ALOIS NOBEL : Austérité de velours

aloisnobelafficheAller voir un film qui ne se joue que dans un seul cinéma dans toute l’Ile de France (et ce même la semaine de sa sortie), demande une certaine motivation. Enfin, quand il s’agit de l’UGC des Halles, cela reste tout de même assez accessible. Il n’empêche. Mais bon, ceux qui me connaissent un tantinet savent bien que je ne manque jamais de motivation quand il s’agit d’aller au cinéma. J’ai donc été voir Aloïs Nobel, un film d’animation venu de République Tchèque.

Aloïs Nobel est un chef de gare plutôt solitaire. Il travaille dans le fin fond de ce qui est encore la Tchécoslovaquie. Nous sommes en 1989 et l’histoire de ce pays s’apprête à basculer. Mais avant cela, un fugitif va venir bouleverser la vie monotone d’Aloïs.

Aloïs Nobel est d’abord original, ou plutôt inattendu, par sa forme. Un film d’animation en noir et blanc pour un sujet qui s’adresse clairement à un public adulte. On retrouve là un peu la démarche de Valse avec Bachir, avec lequel ce film partage pas mal de choses, j’y reviendrai. Le pari semble osé, mais ce film a su séduire des distributeurs un peu partout en Europe. Si la sortie est restée discrète, elle confirme la bonne santé du cinéma européen.

Aloïs Nobel est un film qui, au-delà de l’histoire d’un personnage, baigne dans l’histoire d’un pays tout entier. L’intrigue se déroule alors que des évènements clé bouleversent le destin de cette nation. Mais elle fait aussi appel à beaucoup de flashbacks qui nous renvoient à d’autres heures marquantes. Cela donne une dimension supplémentaire à cette histoire, qui, sinon, serait beaucoup plus anodine et ne justifierait sûrement pas un film.

En effet, l’histoire d’Aloïs et des personnages qui l’entourent a un peu de mal à réellement passionner. Elle constitue plus un fil rouge que le cœur du film. Cependant, elle n’en est pas pour autant simpliste. Les évènements entre présent et passé ne prennent tout leur sens qu’à la toute fin. Mais ce type de construction, utilisant largement les flashbacks reste quand même extrêmement classique et Aloïs Nobel ne va pas révolutionner le 7ème art sur ce plan là.

Du coup, j’avoue j’ai parfois flirter avec l’ennui. Mais je dis bien flirter, car la curiosité face à ce film quelque peu inattendu maintient tout de même l’intérêt du spectateur. Le film dure un peu moins de 1h30. S’il avait été plus long, pas sûr que l’on aurait pas fini par sortir de cette histoire intéressante mais un rien austère. Cela ne signifie pas qu’il ne se passe rien, il y a des péripéties, l’intrigue avance, mais on ne peut pas dire que Tomas Lunak ait vraiment cherché à produire un divertissement.

aloisnobelLe style graphique rappelle aussi celui de Valse avec Bachir, si on excepte le recours au noir et blanc. L’animation est cependant plus fluide dans Alois Nobel, mais le film est graphiquement moins imaginatif. Le style colle assez bien avec le scénario. Un rien austère, mais non dénué de profondeur. Il s’agit d’un vrai choix artistique. Tomas Lunak a incontestablement cherché à soigner la forme tout autant que le fond. Il n’a simplement pas chercher à être léger et encore moins sexy.

Comme Aloïs Nobel n’est pas non plus le film le plus bavard de l’année, je n’ai pas grand chose à dire sur le casting voix. Et je doute de toute façon que ce film fasse appel à des « people » tchèques.

Aloïs Nobel est donc incontestablement un film différent, dans le bon sens du terme. Son austérité peut rebuter, mais il nous permet de nous replonger au cœur d’évènements qui nous semblent désormais lointain, mais qui ont profondément changé le monde. Un film qui fait le lien entre petite et grande histoire.

Fiche technique :
Production : Negativ, Ceska Televize, Pallas Film
Distribution : ARP Selection
Réalisation : Tomas Lunak
Scénario : Jaroslav Rudis, Jaromir Svejdik
Montage : Petr Riha
Photo : Baset Jan Strtezsky
Décors : Henrich Boraros
Musique : Petr Kruzik
Costumes : Katarina Hollà
Durée : 84 mn

Casting :
Miroslac Krobot : Alois Nebel
Marie Ludvickova : Kveta
Leos Noha : Wachek
Karel Roden : le muet
Alois Svehlik : Wachek vieux

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