TOUT CA, POUR CA : 10 ANS DE MILITANTISME AU PARTI SOCIALISTE : EPISODE 32 : Le Congrès de Poitiers, partie 2 : le PS épuisé

episode32Un jour de congés de posé et me voilà dans la voiture avec deux camarades yvelinois en route pour Poitiers. Si politiquement, ce Congrès n’aura pas légué un héritage intellectuel remarquable, il restera à jamais pour moi un très beau souvenir. Le point d’orgue d’une belle histoire d’amitié, forgée autour de combats communs. Si je ne regrette jamais tout le temps que m’aura pris mon militantisme politique, même dans les réunions le plus inutiles, c’est pour les rencontres qu’il m’aura permis de faire.

Pour la première fois donc, j’assistais à un Congrès du Parti Socialiste. J’avais largement suivi celui de Reims à la télévision, mais bien d’eau avait coulé sous les ponts, et la dramaturgie n’avait plus grand chose à voir. Nous arrivâmes sur place le vendredi après-midi. A l’extérieur, de nombreux stands qui font ressembler le Congrès plus à une foire qu’à un moment de réflexion politique. Mais c’est surtout un endroit de convivialité qui a finalement plus de valeur que les débats formels qui ont lieu sur la scène à l’intérieur. Surtout qu’en ce premier jour, il y avait encore très peu de monde et les personnes invitées à la tribune parlaient principalement devant des sièges vide.

L’ambiance fut différente le samedi où le public était nettement plus nombreux. De nombreuses têtes d’affiche se succédèrent à la tribune. Des invités extérieurs venaient aussi élargir l’horizon de nos débats. Je me rappelle notamment l’intervention d’une combattante kurde irakienne, venue nous parler de son combat contre l’Etat Islamique. Une intervention rendant bien pathétiques nos combats de motion pour lequel certains sont prêts à tous les déchirement les comportements le plus bas.

Une photo peut témoigner également de mon regard énamouré quand Najat Vallaud-Belkacem prend la parole. Mon admiration pour elle en ressortira encore grandi après avoir entendu son discours incisif et pertinent. Mon grand regret est ne pas avoir pu la croiser à un moment à l’autre dans les allées à l’extérieur. Elle y passa beaucoup de temps, ne faisant preuve d’aucune avarice pour discuter avec les simples militants et leur laisser prendre des selfies. Bref, j’aurais aimé m’adonner à quelque chose que je dénonce parfois dans le comportement des militants politique : la fan attitude ! Faites ce que je dis, pas ce que je fais !

Le grand moment de la journée resta cependant sans conteste le discours du Premier Ministre, Manuel Valls. A son arrivée, on sentit l’assemblée partagée, vu le caractère particulièrement clivant du personnage. Moi-même, je me trouvais dans un état d’esprit bizarre face à cette homme que je n’ai jamais aimé, certainement jamais admiré et auquel j’en voulais un peu d’occuper la position qu’il occupait alors. Mais il allait me retourner comme une crêpe. En effet, son discours restera le moment le plus fort émotionnellement de mes années de militantisme. Si Manuel Valls est un homme sans idées, la suite le prouvera, il reste un tribun extraordinaire. Il est l’incarnation du leader charismatique. Voilà un général capable de vous convaincre de donner votre vie à ses côtés dans la bataille. Cela ne suffit évidemment pas en faire un grand Premier Ministre, voire même il n’est pas évident que ces qualités soient vraiment utiles pour un tel poste. Mais malgré tous les reproches que je peux formuler à son encontre par ailleurs, je ne pourrais pas lui enlever ça.

Le point d’orgue de son discours restera le moment où il demande à l’assemblée d’accorder une longue ovation à François Hollande. Une large part de celle-ci applaudira avec force et enthousiasme. Cette période était particulièrement difficile pour tout militant socialiste et il était parvenu à nous rappeler avec une puissance rare pourquoi nous nous étions battus pour le voir élire et pourquoi il fallait continuer à défendre l’action d’un gouvernement auquel on ne pardonne rien. Certains resteront muet et ne daigneront pas se lever, dont les principaux responsables de la Fédération des Yvelines. Les frondeurs avaient alors bien largué depuis longtemps les amarres de la courtoisie républicaine. De la courtoisie tout court en fait. Ne parlons même pas de la camaraderie.

La journée se poursuivit par deux moments de convivialité. Tout d’abord, un apéritif entre membres de Répondre à Gauche, soit le mouvement des « hollandais », sous l’égide de Stéphane Le Foll. Le moment fut sympathique, me permit d’échanger quelques mots avec Michel Sapin. Il se termina surtout par un échange entre nous, militants des Yvelines, et Stéphane le Foll lui même. Nous lui parlâmes de la campagne fédérale à venir. Nous lui signifions que nous avons besoin de tout le soutien possible pour espérer battre la candidate hamoniste. Il nous répondit qu’il ne fallait pas trop rêver à la victoire, mais nous promit de nous inviter à déjeuner au Ministère de l’Agriculture si nous dépassions les 40%. Malheureusement, nous ferons un peu moins et nous passerons à côté d’un bon repas.

Ensuite, les militants yvelinois de toute tendance avaient rendez-vous pour un repas en commun. La tablée fut à l’image de la fédération, coupée en deux. Benoît Hamon était là et j’eus même « le privilège » d’être assis à côté de lui. Le hasard fit que ce même soir a lieu la finale de la Ligue des Champions. Cela me permit de découvrir que j’aurais au moins un point en commun avec lui, l’amour profond du football. Il insista auprès des restaurateurs pour que le match soit diffusé sur l’écran au dessus de notre table, mais ils avaient un problème avec leur box. Il demanda alors à la 1ère fédérale sa tablette. Celle-ci lui fit remarquer que nous étions à un repas convivial et que ce n’était pas très poli de préférer regarder un match de foot. Benoît Hamon lui répondit sèchement, comme un maître parle à sa domestique. Je me rappelle bien avoir été choqué. Cela ne sera pas la seule fois que je le vis comporter ainsi en petit chef misogyne et irrespectueux. Si je n’ai jamais aimé ses idées, ce que j’ai vu de l’homme ne m’a jamais donné envie de le lui pardonner.

Les deux côtés de la table se trouvaient plongés dans deux ambiances radicalement différentes. De mon côté, les militants riaient, buvaient, parlaient parfois un peu fort. De l’autre côté, les jeunes hamonistes, privés de leur chef parti au bout d’une demi-heure, mangeaient dans un silence d’une tristesse absolue. Certes, cela n’a que peu de rapport avec les convictions politiques, mais ces derniers traduisent souvent un certain état d’esprit. Et ce soir-là, j’étais vraiment heureux de me trouver dans le camp de la bonne humeur, ne voyant pas la politique que comme un sinistre combat du bien contre le mal.

Le Congrès se termina le dimanche matin par un triste discours de Jean-Christophe Cambadélis. L’homme est visiblement épuisé. Mais cela n’explique pas entièrement la médiocrité du discours sur la forme et le fond. Sans doute, le PS a-t-il alors un Premier Secrétaire à son image. Car il n’y a pas que lui qui semble épuisé…

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