LA VIE D’ARTISTE (Marc Villard) : Courte vie

laviedartisteOù se situe la frontière entre le roman et la nouvelle ? Ah en voilà un débat de fond qui pourra animer les longues soirées d’hiver dans les chaumières. Vous avez quatre heures ! Plus sérieusement, la discussion n’aurait guère d’importance si les livres étaient gratuits. Bien sûr la littérature ne se juge pas au poids, mais le lecteur en veut quand même un minimum pour son argent. Enfin, je ne sais pas pourquoi je parle de tout ça en fait pour introduire ma critique de la Vie d’Artiste, roman noir de Marc Villard, puisqu’il s’agit d’un livre que j’ai sauvé d’une mort atroce et que je n’ai de toute façon pas payé.

Siren, jazzman de son état, vient de passer un petit mois en prison pour possession de stupéfiants, alors il a envie de la jouer profil bas et de se faire discret. Mais comment faire quand votre copine vient de mourir d’une overdose, avec une bonne quantité de drogue à côté d’elle ? D’abord se débarrasser des objets du délit (le corps et la came) puis aller dans le Nord se planquer chez un de ses potes qui va l’initier aux combats de coqs.

Vous l’aurez compris à la lecture de passionnante introduction, la Vie d’Artiste est un roman extrêmement court. Ou une longue nouvelle si vous préférez. 150 pages chez Rivage Noir, avec une police plutôt généreuse et des marges trop larges pour êtres honnêtes et qui donnent vraiment l’impression qu’on cherche à épaissir le volume de manière artificielle. Bon, personne n’en voudrait à l’éditeur si le texte était hyper original ou terriblement passionnant. Mais là, le résultat est sympa sans plus.

Allez, n’en voulons pas à Marc Villard qui a bien droit d’écrire des textes de la longue qu’il souhaite. Il nous propose donc un roman (appelons-le tout de même comme cela) raconté à la première personne. L’intérêt repose donc autant sur l’intrigue proprement dite que sur les réflexions qu’en tire le narrateur. Les deux aspects sont d’ailleurs traités avec la même réussite et s’équilibrent plutôt bien. La vision désabusée de Siren apporte un recul plein de second degré sur les évènements relativement savoureux.

Cependant, l’intrigue de La Vie d’Artiste est quand même un peu trop légère pour vraiment passionner. C’est trop court ou trop long en fait. Trop court pour que la psychologie des personnages soit vraiment creusée, ainsi que les relations qu’il entretiennent entre eux. Trop court également pour que l’histoire prenne vraiment de l’épaisseur, ni même un minimum de complexité. Trop long par contre pour que le récit aille directement à son but premier comme c’est le plus souvent le cas dans les meilleures nouvelles. Bref, Marc Villard reste un peu le cul entre deux chaises.

C’est dommage parce que sa plume est sympathique. Il arrive quand même à nous faire éprouver un minimum de sympathie envers son personnage principal. La Vie d’Artiste est en fait un long portrait de ce dernier et il faut reconnaître qu’il est plutôt subtil et assez bien emmené. Mais du coup, on reste un peu sur notre faim car on aurait aimé que tout cela soit plus développé. Les réflexions de Siren démontre un vrai sens de la formule de la part de Marc Villard, mais il semble avoir été incapable de dépasser la simple ébauche d’une histoire et d’un personnage. Bref, c’est un peu comme un bel emballage autour d’un cadeau finalement un peu décevant.

Si un jour la Vie d’Artiste tombe entre vos mains, vue sa brièveté, vous ne risquerez pas grand chose à sa lecture. Vous ne passerez pas forcément un mauvais moment, mais il y a peu de chance qu’il vous marque réellement.

 

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