120 BATTEMENTS PAR MINUTE : Le film de l’année, le combat d’une vie

120battementsparminuteafficheEvidemment, tant que nous ne sommes le dernier mercredi de l’année, difficile de déterminer avec certitude quel sera LE film de l’année. Mais parfois, un long métrage atteint des sommets assez élevés pour imaginer difficilement qu’il soit rejoint. 120 Battements par Minute est sans conteste le meilleur film sorti en 2017… jusqu’à présent. Cependant, il est peu probable qu’aucun autre film ne laisse une meilleure impression d’ici au Réveillon (y compris The Circle, qui a reçu la Palme d’Or à sa place). Car rarement le 7ème art nous aura offert un tel déluge d’émotions.

120 Battements par Minute est un grand film, un film immense, un film magistral. Il l’est en premier lieu par l’histoire qu’elle raconte. Que l’on ait apprécié Act’Up ou pas, ne change rien. Car ce film nous raconte infiniment plus que le simple combat d’une association. Il nous raconte un moment de l’histoire humaine. L’épidémie du SIDA n’est pas une épidémie comme une autre. Elle a façonné toute une époque, toute une génération, changeant la face du monde et son rapport à l’acte le plus universel qui soit : celui de faire l’amour. L’amour qui devient la mort, le SIDA aura mêlé de manière dramatique ce qui semblait pourtant si contradictoire.

Voilà qui résume bien 120 Battements par Minute : la contradiction violente entre l’amour et la mort, l’espoir et le désespoir, la joie et la peine, la force et la faiblesse. Tout cela mêlé, entremêlé, entrelacé… Ce film vous attrape dès les premières minutes et vous secoue très fort, dans un sens puis dans un autre, avec une puissance hors du commun et ne vous lâchera jamais jusqu’à la fin. Ce n’est jamais extrême, le trait n’est jamais forcé, mais tout est empli d’une force incroyable. De celle qui a habité ces hommes et ces femmes dans ce combat pour la vie, pour leur vie, pour qu’elle se prolonge encore un peu dans une immensité d’indifférence.

120battementsparminuteMais 120 Battements par Minute ne constituerait pas un tel choc si la forme n’y contribuait. Ce film n’a rien de techniquement spectaculaire. Cependant, il nous rompt la distance qu’il peut exister entre le spectateur et les personnages. S’il n’est pas exempt de quelques longueurs, il offre aussi une diversité de scènes et à chaque fois la manière de filmer est adapté pour en démultiplier l’effet. Il propose même des scènes artistiquement audacieuses et parfaitement maîtrisées, notamment une scène d’amour d’une intensité incroyable sans être une seule seconde vulgaire ou voyeuriste. Robin Campillo fait preuve d’un talent de cinéaste que l’on ne soupçonnait même pas, ses premiers films étant (injustement semble-t-il) passés inaperçus.

Robin Campillo a aussi le grand mérite d’avoir dirigé son casting avec une maestria phénoménale. Evidemment, sans talent cela n’aurait pas été possible, mais voir autant d’acteurs à la notoriété limitée livrer une performance aussi fantastique tient forcément d’une direction qui a su tirer le meilleur de chacun d’eux. Ici, les comédiens ne jouent pas leur rôle, ils ne l’interprètent pas, ils le vivent. Cela contribue à l’effacement de la distance avec le spectateur que j’évoquais plus haut, car ce dernier a réellement l’impression d’assister aux événements, non à une reconstitution.

120 Battements par Minute n’est pas un film communautaire ou générationnel. Il est trop intense et magnifique pour être ainsi enfermé. Cependant, il fera revivre à beaucoup une époque et pour certains des blessures. Mais c’est aussi un film pour ne pas oublier, pour une nouvelle génération sûrement plus inconsciente envers un fléau dont on ne meurt plus en France, mais qui reste un drame planétaire qui continue de tuer loin de nos sociétés occidentales. Si le combat s’est peut-être déplacé, il est encore loin d’être fini. Je ne sais évidemment pas en d’autres époques et d’autres lieux naîtront des films aussi aboutis sur ces nouvelles formes de combat. En attendant, ce film reste tout simplement incontournable et indispensable.

LA NOTE : 16,5

Fiche technique :
Production : Les films de Pierre, Page 114, France 3 Cinéma, FD productions, Memento films
Réalisation : Robin Campillo
Scénario : Robin Campillo, Philippe Mangeot
Montage : Robin Campillo
Photo : Jeanne Lapoirie
Décors : Emmanuelle Duplay
Distribution : Memento Films distribution
Musique : Arnaud Rebotini
Durée : 140 min

Casting :
Nahuel Pérez Biscayart : Sean
Arnaud Valois : Nathan
Adèle Haenel : Sophie
Antoine Reinartz : Thibault
Félix Maritaud : Max
Méhdi Touré : Germain
Catherine Vinatier : Hélène
Simon Bourgade : Luc

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