TOUT CA, POUR CA : 10 ANS DE MILITANTISME AU PARTI SOCIALISTE : EPISODE 39 : Les primaires si moyennes

episode39François Hollande avait pleinement bénéficié de la dynamique insufflée par les primaires pour être élu Président de la République. Cinq ans plus tard, au moment de renouveler la démarche, l’ambiance et les perspectives n’ont plus rien à voir. Il ne s’agit plus de battre un Président sortant impopulaire. Il ne s’agit plus de primaires organisées par un parti politique qui a enchaîné les victoires aux élections locales pendant dix ans. Il s’agit d’une tentative un peu désespérée de recoller les morceaux au sein d’une gauche en lambeaux. Le résultat s’avérera totalement inverse, mais à l’heure de préparer l’organisation des primaires citoyennes, les militants PS gardent malgré tout un petit fond d’espoir.

La question de la participation éventuelle à des primaires du Président sortant s’étant réglée toute seule, il reste celle de leur périmètre exact. Pendant longtemps, le PS a espéré organiser des primaires « de Macron à Mélenchon ». Je ne sais pas si quelqu’un a un jour vraiment cru à cette éventualité. Mais afficher cette volonté ne coûtait pas grand chose. La participation de deux leaders politiques ayant bâti leur mouvement en siphonnant un côté et l’autre du PS aurait pu paraître incongrue. Pourtant, je reste persuadé que l’un ou l’autre aurait peut-être été finalement élu Président s’il l’avait fait…

Mais qu’est ce que je raconte ? Emmanuel Macron a été élu Président de la République ! Certes… l’histoire oublie cependant souvent que sans le bénéfice qu’il a tiré de l’affaire Fillon, il n’aurait certainement pas remporté l’élection, faute d’une base fidèle et militante suffisante. Je maintiens donc mon propos… Sur lequel je reviendrai dans le prochain et ultime épisode de ce récit. En attendant, les primaires ont lieu sans lui et sans le leader de la France Insoumise. Parmi les candidats sur la ligne de départ, trois favoris : Manuel Valls, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon.

Personnellement, je suis plongé dans un profond désarroi. Aucun des trois ne me donne envie de le suivre pour différentes raisons, avant même d’entendre ce qu’ils ont à proposer. Mon déménagement m’ayant conduit à me retrouver en retrait de toute activité militante, je vis tout ça uniquement à travers les médias. Je n’assiste donc pas aux débats en Section et aux déchirements qu’ils engendrent. J’ai eu mon lot pendant cinq ans. Je ne me suis jamais engagé en politique pour assister à des pugilats un peu vains entre camarades, encore moins en tant que pur spectateur.

C’est donc avec un esprit totalement ouvert que j’assiste aux débats entre les candidats pour savoir qui aura ma voix au premier tour. J’avoue que j’espère alors me laisser convaincre par Sylvia Pinel. Non pas parce qu’elle était la seule femme sur la ligne de départ, mais parce que depuis le début je cache un terrible secret. En effet, il est temps de vous faire une révélation… En vrai, au fond, je ne suis pas socialiste. Si je regarde l’histoire des idées et des positions défendues, je suis clairement un raidical de gauche. Mais voilà, un parti dirigé par les héritiers d’un système quasi mafieux, très peu pour moi ! Malheureusement, ce soir-là, elle livre une prestation bien décevante. Non que les idées qu’elle défend me déplaise, mais sa diction hésitante et son manque absolu de charisme ne me permettent pas de voir en elle un candidat potentiel à une élection présidentielle.

Mon choix se porte donc sur un autre outsider, François De Rugy. Si je n’ai jamais eu beaucoup d’amour pour les écologistes politiques, il est pour moi tout simplement celui qui présente le meilleur programme. Il convaincra peu de monde, aussi parce que quasiment personne n’écoute jamais vraiment ce que les candidats ont à dire, à part quelques slogans. Je ne regrette pas mon choix, même si la suite de l’histoire fera que je n’ai plus grand chose en commun avec lui aujourd’hui. Mais cette histoire n’est alors pas encore écrite.

Si je n’ai pas participé aux débats en Section, j’ai tout de même fait savoir à mon Secrétaire que je suis disponible pour tenir un bureau de vote. Cette journée passée à faire voter le peuple de gauche reste tout de même un bon souvenir. Déjà parce que la participation est meilleure que ce que l’on pouvait craindre. Certes, rien à voir avec celles organisées cinq ans plus tôt, mais on n’a vraiment pas le temps de s’ennuyer.

L’identité des deux finalistes ne constitue pas vraiment une surprise, même si les troupes d’Arnaud Montebourg sont très amèrement déçues. Par contre, l’avance nette de Benoît Hamon n’était pas vraiment attendue. Manuel Valls sait qu’il n’a pas forcément un grand réservoir de voix et que peu d’électeurs d’Arnaud Montebourg voteront pour lui. Etre devancé de cinq points ressemble déjà à une défaite. Il reste cependant un débat en face à face entre les deux finalistes pour renverser la tendance.

Cependant, le débat ressemblera à un enterrement pour Manuel Valls. Benoît Hamon se présente avec une idée qu’il martèle, le revenu universel. Qu’on soit d’accord ou pas, convaincu ou non, force est de constater que c’est simple et percutant. Une vraie idée pour rendre une campagne accessible et compréhensible par tous. En face, c’est le néant. L’ancien Premier Ministre ne peut masquer qu’il n’a jamais été un homme qui produit des idées ou des axes programmatiques. On peut lui reconnaître des qualités, mais pas celle-là. Or, cela constitue un handicap rédhibitoire quand on aspire à une telle fonction. Benoît Hamon sort du débat en grand vainqueur.

Cela se confirme dans les urnes le dimanche suivant. Benoît Hamon est désigné candidat du Parti Socialiste pour l’élection présidentielle. Pas avec ma voix, vous vous en doutez pas. Mais son adversaire du soir n’en a pas bénéficié non plus. Impossible pour moi de choisir entre ces deux hommes dont trop de choses me séparent politiquement. Cette journée aura été une des plus difficiles de mon parcours militant. Car dès le soir même, je sais déjà, au fond de moi, que, moi, qui ai toujours été un bon petit soldat du parti s’apprête à le trahir dans les urnes dans quelques semaines.

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