
Bon, commençons ce billet par un peu de sémantique. Beaucoup de personnes participant au cortège ou postant des commentaires sur les articles traitant du sujet vous rappelleront que ce terme désigne, en théorie, quelque chose de bien particulier en rapport avec la « peur » (d’où le suffixe phobe), ce qui n’est pas du tout ce qu’ils ressentent. Ils ont tout à fait raison. De même que la xénophobie est différente du racisme, l’homophobie est différente du… Ah on s’aperçoit vite qu’il manque un mot dans la langue française. Mais ne voulant pas alourdir mon texte par d’incessantes périphrases, ni me sentant le droit de créer un néologisme, je maintiens le terme homophobe qui est peut-être légèrement impropre, mais tant que ça non plus !
Le débat autour du mariage pour tous montre bien que l’acceptation de l’homosexualité dans notre société a encore bien du chemin à parcourir. D’ailleurs, même des personnes soutenant le projet vont se définir comme tolérant vis-à-vis de l’homosexualité. Or, on n’a pas être tolérant avec l’homosexualité, comme on n’a pas à être tolérant avec les grands, les petits, les blonds, les bruns ou encore les noirs… Eventuellement, on est tolérant avec son voisin du dessus qui apprend à jouer de la clarinette tant qu’il le fait à des heures acceptables, mais on n’a pas à « tolérer » ce que les autres sont, quand cela n’a aucun impact sur sa propre vie et quand en plus les autres en question n’ont pas choisi de l’être.
En fait, être homosexuel aujourd’hui, c’est un peu comme être noir il y a encore un siècle ou deux. Cette comparaison, hasardeuse comme toutes les comparaisons, permet de voir comment les mœurs suivent une certaine évolution et comment les positions de chacun sont à remettre dans le contexte de l’époque. Les membres de la Société des Amis des Noirs au XVIIIème siècle étaient à la pointe du progrès social, des hommes admirables. Ce n’est pas pour ça qu’ils étaient tous prêts à accorder le droit de vote (qui de toute façon n’existait pas) aux gens de couleurs ou encore moins à autoriser leur fille à en épouser un, ce qui aujourd’hui en feraient des gros cons de racistes.
Pour poursuivre sur la même logique, beaucoup de justifications à l’opposition au mariage pour tous reprend une rhétorique pseudo-scientifique qui rappelle justement celle de tous ceux qui ont défendu le racisme, l’eugénisme et bien d’autres idées abjectes qui ont longtemps eu pignon sur rue. Ils brandissent l’enfant comme un talisman inattaquable qui peut justifier leur haine et leur mépris. Mais remplaçons dans leur discours le mot homosexuel par le mot pauvre et vous obtiendrez un discours tout aussi valable. Les enfants de pauvres ont plus de problèmes que les enfants des classes aisées. Doit-on donc en conclure qu’il faut empêcher les pauvres de se marier et de se reproduire ?
Quant à la rhétorique religieuse, elle pourrait faire sourire si à l’heure actuelle l’Ouganda ne tentait pas de rétablir la peine de mort pour les homosexuels, au nom de ce qui est marqué dans la Bible. La peine de mort pour les homosexuels est explicitement prescrite dans l’Ancien Testament, exactement comme la Génèse explique clairement que les Noirs ont été crées par Dieu pour êtres des esclaves. C’est notamment comme ça que le Ku Klux Klan, mouvement évangéliste, justifie ses exactions (cf. l’excellent film de Costa-Gavras, la Main Droite du Diable à ce sujet). Bref, on peut tout faire dire à la Bible sur à peu près n’importe quel sujet. Toutes les religions d’ailleurs sont devant un combat qu’elles savent perdus d’avance. Leur position est tout simplement intenable. Il suffit d’écouter le discours du recteur de la Grande Mosquée de Paris tenir à la fois un discours positif autour du fait que l’homosexualité est une réalité qui doit être vécue sans remords au grand jour, sans incompatibilité avec le fait d’être un bon musulman, tout en condamnant une égalité des droits.
On peut comprendre que beaucoup de personnes continuent à ressentir un certain malaise à la vue de deux hommes qui s’embrassent, car trop en contradiction avec les schémas qui leur ont été inculqués dès leur plus jeune âge. C’est plus fort qu’eux et on peut qualifier ça d’homophobie. Mais heureusement, la plupart de ces gens là ne la transforment pas en haine et en sont pas près à battre pour le crier sous les toits, quand tant de causes, tant de souffrances, tant d’injustices mériteraient bien d’autres manifestations. Ceux qui sont dans la rue à l’heure où j’écris ces lignes constituent donc la frange la plus en opposition avec une évolution inéluctable de la société. Chaque époque de l’humanité a son meilleur et son pire. Ils représentent le pire et leur combat ne mérite à ce titre qu’un profond mépris.
Il ne faudra plus attendre très longtemps avant que s’opposer au mariage pour tous ne devienne aussi saugrenu et extrémiste que de s’opposer au mariage entre blancs et noirs. D’ici quelques décennies, on ne pourra plus voir dans un parti de gauche comme le PS un militant exprimer son opposition à une telle idée sans qu’on lui indique la porte de sortie pour le renvoyer dans le même caniveau où nous considérons que les idées du Front National demeurent. L’exemple de l’Espagne est frappant. L’opposition au mariage pour tous était d’une ampleur bien supérieure à celle en France (1,5 millions de personnes dans les rues de Madrid pour 20 millions d’habitants de moins). Un peu moins de dix ans après, plus personne n’en parle, sinon quelques irréductibles à la haine viscérale.
