Ce qui rend le héros d’une histoire vraiment mythique, c’est souvent avant tout la qualité du méchant auquel il fait face. On apprécie Luke Skywalker, mais c’est avant tout Darth Vador que l’on aime. Pour Batman, c’est quand le Joker apparaît que l’œuvre prend toute sa dimension, en particulier au cinéma. L’annonce d’un film lui étant entièrement consacré a donc fait naître beaucoup d’attentes, surtout quand on a appris qu’il serait interprété par Joaquin Phoenix. Par contre, le nom de Todd Philipps à la réalisation pouvait faire naître quelques doutes, du fait d’un passé cinématographique essentiellement tourné vers la comédie. Mais il signe finalement une œuvre magistrale, portée par une vraie synergie entre le cinéaste et son interprète.
Joker n’a vraiment rien d’un film de super-héros. On retrouve pourtant bien des éléments de l’univers de Batman avec la vision d’un Gotham City décadent, où la violence semble prête à exploser à tout moment . Quelques clins d’œil aux origines de l’homme chauve-souris aussi. Mais ça s’arrête là. Je ne sais pas quel serait le regard d’un spectateur ne connaissant rien du personnage et du monde dans lequel il évolue, mais il y a des chances qu’il prenne lui aussi beaucoup de plaisir à suivre cette histoire. L’histoire d’un homme qui sombre dans une folie violente en même tant que toute une société. Ce parallèle entre les destins individuels et collectifs forme la colonne vertébrale du film et toute la force du message. Oubliez les parallèles hasardeux avec la situation actuelle en France formulés par certains. Cette histoire est profondément intemporelle et universelle.
Un narrateur talentueux le reste généralement quel que soit le type d’histoire qu’il raconte. Tous ceux qui ont aimé Very Bad Trip ne doutait pas de la qualité de narrateur de Todd Philipps. Par contre, on ne devinait pas qu’il puisse livre une œuvre avec telle puissance esthétique. Joker est porté par une photographie sublime. Si je devais apporter un seul bémol, cela serait un recours un peu trop fréquent au ralenti. Et que dire de la performance hallucinante de Joaquin Phoenix, qui tient là un rôle des plus marquants de sa carrière qui pourrait lui valoir une jolie statuette dorée en début d’année prochaine. Mais on peut facilement imaginer que c’est le film dans son entier qui se verra récompensé. Ce ne serait que justice pour cette fresque fantastiquo-sociale absolument prodigieuse.
LA NOTE : 16/20
Fiche technique :
Production : Bron Creative, DC Comics, DC Entertainment, Joint Effort, Village Roadshow Pictures, warner Bros
Distribution : Warner Bros
Réalisation : Todd Philipps
Scénario : Todd Phillips, Scott Silver, personnages de DC Comics
Montage : Jeff Groth
Photo : Lawrence Sher
Décors : Mark Friedberg
Musique : Hildur Gudnadottir
Durée : 122 min
Casting :
Joaquin Phoenix : Arthur Fleck
Robert De Niro : Murray Franklin
Zazie Beetz : Sophie Dumond
Frances Conroy : Penny Fleck
Breet Cullen : Thomas Wayne
Shea Whigham : Det. Burk
Bill Vamp : Det. Garrity
Glenn Fleshler : Randall