UNE BOUTEILLE A LA MER : Les mots par delà les murs

unebouteillealamerafficheLes tensions religieuses au Proche-Orient ont inspiré deux très bons films en 2011 : le magnifique Et Maintenant On Va Où ? et la surprenante comédie le Cochon de Gaza. 2012 semble partie sur cette lancée avec une nouvelle production française de qualité qui nous plonge au cœur du conflit israélo-paléstinien : Une Bouteille à la Mer. Une œuvre au message simple, pleine d’un optimiste humaniste qui redonne un peu d’espoir.

Tal est une jeune française de 17 ans, dont la famille vient tout juste de s’installer en Israël. Un attentat dans son quartier la bouleverse et la pousse à vouloir comprendre le sens de tout ceci. Par l’intermédiaire de son frère, militaire à la frontière avec Gaza, elle envoie un message dans une bouteille, espérant qu’elle s’échoue et soit récupérée par un Palestinien acceptant de dialoguer avec elle. Quelques jours plus tard, le miracle se produit et elle reçoit une réponse.

Une Bouteille à la Mer est une belle histoire. Comme beaucoup de belles histoires, elle est un peu trop belle pour être vraie. Mais comme beaucoup de belles histoires trop belles pour être vraie, on a envie d’y croire. On est au cinéma, face à une fiction, pas face à un documentaire. Alors pourquoi pas ne pas rêver deux secondes. Surtout que, je vous rassure, le film ne se termine pas par « ils se marient et ont beaucoup d’enfants ». Le film n’est pas (trop) fleur bleue. Il est tout simplement optimiste. Et il n’y pas forcément de mal à l’être de temps en temps.

Au-delà de la naissance d’une amitié épistolaire improbable, Une Bouteille à la Mer cherche à mettre en parallèle le quotidien de chaque côté de la frontière. Les deux personnages n’ont rien d’exceptionnel, à part leur volonté d’échapper à la haine brute et aveugle. Mais ni l’un, ni l’autre ne peut échapper la peur, à la violence et la pression de la société dans laquelle ils vivent. Un des grands mérite du film est ne pas chercher à tout prix à nous expliquer qu’au fond, ils sont pareils. Non, ils vivent dans des mondes très différents, même s’ils ne vivent qu’à 45 km l’un de l’autre et forcément, leur personnalité, leur façon de voir le monde en est profondément affecté. Après, contrairement à tous ceux qui les entourent, il acceptent de considérer le point de vue l’autre, mais sans forcément le comprendre ou le partager.

Une Bouteille à la Mer est aussi un film sur l’adolescence. Une adolescence dans un contexte assez particulier, mais une adolescence quand même, avec son premier amour, ses premières cigarettes, ses interrogations. On regretterait presque que cet aspect ne soit que secondaire, tant il est traité avec beaucoup d’intelligence. Je souligne trop souvent que la vision cinématographique de cet âge si particulier tourne le plus souvent à la caricature et au ridicule. Il n’en est rien ici et cela joue beaucoup à l’attachement que l’on peut ressentir pour les personnages. Sans cela, on n’arriverait pas à rentrer aussi profondément dans cette histoire et on n’arriverait définitivement pas à y croire.

unebouteillealamerLa réalisation de Thierry Binisti est sobre et parfaitement au service de son histoire et de ses personnages. Il alterne les passages touchants, drôles et dramatiques avec le même bonheur. Il arrive à insuffler ce qu’il faut de rythme pour arriver à nous faire entrer dans cette histoire entre deux êtres qui ne peuvent se voir et se rencontrer.

Les deux acteurs sont parfaitement dans leur rôle. On avait remarqué Mahmud Shalaby dans les Hommes Libres, où il incarnait…un juif. Comme quoi, ces deux peuples ne sont définitivement pas si éloignés que cela. Quant à la jeune Agathe Bonitzer, elle quitte ici définitivement les rôles de petite fille qu’elle interprète depuis longtemps dans divers films français. Beaucoup de sensibilité dans une interprétation sobre et crédible.

Une Bouteille à la Mer est donc une belle histoire, très bien racontée. On espère juste un jour pouvoir en retrouver quelques unes de ce type au journal de 20h.

Fiche technique :
Production : TS productions, EMA Films, Lama Films, France 3 Cinéma
Distribution : Diaphana
Réalisation : Thierry Binisti
Scénario : Valérie Zenatti, Thierry Binisti, d’après le roman de Valérie Zenatti
Montage : Jean-Paul Husson
Photo : Laurent Brunet
Décors : Boaz Katznelson
Musique : Benoît Charest
Costumes : Halada Attalah
Durée : 99 mn

Casting :
Agathe Bonitzer : Tal
Mahmoud Shalaby : Naïm, Gazaman
Hiam Abbass : Intessar
Riff Cohen : Efrat
Abraham Belaga : Eytan
Jean-Philippe Ecoffey : Dn
Smadi Wolfman : Myriam
François Loriquet : Thomas
Salim Daw : Ahmed

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