Le flic, c’est bien connu, est particulièrement sujet à la dépression. Enfin dans les polars, même si, vu la difficulté du métier, on peut facilement imaginer que cela soit également le cas dans la vraie vie vraie. Cela procure une source inépuisable de personnages torturés, plongés dans une logique d’auto-destruction. La Mort dans une Voiture Solitaire, d’Hugues Pagan, publié en 1982, se situe dans cette droite lignée.
L’inspecteur principal Schneider est amené à enquêter sur la mort de Mayer, un malfrat local. Cela tombe bien car il a bien des choses à oublier, bien des pages à tourner. Mais se plonger dans son travail n’est-il pas le meilleur moyen de s’y noyer ?
Hugues Pagan sait de quoi il parle puisqu’il est lui-même un ancien policier. La Mort dans une Voiture Solitaire fut son premier roman. Il en a depuis signé bien d’autres et a également beaucoup travaillé pour la télévision. Il est notamment l’auteur de la série Mafiosa que l’on a pu voir sur Canal+. On sent d’ailleurs dans La Mort Dans une Voiture Solitaire qu’il est encore très attaché à son ancienne profession car il laisse une large part à la description du fonctionnement de la police. Son parcours rappelle un peu celui d’Olivier Marshall, l’un derrière la plume, l’autre derrière une caméra.
Globalement, la Mort dans une Voiture Solitaire s’assimile plus à un livre sur les policiers qu’à une enquête pure et dure. Cette dernière est un fil rouge, avec un certain suspense, mais ne constitue pas forcément la principale source d’intérêt. C’est son impact sur le moral et les états d’âme de l’inspecteur Schneider qui forment le cœur de cet ouvrage. On est là dans la pure tradition du roman noir. On aurait envie de dire « à l’américaine », mais notre pays est également un producteur important de ce genre littéraire. Mais avoir une intrigue policière, au sens classique du terme, un peu plus développée n’aurait rien gâté.
Malheureusement, la Mort dans une Voiture Solitaire fonctionne moyennement. C’est riche et particulièrement touffu, mais ça ne passionne pas forcément. L’attachement aux personnages reste quand même assez minime, y compris au personnage principal, ce qui est quand même un tantinet embêtant. On reste largement en dehors de cette histoire trop dense pour qu’on puisse s’y glisser sans effort. Globalement, ce roman ne se démarque pas vraiment de la tradition dans laquelle il s’inscrit, ce qui peut être vu comme une force, mais qui constitue pour moi avant tout pour moi ici une faiblesse.
De plus, la Mort dans une Voiture Solitaire n’est pas franchement bien écrit. Ce n’est pas toujours très clair, alors que les personnages sont nombreux. On s’y perd et on progresse dans le roman avec effort, pour ne pas dire peine. Cela aurait pu coller avec l’ambiance générale du roman, mais cela contribue avant tout à laisser le lecteur en dehors de l’histoire. Cela nuit parfois même à la compréhension, ce qui est encore plus gênant. En ce sens, on pourrait comparer Hugues Pagan à John Le Carré, mais sa plume est quand même très loin (c’est un euphémisme) de valoir celle de l’auteur de l’Espion qui Venait du Froid. Bref, la lecture de ce roman ne s’apparente pas du tout à un moment de détente légère.
La Mort dans une Voiture Solitaire m’a donc moyennement convaincu, pour ne pas dire que sa lecture fut un peu pénible.