TOUT CA POUR CA : 10 ANS DE MILITANTISME AU PS : EPISODE 1 : Je suis un Bisounours

episode1Lundi 7 mai 2007. La veille au soir, Nicolas Sarkozy est élu Président de la République, ce que je vis comme une sorte de catastrophe. Du coup, je prends ma carte au Parti Socialiste, concrétisant une intention déjà ancienne. En quelques clics, j’adhère et je me prépare au combat. Je suis motivé, remonté, enclin à en découdre avec la droite. Et là… et là… il ne se passe rien…

Une semaine, deux semaines passent et je n’ai des nouvelles de personne. Je m’impatiente, alors que la campagne des législatives débute. Du coup, j’écris directement à la candidate socialiste de ma circonscription pour lui signifier que je suis prêt à aider. Sur le moment, j’ai un peu l’impression d’écrire au Pape. Une candidate aux législatives est forcément quelqu’un d’important. Mais là surprise, elle me répond… et m’invite à venir à la réunion publique qui aura lieu quelques jours plus tard à Viroflay.

Entre temps, un samedi matin en traversant le marché, je croise mon premier « camarade ». Il s’appelle François Lemaire. 80 ans. Une tête de plus que moi, mais un sourire et une énergie incroyablement communicatifs. Tout en tractant, il fait la bise à la moitié des femmes qui passent sur le marché. Plus tard, il me racontera devant mes yeux fascinés son adhésion à 15 ans, entraîné par ses collègues ouvriers en 1936. Je ne l’aurais croisé que peu de temps car il quittera Viroflay peu de temps après mon adhésion. Il restera le premier visage que j’aurais croisé lors de ma vie politique, mais il restera à jamais une des figures les plus marquantes et les plus inoubliables.

Le soir de la réunion arrive. Avant qu’elle ne débute, je me signale aux responsables de la Section PS de la ville. Premier contact avec des personnes qui deviendront des amis et des compagnons de lutte pour les dix prochaines années. A la fin, je surmonte ma timidité pour aller parler à la candidate. Le contact est loin de ce que je pouvais fantasmer… Je parle juste à un être humain, qui me renvoie une certaine indifférence. A la fois, je n’ai aucune idée de ce que je pourrais vraiment lui proposer. Donc je range mon enthousiasme et mon énergie et réalise que je suis face à un univers dont je dois encore apprendre le fonctionnement.

Quelques jours plus tard je me rends à ma première réunion de Section. Je trouve ça formidable. Nous sommes nombreux, dans une salle trop petite. Les discussions sont vives sur la défaite de Ségolène Royal. Certaines choses m’étonnent, mais je mesurerai leur importance que bien plus tard (j’y reviendrai donc). Ce qui domine, c’est la curiosité, la sensation rare d’avoir mis les pieds dans un nouveau monde. Je regarde chacun des participants avec une certaine admiration. Ce sont des militants politiques, moi je suis un bleu. J’ose cependant donner mon avis. Tout le monde s’écoute, se respecte et il règne une ambiance amicale. Ce n’est que bien plus tard que je découvrirai que la Section de Viroflay n’est absolument pas représentative de ce que sont les Sections du Parti Socialiste.

A l’issu de cette réunion, je me suis proposé pour un tractage au marché le samedi suivant. Mon premier acte de militantisme. Je passe la semaine avec une petite appréhension. Saurais-je faire ? Vais-je y arriver ? Le moment fatidique arrive… et me rassure très vite. Tracter est avant tout se heurter à une grande indifférence. Les passants vous ignorent ou font preuve d’une politesse qui n’est absolument pas significatif d’un intérêt éventuel qu’il vous porterait. Bref, une heure et demi qui abat de nouveaux fantasmes. Tracter est avant tout l’occasion de passer un moment entre militants, de maintenir l’enthousiasme collectif. L’impact sur la population reste par contre à discuter. Mais j’y reviendrai aussi.

Le résultat sera plutôt satisfaisant. Notre candidate est au deuxième tour et obtient un score autour de 40%, ce qui est plutôt bon dans cette terre très à droite. Mon enthousiasme sera entretenu à la rentrée par la campagne des municipales qui commence et qui sera l’objet du deuxième épisode. Bref, mes débuts de militants me permettent de garder toute ma motivation.

Un an plus tard, je me rends à l’Université de rentrée organisée par la Fédération PS des Yvelines. Une journée de conférences et de débats, particulièrement intéressants, entre camarades. Elle me permet notamment d’interpeller une ancienne ministre qui parle de l’espace agricole comme de l’espace disponible ! L’ingénieur agronome que je suis ne pouvait évidemment que réagir. Je prends des notes, j’apprends plein de choses, je trouve ça particulièrement stimulant intellectuellement. Tout semble à première vue bon enfant. Je ne connais pas encore trop mes camarades yvelinois, alors je ne vois que des camarades sans autre distinguo.

A un moment de la journée, je m’incruste dans une conversation. Je ne connais personne, personne me connaît. Au milieu, une femme parle de la Fédération. Cette Fédération qui pour moi a organisé parfaitement cette journée que je trouve formidable. Son propos est étonnamment agressif, presque haineux. Elle parle des dysfonctionnements de la Fédération, comme s’ils étaient évidents, comme si tout le monde partageait forcément son point de vue. J’écoute, je ne dis rien et je découvre de manière assez brutale un aspect moins enthousiasmant de la vie militante.

Quelques mois plus tard aura lieu le Congrès de Reims. Le Bisounours est sur le point de mourir.

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