Le manichéisme est un mal particulièrement répandu au cinéma, mais dans toute forme de narration en fait. Quand il s’agit d’une pure fiction, ce n’est pas très grave, voire souhaitable. Combien d’histoires prennent tout leur intérêt grâce à un méchant mémorable, car vraiment, mais alors vraiment, méchant ? Quand on touche à la réalité par contre, la situation est différente. Dans le monde réel, rien n’est simple, gris ou noir. Ce sont donc souvent les histoires vraies qui laissent le plus de place à la diversité des points de vue qui sont les plus marquantes. Au cours de son histoire, le septième art hollywoodien a souvent fait des Occidentaux les gentils, défenseurs de la liberté, et des « communistes » la figure du mal incarné, prêts au pires exactions pour arriver à leurs fins. On touchait évidemment à la caricature. Cuban Network nous plonge dans la guerre froide entre les Etats-Unis et Cuba avec un angle inattendu et qui donne surtout tout son intérêt au propos.
Dans les années 80 et 90, des mouvements anti-castristes basés à Miami ont organisé plusieurs attentats sur le sol cubain, faisant quelques victimes au passage. Cuban Network raconte l’histoire des espions envoyés par le pouvoir de la Havane pour infiltrer ces mouvements et empêcher de nouveaux attentats et de nouvelles victimes. Des espions agissant dans l’illégalité sur le sol américain pour empêcher des mouvements agissant dans l’illégalité sur le sol américain et cubain. Bref, une histoire sans gentil et sans méchant, juste le portrait d’hommes et de femmes et un panorama plutôt brillant de la complexité de la situation. Le spectateur manque un peu de repère au début, ne sachant qui aimer ou détester. Mais il finira par apprécier de découvrir cette facette peu connue des rapports entre Cuba et les Etats-Unis.
Olivier Assayas signe donc là un film assez hollywoodien dans la forme, mais dont le propos l’est nettement moins. Il dote Cuban Network d’une réalisation à la fois brillante et efficace. Pas de prise de risque artistique, mais toujours autant de talent. Il brille aussi dans la direction d’un casting riche qui mêle acteurs méconnus et deux grandes stars. Difficile de les distinguer, tant tout ce petit monde donne vie à son personnage avec conviction et application. Le film connaît quelques baisses de rythme, mais l’intérêt du spectateur ne connaît pas de son côté de baisse de régime, car on se demande vraiment où tout cela va nous mener. Un film pour les curieux plus que pour les amateurs de films remplis d’action. Mais les curieux en auront pour leur argent.
LA NOTE : 13/20
Fiche technique :
Production : CG Cinéma, RT Features, Nostromo Pictures, Scope Pictures, France 2 Cinéma, Orange Studio, Memento films
Distribution : Memento films
Réalisation : Olivier Assayas
Scénario : Olivier Assayas, livre de Fernando Morais
Montage : Simon Jacquet
Photo : Yorick Le Saux
Décors : François-Renaud Labarthe
Musique : Eduardo Cruz
Durée : 127 min
Casting :
Penelope Cruz : Olga Salanueva
Edgar Ramirez : René Gonzalez
Gael Garcia Bernal : Manuel Viramontez
Wagner Moura : Juan Pablo Roque
Ana de Armas : Ana Margarita Martinez
Leonoardo Sbaraglia : Jose Basulto