ARISTOCRATS : Cri subtil

Comment dénoncer le poids des conventions dans un pays où ces mêmes conventions vous empêchent de hausser la voix et de crier votre indignation haut et fort ? Il faut savoir alors faire preuve d’une infinie subtilité pour faire passer les messages avec une forme de douceur apparente mais qui ne nuit en rien à l’impact du propos. Ce n’est évidemment pas facile à réaliser et il faut beaucoup de talent pour y parvenir. La japonaise Yukiko Sode n’en manque pas, comme le prouve Aristocrats, un film qui met en lumière la pratique encore vivace des mariages arrangés au sein de la haute bourgeoisie nippone. Or, aussi incroyable que cela puisse paraître, celle-ci est composée d’êtres humains frappés des mêmes sentiments que n’importe qui.

Aristocrats peut apparaître dans sa première partie comme un film plutôt contemplatif. Il est vrai que la mise en place et la présentation des personnages prennent beaucoup de place et de temps. Mais alors qu’on pourrait craindre d’être sur le point de décrocher, les rouages finement agencés commencent à se mouvoir et le reste du film tiendra le spectateur en haleine. N’attendez rien de spectaculaire. L’ambiance est feutrée, le rythme de narration typiquement asiatique, mais le vitriol passé sur la haute société s’avère particulièrement corrosif. Mais c’est bien ici une société, un système et son poids écrasant qui sont jugés. Yukiko Sode garde un regard bienveillant sur celles et ceux qui le subissent, qui restent tout de même avant tout des victimes.

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Aristocrats est porté par un merveilleux trio. Je mettrai en avant tout d’abord Kiko Mizuhara, qu’on a pu apercevoir par ailleurs l’année dernière dans Annette. Elle incarne l’élément perturbateur dans ce monde qui semble régi par des traditions séculaires et surtout immuables. Le tout avec la subtilité qui caractérise ce film. A ses côtés, Mugi Kadowaki incarne de son côté la soumission, mais c’est le personnage qui est le plus amené à évoluer. Elle le fait avec un mélange lui aussi subtil entre force et fragilité. Enfin Kengo Kora, qu’on avait découvert dans Une Affaire de Famille, laisse longtemps le spectateur circonspect face à ce personnage qu’on n’arrive pas vraiment à détester. Ces trois-là font de ce film une belle réussite qui nous démontre une nouvelle fois l’incroyable richesse du cinéma japonais.

LA NOTE : 13,5/20

Fiche technique :
Réalisation et scénario : Yukiko Sode
Montage : Hori Zensuke
Photographie : Sasaki Yasuyuki
Durée : 124 minutes

Casting :
Mugi Kadowaki : Hanako
Kiko Mizuhara : Miki
Kengo Kora : Koichiro
Shizuka Ishibashi : Itsuko
Rio Yamashita : Rie

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