Les films à forte dimension sociale sont toujours confrontés à un ennemi redoutable, qui peut facilement rendre leur propos beaucoup moins intéressant, voire insupportable : le misérabilisme. On peut dénoncer des situations, souligner des causes, mais le danger est de faire des personnages de simples victimes passives. Or la réalité n’est jamais aussi manichéenne et si un tel travers passe pour un film d’actions, ce n’est évidemment pas le cas pour ceux dont l’objectif est de nous faire réfléchir sur le monde tel qu’il est ou sur la nature humaine. Nomadland échappe totalement à ce travers et nous offre le plus beau film de cette reprise cinématographique.
Couronné aux Oscars il y a quelques mois, Nomadland nous démontre que le cinéma n’est pas mort avec la pandémie, même s’il n’en sortira forcément pas tout à fait indemne. Certes, la concurrence s’en trouvait affaiblie, mais sa présence au palmarès le plus prestigieux du 7ème art ne dépareille en rien. Il s’agit d’un film portrait. Portrait d’une femme, d’un personnage, mais à travers elle d’un pan entier de la société américaine. Un propos qui montre comment le destin entremêle les circonstances, parfois dramatiques, que l’on subit et les choix que l’on fait, parfois à contre-courant de ce que les autres jugent comme pertinents. On ne sait pas bien si l’on ressort de ce film optimiste ou pessimiste. Mais on en ressort plus riche !
Nomadland doit beaucoup à performance magnifique de Frances McDormand. Rarement une récompense individuelle n’aura souffert aussi peu de contestation. Il y a pourtant une grande pudeur, pour ne pas dire une certaine retenue dans son interprétation. Mais il y a une telle sincérité que l’on peut qu’être ébloui. Si jouer vrai à un sens, il trouve là une parfaite illustration. Chloé Zhao confirme un talent rare. En être là pour son deuxième film seulement promet peut-être une carrière qui marquera profondément l’histoire du cinéma. A l’heure où chacun savoure le plaisir de retrouver le chemin des salles obscures, cette perspective donne vraiment envie de croire à nouveau à demain.
LA NOTE : 15/20
Fiche technique :
Réalisation : Chloé Zhao
Assistante réalisatrice : Mary Kerrigan
Scénario : Chloé Zhao d’après le livre Nomadland: Surviving America in the Twenty-First Century de Jessica Bruder
Directeur de la photographie et décors : Joshua James Richards
Musique : Ludovico Einaudi
Direction artistique : Elizabeth Godar
Costumes : Hannah Peterson
Ingénieur du son : Mike Wolf Snyder
Montage : Chloé Zhao, assistée de Robert Benedict
Producteurs : Dan Janvey, Frances McDormand, Peter Spears, Chloé Zhao
Durée : 108 minutes
Casting :
Frances McDormand : Fern
David Strathairn : Dave
Linda May : Linda
Charlene Swankie : Swankie
Angela Reyes : Angela
Bob Wells : Bob
Peter Spears : Peter
Melissa Smith : Dolly, la sœur de Fern
Gay De Forest : Gay
Patricia Grier : Patty
Carl R. Hughes : Carl
Douglas G. Soul : Doug
Ryan Aquino : Ryan
Teresa Buchanan : Teresa