de l’Ombre de David Cronenberg.

Fiche technique :
Production : Softbank ventures, Showbox, Peppermint & Co, Siz Entertainment
Distribution : ARP Sélection
Réalisation : Kim Jee-woon
Scénario : Hoon-jung Park
Montage : Na-young Nam
Photo : Mogae Lee
Musique : Mowg
Durée : 142 mn

Casting :
Lee Byung-hun : Kim Soo-hyeon
Min-sik Choi : Kyung-chul
Gook-hwan Jeon : Jang
Ho-Jin Jeon : Oh
San-ha Oh : Joo-Yeon

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