Le mot fou a un destin bien particulier. Il est devenu politiquement incorrect et on lui préfère des euphémismes ou des termes médicaux alambiqués. Pourtant, les actes qui semblent défier en tous points la raison, bref la folie si on appelle un chat un chat, continue de fasciner, indépendamment de toutes les polémiques sémantiques. Bruno Reidal explore une forme bien particulière de folie, la folie meurtrière qui, au début du 20ème siècle, a poussé un jeune homme de 17 ans a tué froidement et sans raison un jeune garçon de son village. Sans raison… c’est bien le mot. Enfin de notre point de vue.
Bruno Reidal est tiré d’une histoire vraie. Elle se base sur le récit que le jeune homme a été poussé à écrire par ses médecins à l’asile. Le récit de sa vie, de la naissance de cet instinct meurtrier qui l’aura finalement poussé à passer à l’acte. Il s’agit donc un récit à la première personne, nous faisant plonger au cœur de la pensée même du meurtrier. Cette expérience aurait pu s’avérer vertigineuse, mais le film adopte par la même une sorte de ton distancié par rapport à l’horreur décrite qui est très dérangeant. C’était évidemment le but. Mais traiter un sujet comme celui-là avec une absence totale de recul s’apparente plus à du pur voyeurisme qu’à une réflexion. Le sujet l’aurait pourtant bien mérité.
Bruno Reidal aura au moins eu le mérite de nous faire découvrir un jeune acteur prometteur, en la personne de Dimitri Doré. Principal acteur et narrateur, il occupe une place prépondérante dans ce film. Il parvient remarquablement bien à crédibiliser son personnage, ce qui n’était pas forcément gagner d’avance. Il donne un visage froid et sans remord à la folie, tout en faisant preuve d’une réelle forme de sensibilité. Là aussi, le mélange est dérangeant, mais cette fois-ci c’est au profit de l’intérêt de l’œuvre. Malheureusement, au final, ce film en manque cruellement et paraît plus gratuit que porteur de réflexion.
LA NOTE : 07/20
Fiche technique :
Réalisation et scénario : Vincent Le Port
Musique : Olivier Messiaen
Décors : Arnaud Lucas
Costumes : Véronique Gély
Photographie : Michaël Capron
Son : Marc-Olivier Brullé (ingénieur) et Charlotte Butrak (montage)
Production : Roy Arida et Pierre-Emmanuel Urcun (Stank)
Coproduction : Thierry Lounas (Capricci)
Durée : 101 minutes
Casting :
Dimitri Doré : Bruno Reidal
Roman Villedieu : Bruno Reidal, 10 ans
Alex Fanguin : Bruno Reidal, 6 ans
Jean-Luc Vincent : Lacassagne
Tino Vigier : Blondel
Nelly Bruel : la mère
Rémy Leboucq : le berger
Ivan Chiodetti : le père
Tristan Chiodetti : François
René Loyon : le supérieur