Même les plus grands peuvent avoir connu des débuts hésitants. Même un immense auteur comme George Simenon. Son œuvre est marquée par une volonté d’explorer l’envers du décor d’une bourgeoisie bien pensante. C’est un élément que l’on retrouve pratiquement dans tous ses romans et qui leur donne toute leur saveur et tout leur intérêt. Mais cet angle est sûrement né de l’expérience venue avec le temps. Pietr-le-Letton constitue la première enquête du commissaire Maigret et la première histoire que l’auteur signe sous son nom. Il explore d’autres sujets : le grand banditisme international avec un petit fond de géopolitique. Le résultat n’est pas totalement convaincant.
Une blague est rarement drôle quand on est obligé de l’expliquer. L’intrigue de Pietr-le-Letton se trouve un peu dans le même cas. Le lecteur a bien du mal à la suivre et à la comprendre, et surtout de saisir où tout cela va en venir. George Simenon a du le sentir car l’enquête se termine par une longue explication de ce qui s’est réellement passé, de qui était finalement qui et du pourquoi des agissements de chacun. Ca peut rappeler la fin d’un Agatha Christie, mais cela sonne ici plutôt comme un aveu de faiblesse d’un récit mal maîtrisé. Et qui a vrai dire aura assez peu passionné le lecteur auparavant.
Du coup, on ne parvient même que difficilement à apprécier la plume magnifique de George Simenon. Evidemment, Pietr-le-Letton n’est pas mal écrit, loin s’en faut, mais le lecteur se débat trop pour tenter de démêler les fils de l’intrigue, pour prendre le temps d’admirer le style. Comme tous les livres de cet auteur, il s’agit d’un roman assez court et on ne pourra donc pas trop lui en vouloir de nous avoir fait perdre trop de temps avec ces débuts hésitants. Il nous en laisse largement assez pour découvrir et apprécier le reste de son œuvre magnifique.