A CHACUN SES MOTS

familleUn jour, en Conseil Municipal, j’avais été assez surpris par une réflexion de mon Maire qui avait fait une remarque ironique avant d’employer lui-même l’expression de justice sociale. Cela m’avait fait réaliser à quel point certains éléments de langages, certaines notions, concepts ou même thématiques sont tellement associés à un camps politique qu’il devient quasiment un gros mot pour celui d’en face. Pourtant, une pensée politique qui ne jure que par le mérite devrait défendre bec et ongles la justice sociale, même si elle consiste à sucrer des allocs à des chômeurs impénitents.

Cela marche aussi évidemment dans l’autre sens. Essayer de changer une Marseillaise dans une manifestation de gauche, on vous regardera tout de suite d’un œil suspect, alors qu’aux dernières nouvelles, il s’agit de l’hymne du pays tout entier. J’avais d’ailleurs beaucoup apprécié en 2002 l’initiative au Trocadéro, à l’entre deux-tours, d’un rassemblement pour chanter la Marseillaise et montrer qu’elle n’était en rien la propriété du Front National.

Le thème de la famille fait partie de ces mots qui semblent incompatibles avec une politique de gauche. Un peu comme pour la sécurité, un gouvernement socialiste est forcément soupçonné d’être anti-famille et de vouloir sournoisement casser des dispositifs qui fonctionnent. Que cela soit totalement absurde et que certains pans de notre politique familiale soient carrément injustes socialement (désolé, c’est mon ADN de gauche qui revient au galop) semblent hors sujet et la droite n’a même pas besoin de faire de propositions pour apparaître comme les premiers défendeurs de la famille.

Ce genre d’appropriation est le signe d’une défaite idéologique du camp d’en face, qui abandonne le champ de bataille à son adversaire. Devoir vaincre un soupçon avant de convaincre demande le double d’énergie et il vaut mieux surfer sur une vague de popularité pour y arriver. Mais c’est avant tout une grave défaite pour le débat public. On ne peut pas dans notre pays mettre vraiment à plat les politiques familiales, sécuritaires ou migratoires. A l’inverse, les débats sur le partage des richesses crées (ne parlons même pas de redistribution), l’égalité hommes/femmes ou les alternatives à la prison n’auront jamais vraiment lieu. En effet, y participer quand on n’est pas du bon camps paraîtra toujours suspect aux camarades de son propre bord. Du coup, les échanges se résument à des argumentations contrées par des cris d’orfraies et des postures purement idéologiques.

La famille n’est ni de gauche, ni de droite. A la vue des derniers évènements, il est par contre évident que tout le monde n’en a pas la même définition.

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