TOUT CA, POUR CA : 10 ANS DE MILITANTISME AU PARTI SOCIALISTE : EPISODE 25 : Campagne adminstrative

episode25Dernier aspect d’une campagne électorale, l’aspect administratif. Cela peut presque paraître négligeable quand on se lance, mais on s’aperçoit vite que c’est une part importante du travail à accomplir. Cependant, je pouvais me lancer dans cette aventure sans trop d’appréhension à ce niveau-là. L’avantage de faire parti d’un « vieux » parti politique est de pouvoir être épaulé par des militants chevronnés qui se sont déjà pliés à l’exercice à plusieurs reprises. Et j’avoue que pour cette campagne des municipales, j’ai été parfaitement accompagné.

Premier nerf de la guerre et premier problème à résoudre… l’argent. Certes, la puissance publique finit par rembourser les frais de campagne (cf. la fin de ce billet), mais il faut bien avancer l’argent. Ici on parle d’environ (de mémoire) 15 000 euros. La loi nous autorisait à dépenser le double, mais cette la deuxième moitié n’aurait pas été remboursée. Nous décidons très vite de nous contenter de ce budget et de ne pas faire appel aux dons. C’était en effet largement suffisant et je n’ai pas le souvenir de m’être jamais senti contraint par le moindre manque de moyens financiers.

Je ne remercierai jamais assez mes colistiers qui ont avancé 1000 à 2000 euros pour financer cette campagne. Cela nous évitait de faire un emprunt, qui nous aurait forcé à supporter le coût des intérêts générés entre le jour de l’élection et le remboursement, qui ne sont pas considérés comme des frais de campagne. Cela me permit surtout de ne pas avancer un centime de ma poche, alors que ma situation financière ne m’autorisait de toute façon pas à mettre de l’argent dans cette campagne, ce qui est rarement le cas de la tête de liste. Cela ne paraît rien, mais ces aspects financiers constituent tout de même un léger frein à la démocratie et favorise les partis bien installés comme le PS.

Dans une campagne électorale, un candidat a besoin d’un allier précieux et légalement indispensable, un mandataire financier. Il sera chargé de comptabiliser toutes les dépenses réalisées dans le cadre de la campagne, y compris en théorie l’encre des stylos utilisés. Il est surtout le seul autorisé à payer les factures. J’avais la chance de pouvoir compter sur notre ancien secrétaire de Section qui s’est acquitté de la tâche assez remarquablement pour que je n’ai jamais à me préoccuper de ces aspects-là

Les élections municipales ont beau être une élection de liste, celui qui se trouve à sa tête supporte la quasi entière responsabilité de la campagne vis-à-vis de l’administration. Il est notamment chargé de déposer le dossier complet en préfecture. En une fois… ou deux. En effet, les contrôles sont réels et un seul papier de travers et vous êtes bon pour un deuxième passage, je peux en témoigner.

Les campagnes électorales sont soumises à un certains nombres de règles qui régissent les documents dits de la campagne officielle, à savoir l’affiche collé sur les panneaux disposés devant les bureaux de vote, les professions de foi envoyées par la Poste aux électeurs et évidemment les bulletins de vote. Tous ces documents sont soumis à la validation d’une commission quelques jours avant le vote. Etre recalé par la commission est évidemment équivalent à une catastrophe car mine de rien, la profession de foi reste de très loin le tract le plus lu. Et ne parlons même pas d’une absence éventuelle de bulletin de vote…

En amont de la commission, il est conseillé d’envoyé un exemplaire des documents à la préfecture pour d’éventuelles remarques. J’ai reçu cette réponse, formidable moment de logique administrative pure : Aux termes du premier alinéa de l’article R. 27 du code électoral :  » Les … circulaires ayant un but ou un caractère électoral qui comprennent une combinaison des trois couleurs : bleu, blanc et rouge à l’exception de la reproduction de l’emblème d’un parti ou groupement politique sont interdites ».
Il résulte de l’examen d’un exemplaire en couleurs de la profession de foi considérée que ce document semble utiliser les couleurs bleue, blanche et rouge pour certains vêtements de la photo.
S’il est vrai que le document emploie également d’autre couleur, le rapprochement des trois couleurs nationales pourrait être regardé comme prohibée par l’article R. 27 du code électoral par la commission de propagande ou le juge électoral.
La notion de combinaison des couleurs « bleu, blanc et rouge » étant subjective et soumise à l’appréciation souveraine du juge, nous ne pouvons que vous conseiller de faire retoucher les couleurs des vêtements de vos colistiers. Il s’agit là peut-être d’un excès de précaution, mais cela permet d’écarter tout motif de discussion lors de la commission de propagande.
En dehors de ce point, cette circulaire n’appelle aucune remarque de notre part, sous respect des grammages et dimensions réglementaires.
Grâce à mes talents limités mais suffisants en retouche d’images, je repeins le manteau d’une de mes colistière en une autre couleur pour ne prendre aucun risque.

Les bulletins de vote quant à eux répondent à une règle assez simple. Ils doivent être totalement unicolore. Et donc, tout candidat à une élection fait face à une question cruciale : quelle couleur pour le bulletin de vote ? Le plus souvent, on choisit une couleur associée à son parti politique. Ainsi beaucoup de bulletins PS sont rose. Mais on peut aussi essayer de tromper l’ennemi ou d’élargir le spectre politique auquel on peut prétendre. C’est pourquoi, puisque nous n’avions pas réussi à obtenir le logo EELV pour notre liste, nous avons d’abord pensé à la couleur verte pour notre bulletin. Mais le résultat n’était pas très satisfaisant. Nous avons donc finalement opté pour un bulletin… bleu… Bon bleu foncé, pas bleu UMP, mais quand même. Le créer ne fut d’ailleurs pas une mince affaire. Je pense que le jour où nous l’avons finalisé restera le jour où j’aurais échangé le plus de mail en une seule journée de toute ma vie (tout ça, sur mes heures de travail…).

La vie administrative de la campagne ne s’arrête pas avec l’élection. En effet, avant de vous rembourser vos frais de campagne, l’administration épluche vos comptes de très près. Si certains se disent que c’est « magouille et compagnie », je peux vous assurer que sur ce point, les politiques ont l’obligation d’être irréprochable. Même les petits comme moi. On me demanda par exemple d’envoyer un fichier contenant toutes les photos correspondant à la facture de mon ami photographe (au cas où j’aurais mené campagne sans photo et produit une fausse facture…). Bref, après près de 9 mois de délais, je reçois un beau jour enfin environ 15 000 euros sur mon compte en banque, ce qui me permet de rembourser au plus vite (parce que je suis honnête quand même) les camarades qui avaient avancé les fonds. 1000 ou 2000 euros qu’ils auront avancé pendant un an et demi pour certains. La démocratie a définitivement un coût !

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