Une histoire peut ressembler soit à un long fil que l’on déroule et qui vous mène au dénouement dans un même mouvement. Certaines ressemblent au contraire à un puzzle où chaque pièce se met en place une à une, sans que l’on puisse voir au début comment tout cela va bien pouvoir former une image cohérente. Seules les Bêtes est l’archétype de ce dernier genre de construction. Une histoire racontée du point de vue de chaque protagoniste, qui dévoilera chacun une part de vérité. Un puzzle réussi est un puzzle où toutes les pièces s’emboîtent à la perfection. Celui proposé ici a été découpé avec la plus grande précision.
Ce genre de film peut facilement tomber dans deux pièges. Soit il propose des surprises qui n’en sont pas, soit il propose des éléments surprenants car totalement incohérents et irréalistes. Seules les Bêtes échappe avec brio à ces deux écueils. La qualité de la narration est ici assez remarquable pour intriguer immédiatement le spectateur qui se demande bien quel peut être le rapport entre tous les faits qui lui sont présentés. Elle se poursuit sur la même lancée pour livrer une explication finale qui s’avère à la fois convaincante et inattendue. On est là dans le pur plaisir que peut nous faire ressentir un bon polar. C’est futile, mais c’est bon.
Seules les Bêtes offre enfin un premier rôle, et un beau, à Laure Calamy. Cette actrice, pour qui j’ai une affection particulière, prouve qu’elle a largement les épaules pour ça. A ses côtés, Denis Menochet livre une présentation à hauteur de son talent. La vraie révélation reste néanmoins la jeune Nadia Tereszkiewicz qui marque vraiment le film de sa présence. Globalement, que ce soit à l’écriture ou à la réalisation, Dominik Moll fait preuve d’une maîtrise totale. On regrette amèrement qu’il se fasse si rare sur nos écrans, avec un film tous les 5 ans environ. Mais peut-être que c’est justement cette rareté qui lui permet de nous offrir des œuvres toujours aussi abouties.
LA NOTE : 13,5/20
Fiche technique :
Réalisation : Dominik Moll
Scénario : Dominik Moll et Gilles Marchand, d’après l’œuvre de Colin Niel.
Décors : Emmanuelle Duplay
Costumes : Virginie Montel et Isabelle Pannetier
Photographie : Patrick Ghiringhelli
Montage : Laurent Roüan
Musique : Benedikt Schiefer
Producteur : Simon Arnal-Szlovak, Carline Benjo, Barbara Letellier et Carole Scotta
Durée : 117 minutes
Casting :
Denis Ménochet : Michel Farange
Laure Calamy : Alice Farange
Valeria Bruni Tedeschi : Evelyne Ducat
Damien Bonnard : Joseph Bonnefille
Bastien Bouillon : Cédric Vigier
Guy Roger N’drin : Armand
Nadia Tereszkiewicz : Marion
Marie Victorie Amie : Brigitte
Fred Ulysse : le père d’Alice
Colin Niel : le vendeur de la coopérative