L’ETERNEL COMBAT

jeromecahuzac2Depuis quelques jours, l’affaire Cahuzac provoque l’émoi dans la classe politique du sommet de l’Etat jusqu’au militant de base, je peux en témoigner. Il est vrai que les faits sont graves, je l’ai déjà largement souligné. Cependant, je trouve cette émotion quelque peu disproportionnée, non parce qu’elle n’est pas légitime, mais qu’elle semble soudaine quand les faits en question ne constituent pas en eux-même une grosse surprise. Bien sûr, on ne savait pas que précisément Jérôme Cahuzac avait un compte en Suisse, mais qu’un homme avec son parcours et sa position en ait un ne constitue pas non plus l’évènement le plus inattendu du siècle.

Je ne veux sûrement pas alimenter le refrain du « tous pourris ». Bien au contraire, je m’élève assez souvent ici contre lui. Simplement, ce n’est pas parce qu’un mal est caché qu’il n’existe pas. C’est en cherchant que l’on trouve et la chute de Jérôme Cahuzac démontre au moins que les journalistes et la justice peuvent travailler librement dans notre pays et que personne n’est à l’abri de se faire rattraper par la patrouille. Cela constitue une bonne nouvelle, même si cela serait plus confortable si jamais de telles affaires ne remontent à la surface.

Car de telles affaires existent depuis que l’humanité a inventé la politique et le pouvoir, soit depuis à peu près toujours. Alors les termes comme « crise de régime » tiennent du verbiage et de la tentative de récupération politique et les discours type « plus jamais ça », « il faut en finir pour de bon» paraissent un peu vains et semblent parfois être juste là pour se donner bonne conscience. C’est un combat qu’il faudra toujours mener, encore et encore, sans faiblir car le mal ne pourra jamais être éradiqué, à moins de changer profondément la nature humaine. Et ça, c’est hors de portée de toute décision politique.

Le pouvoir, l’argent, l’influence que l’on exerce amènent la tentation. Et là où il y a tentation, il y aura toujours des gens pour y succomber. On peut rêver que la politique ne soit menée que par des chevaliers blancs au cœur pur, mais c’est évidemment un rêve dont je doute même qu’il soit souhaitable qu’il se réalise. On reproche souvent aux hommes politique d’être en décalage avec la société, il serait injuste de leur reprocher dans le même temps de ne pas échapper à ses maux les plus communs. Dans un billet, j’avais un jour écrit que je ne jugeais pas le jeune des banlieues qui dealaient parce que je n’ai jamais été dans une position m’amenant à choisir entre l’honnêteté et la délinquance. Pour la fraude fiscale, je pourrais faire le raisonnement parallèle. N’ayant aucun argent à placer en Suisse, il est facile pour moi de porter un jugement moral sur ceux qui pratique une telle évasion.

J’ai pourtant bien porté un jugement moral sur Jérôme Cahuzac. Un jugement sévère que je maintiens naturellement. C’est avant tout parce qu’à la faute ancienne, il a ajouté un long mensonge et un absence total d’honneur. Or, je ne crois pas que l’on puisse légiférer sur le manque d’honneur. Le cas de l’ancien ministre du budget doit bien sûr pousser à l’action. Mais il faudra agir aujourd’hui, demain et encore après-demain dans une lutte incessante, alors inutile de le faire dans la précipitation et l’émotion. Et surtout, il ne faudra pas avoir peur de ce qu’on pourra alors trouver…

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