PLUTOT QUE SUR LE TAUX, BASONS-NOUS SUR LA BASE

impotsA quelques mois de l’élection présidentielle, le gouvernement fait flèche de tout bois pour doper sa politique sociale. Le sommet qui a eu lieu aujourd’hui a accouché de quelques annonces, mais dont on voit mal comment elles pourraient résoudre un problème de l’ampleur du chômage que connaît actuellement notre pays. Mais c’est surtout la fameuse TVA sociale qui a enflammé les débats ces derniers jours. Une mesure hautement impopulaire qui pourrait s’apparenter à un suicide politique, si la crise n’était susceptible de pousser l’électeur à tout et n’importe quoi.

L’idée même de la TVA sociale a provoqué une levée de boucliers à gauche. Bon, c’est vrai que c’est de bonne guerre en période électorale. Pourtant, il y’a deux éléments bien distincts dans cette histoire et il est dommage que le débat n’aille pas assez en profondeur pour les distinguer. D’un côté, il y a l’idée d’augmenter la TVA alors que la crise a déjà durement choqué les classes populaires. Or la TVA est un impôt régressif, puisqu’il pèse plus, en proportion, chez les ménages modestes qu’aisés. De plus, la consommation est toujours restée principal pilier de notre maigre croissance. Toute mesure qui pourrait lui nuire risquerait de nous plonger en récession.

Mais la TVA sociale c’est aussi, et j’ai envie de dire avant tout, l’idée de faire participer la consommation au financement de la protection sociale, qui aujourd’hui repose principalement sur les salaires. Or que les revenus du travail soient les seuls à financer le chômage ou les retraites peut se concevoir. Pour la santé et les allocations familiales, cela devient chaque jour un peu plus absurde, à mesure que l’importance des revenus financiers croît au détriment de ceux du travail.

Elargir l’assiette du financement de la sécurité sociale constitue donc  une vraie réflexion à mener et on voit mal comment la TVA, qui représente 50% des recettes fiscales de l’Etat, pourrait y échapper. Après, tout cela doit se faire dans le cadre d’une transformation globale et cohérente de la fiscalité et rien ne dit que cela aboutisse forcément à une augmentation de la TVA. On peut très bien imaginer que sur les 19,6% actuels, une partie soit affectée au financement de la protection sociale.

En fait, les propos échangés lors des débats sur la TVA sociale soulignent à quel point les discours sur la fiscalité souffrent généralement du même défaut : l’incapacité à distinguer l’assiette du taux. On se focalise le plus souvent sur ce dernier, alors qu’il n’est qu’une variable d’ajustement qui détermine certes le montant de votre feuille d’impôts, mais qui ne constitue pas ce qui donne à la fiscalité son sens, son utilité et son efficacité. L’assiette, c’est-à-dire sur quoi porte l’imposition, définit réellement et fondamentalement ce qu’est un impôt, à quoi il sert. La question essentielle n’est pas combien ça va coûter (ou rapporter selon le côté de la barrière où vous vous situez), mais sur quels éléments je donne à l’Etat la possibilité d’agir.

L’impôt est toujours plus efficace si sa base est large. Les éternels débats sur les niches fiscales montrent combien, à mesure que les mailles du filet se trouent, s’installent les injustices et le manque-à-gagner pour les finances publiques. Plus la base est large, plus les marges de manœuvre sont grandes, à la hausse comme à la baisse. C’est donc sur cet élément là que doit porter l’essentiel du débat. Celui sur la TVA sociale a bien montré que c’est rarement le cas.

Avant d’en finir, je vais tout de même souligner que les taux valent quand même le coup d’être discutés. Pas tant sur leur valeur absolue, mais sur leur nature progressive ou non. Avoir un barème progressif pour l’impôt sur le revenu, ou taxer tout le monde à la même hauteur comme cela se pratique dans certains pays change radicalement la signification de la fiscalité, lui donnant ou non un caractère redistributif. Or, c’est la perte de progressivité de la fiscalité dans notre pays qui a largement contribué aux creusements des inégalités délétères. Il est donc urgent d’y remédier.

L’idée développée par François Hollande, qui est pourtant censé ne pas en avoir, de rapprocher la CSG (base large mais impôt non progressif) et l’impôt sur le revenu (base totalement mitée, mais barème progressif) est donc excellente. Cependant, l’expliquer ne peut passer que par un débat technique. Espérons que la campagne vole assez haut pour que les Français puissent le comprendre.

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