Pourquoi une œuvre culte ou acquière le rang de classique ? Par sa qualité bien sûr, mais aussi son succès commercial. Par sa place dans la littérature d’espionnage, Shibumi de Trevanian, un roman qui a un très bel âge (c’est à dire le mien), peut prétendre à ce statut. Je confesse que j’ignorais totalement son existence avant que l’on me l’offre. Mais il n’est jamais trop tard pour parfaire sa culture. Cependant, si l’œuvre n’aura pas le même statut dans ma bibliothèque personnelle.
Je n’ai pas trouvé que Shibumi est un mauvais roman, loin de là. Déjà parce qu’il est remarquablement bien écrit. Si le style est toujours difficile à juger dans le cadre d’une traduction, la plume de Trevanian est vraiment exceptionnelle, surtout pour un roman de ce style. L’histoire est aussi d’une grande originalité. Il s’agit d’une dystopie, dont le récit se situe entre le roman d’apprentissage, le portrait et la réflexion philosophique. Le tout donnant un roman d’espionnage. Une œuvre assez singulière pour sortir vraiment du lot. Toutes ces caractéristiques expliquent largement son succès.
Cette originalité constitue aussi à mon sens la principale limite de Shibumi. Tous les éléments n’entrent pas forcément en synergie, mais se diluent mutuellement. Il y a deux histoire en une dans ce roman, celle du personnage et celle de son combat contre une organisation cherchant à dominer le monde. La première vient s’intercaler au milieu de la seconde, ce qui fait perdre quelque peu le fil et ne permet pas à la tension de monter. Certains chapitres laissent quelque peu circonspect, comme cette expédition spéléologique décrite longuement dont ne voit pas bien en quoi elle enrichit l’histoire. Bref, ce roman m’a laissé sur ma faim.