Le mariage pour tous verra le jour et deviendra vite une norme car il rajoute des droits à une partie de la population, sans en priver qui que ce soit. C’est l’immense différence avec le combat de 1984 contre la réforme de l’Education Nationale qui aurait mis fin à l’enseignement privé. Les organisateurs de la manifestation d’aujourd’hui ont tort d’espérer que l’histoire se répète, car elle est bien différente. Bien sûr, il restera toujours une homophobie ordinaire, comme il existe un racisme ordinaire, mais on ne pourra jamais éradiquer totalement ces faiblesses humaines.
Mais cette vision assez optimiste ne doit nous faire oublier que le combat vaut encore le coup d’être mener avec force. N’oublions pas qu’il y a 7 fois plus de suicides chez les homosexuels que chez les hétérosexuels, 13 fois même chez les adolescents. L’homophobie tue ! La bêtise humaine non. Sinon, les rues de Paris seraient jonchés de cadavres cette après-midi…

Les démarches de Bernard Arnaud pour acquérir la nationalité belge fait couler beaucoup d’encre. Tout ceci possède évidemment une portée symbolique très forte, mais cela a malheureusement permis de constater une nouvelle fois que les débats médiatiques ne volaient pas très haut. La fiscalité est un sujet complexe mais essentiel, mais encore une fois les deux camps font preuve de raccourcis grossiers qui rendent les échanges totalement inintéressants.
Pendant mes vacances bien méritées, j’ai totalement délaissé mes commentaires éminemment éclairés sur l’actualité. Désormais, c’est la rentrée, alors il faut s’y remettre. Surtout qu’elle s’annonce chargée et nous réserve bien des occasions d’analyses et de débats. Malheureusement quelques raisons de s’inquiéter également.
Pendant longtemps le Parti Communiste a été synonyme de « on ne change pas une équipe qui perd » avec d’indéboulonnables premiers secrétaires, comme George Marchais, qui ont conduit ce parti à un inexorable déclin. On pensait pourtant que dans le cadre du Front de Gauche, sous l’impulsion de Jean-Luc Mélenchon, ce courant politique allait connaître une renaissance. Mais son leader est malheureusement tombé dans le piège du « on ne change pas une stratégie qui perd ».
Dimanche, les élections législatives devraient connaître un taux d’abstention proche de 40%. Lors de cette campagne, à laquelle j’ai activement participé, on a senti une différence abyssale d’intérêt chez nos concitoyens, acceptant ou refusant poliment nos tracts, mais sans rarement formuler d’encouragements ou d’invectives. La campagne de présidentielles était évidemment tout autre, puisque l’on sentait chez tout à chacun une curiosité, une impatience, voire même une excitation conduisant à des réactions réellement viscérales.
Le temps de la fête est désormais terminé. Le Champagne est bu, l’euphorie est retombée. La musique de la Bastille est désormais un lointain souvenir. Un beau souvenir, historique même, mais qui ne constitue en rien l’assurance de lendemains qui chantent. En effet, la tâche qui attend François Hollande est colossale. Passer du papier à la réalité, de l’idée au résultat représente toujours le plus difficile dans tous projets. Mais peut-être encore plus pour celui qui deviendra définitivement le Président de la République dans cinq jours.
Bon voilà un billet que j’ai quelque peu hésité à écrire. Déjà parce qu’en tant que militant socialiste, je suis censé répandre la bonne nouvelle et toujours positiver. Mais bon, restant un modeste conseiller municipal d’opposition dans une ville ignorée des hommes et de Dieu s’il existait, je m’octroie le droit de dire ce que j’ai vraiment pensé du débat d’hier soir.
Le 6 mai 2007, au soir de la victoire de Nicolas Sarkozy, j’écrivais : Ce soir, la défaite est cruelle. Elle laisse surtout un pays coupé en deux, comme il ne l’a jamais connu dans son histoire. Jamais un candidat élu n’aura autant cristallisé la haine sur nom. Si les hommes de gauche subissaient Chirac, sans jamais vraiment totalement le haïr, Nicolas Sarkozy représente ce que nous exécrons le plus : défense des plus forts contre les plus faibles, xénophobie latente qui ne dit pas son nom, eugénisme social et biologique, mépris des travailleurs justifié par une morale « travail, famille, patrie »… Mais si la défaite est cruelle, j’espère qu’elle fera naître un mouvement d’opposition plus soudée et plus fort que jamais. 
Le premier tour vient de s’achever et les commentaires se multiplient. Et comme je suis quelqu’un de particulièrement conformiste, je vais m’y mettre à mon tour. Je ne sais pas si mon analyse est plus pertinente qu’une autre, mais l’écrit à au moins le mérite de mettre les idées au clair. Alors si ce billet ne sert peut-être pas à la marche du monde, au moins, il m’aura rendu service.
Je profite des dernières minutes où j’ai le droit de le faire pour livrer un dernier article avant le premier tour de l’Election Présidentielle. Un article que je ne devrais peut-être pas écrire puisque « non, rien n’est joué ! », « il ne faut surtout pas relâcher la mobilisation », « en ayant l’air de crier victoire trop vite on fait le jeu de la droite… ». Mais malgré ma grande imagination et sans avoir l’impression de succomber à mon optimisme légendaire, je ne pense pas prendre beaucoup de risques en affirmant que, oui, François Hollande va remporter l’élection présidentielle.
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