LE BON CHOIX

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francoishollande2Dans 10 jours aura lieu le premier tour de l’élection présidentielle. En tant que militant et élu socialiste, mon choix ne fait que peu de doute. Il pourrait y avoir là une forme de discipline, d’obligation, presque de contrainte. Je dois bien l’admettre, combien même la campagne aurait été désastreuse, j’aurais sûrement voté pour le candidat socialiste. Mais les 22 avril et 6 mai prochains, je mettrai mon bulletin François Hollande dans l’urne sans aucun doute sur la justesse et la pertinence de mon choix.

Pourtant, il y a encore un an, je n’imaginais pas une seule seconde qu’il puisse être candidat. Je n’imaginais même pas le soutenir pour la primaire qui me semblait jouée d’avance. Mais le Sofitel est passé par là. Avant cela, je ne voyais pas du tout le député de Corrèze dans le costume de Président, je l’admets volontiers. Je ne vais pas jouer le couplet du « je l’ai toujours su », « je l’ai toujours dit », parce que ce n’est pas vrai et certains camarades pourraient même rappeler que j’avais dit exactement l’inverse. Mais j’ai changé d’avis. François Hollande m’a fait changer d’avis.

J’ai choisi de soutenir François Hollande lors de la primaire socialiste pour deux raisons. Deux raisons qui ne font qu’une. Déjà parce qu’il le voulait vraiment et depuis longtemps. Nicolas Sarkozy y pensait en se rasant, François Hollande y pensait en faisant un régime. Mais la comparaison entre les deux hommes s’arrêtent là. En effet, pour obtenir l’investiture, le socialiste n’a pas mené une guerre politicienne au sein de son parti. Il n’a pas manœuvré, il n’a pas trahi. Je ne veux pas dire par là que François Hollande était un candidat hors système comme a pu l’être Ségolène Royal. Ses dix ans à la tête du parti lui ont laissé un puissant réseau de soutien sur lequel il s’est évidemment appuyé. Mais, ce qui a été décisif pour moi, c’est qu’il s’est présenté dès le premier jour comme le candidat qui porterait deux priorités : la justice fiscale et la jeunesse. C’était peut-être léger, embryonnaire, mais un an plus tard, ces deux idées sont encore celles qui dominent le programme soumis aux Français. En soutenant François Hollande dès l’été dernier, on pouvait déjà soutenir des orientations, une conception, un idéal, pas seulement (ou mais aussi, comme vous préférez) un homme, une personnalité, un ego, une ambition.

François Hollande, la girouette, voilà un reproche de la droite qui prouve qu’elle n’a peur de rien. Quel homme politique a tenu un cap aussi fermement sans s’en détourner aussi longtemps pour un tel enjeu ? Car ce cap a été défini alors que personne ne croyait en lui et c’est ce même cap qui guide aujourd’hui son programme. On est en droit de ne pas le trouver pertinent, insuffisant, pas à la hauteur des difficultés. Peut-être n’est-il pas sexy, vendeur ou séduisant. Peut-être n’est-il pas susceptible de susciter l’enthousiasme. Mais au moins est-il tracé par un homme qui vient de prouver qu’il était capable de le maintenir quoiqu’il arrive.

Avant d’aborder la pertinence des idées, je voudrais un peu parler de l’homme. Je sais, cela constitue presque une faute pour un militant socialiste qui ne doit jurer que par le débat d’idées. Mais évidemment cela compte et notre système électoral étant ce qu’il est, la personnalité des candidats reste un point crucial, que cela nous plaise ou non. D’ailleurs, c’est souvent à ce niveau-là que les critiques fusent : trop mou, trop lisse, venant de personnes qui n’ont le plus souvent qu’une connaissance très vague de son programme. Mais chacun vote sur les critères qu’il souhaite.

François Hollande n’est ni Nicolas Sarkozy, ni Jean-Luc Mélanchon. Il est plus rassurant qu’énergique. Plus caustique qu’agressif. Plus posé que spectaculaire. Mais ce que j’apprécie en lui, et ça bien avant la campagne présidentielle, c’est qu’il n’est pas clivant. Il n’est pas dans l’opposition des uns contre les autres, il ne désigne pas les gentils et le méchants, le blanc et le noir. Incapacité à trancher, manque d’autorité ? On peut voir les choses comme cela. J’ai été le premier à regretter qu’il ne décide pas l’exclusion de Laurent Fabius du Partie Socialiste au moment de la campagne sur le traité constitutionnel européen. Mais avec le recul, n’était-ce pas le meilleur choix à long terme ? Etait-ce surtout le choix le plus facile alors qu’une occasion en or de se débarrasser d’un rival lui était apporté sur un plateau ?

Nombreux étaient ceux qui pensaient suite aux primaires la campagne serait marqué à nouveau par les guerres intestines au Parti Socialiste, comme en 2007. Il n’en a rien été. Tout le monde tire dans la même direction et faut-il le rappeler encore une fois sur des orientations définies par François Hollande bien en amont. Tout cela sans qu’il n’y ait de démonstration d’autoritarisme, pas d’adversaire puni, exclu, isolé comme l’a été Dominique de Villepin à l’UMP. Ceci est-ce vraiment le signe d’une absence d’autorité ? D’un homme incapable de tenir ses troupes ? Incapable d’apparaître comme le leader ?

Il y a tous en nous un royaliste qui sommeille. Cette envie d’avoir un chef qui décide, un homme providentiel qui aura toujours la solution et dont les décisions s’imposeront sans contestation possible. On a vu ce que ça donnait avec Nicolas Sarkozy. François Hollande n’a pas cette conception du pouvoir. Peut-être parce qu’il ne peut pas l’avoir, mais au fond, qu’importe. Le 6 mai, les Français ne le choisiront pas comme Président de la République. Au mieux, 55% d’entre eux le feront. Et encore, en ne comptant que les suffrages exprimés. Pourtant, dès le lendemain, il sera le Président de tous les Français, qu’ils aient voté pour lui ou non. Ce détail est trop souvent oublié par les élus, quelque soit leur niveau (comme mon Maire par exemple…).

Sur le quotient familial, oui, François Hollande a renoncé. D’un point de vue purement cartésien, je le regrette. Mais on sentait bien que ce sujet allait diviser, blesser, susciter colère et indignation. Renoncer est évidemment aussi une manœuvre politique pour ne pas donner à l’adversaire un point d’appuis pour emporter l’adhésion. Mais la gauche l’a appris en 1984 avec la loi Savary. On ne peut gouverner contre une partie de sa propre population. Avoir la légitimité démocratique ne signifie pas que l’on n’a plus à prendre en compte l’opinion de la minorité qui ne vous a pas élu. Alors dans ce renoncement, je vois plus d’intelligence que de faiblesse. Je vois la promesses d’une mandature qui sera placé sous le signe de la construction, non de l’affrontement. Ou personne ne sera traité de « cancer de la société ». Ou le désaccord, naturel dans une démocratie, remplacera l’indignation et le sentiment de révolte.

La justice fiscale et la jeunesse donc. Car plus qu’un homme, ce sont des orientations que nous auront à choisir dans dix jours. Pourquoi choisir François Hollande ? Pourquoi choisir son programme ? Cette question, même en tant que militant socialiste, je me la suis posée. En fait, la vraie question est pour moi, pourquoi suis-je de gauche, et socialiste en particulier ? Et est-ce que ce qui est proposé correspond à ces convictions ?

Depuis que je fais activement de la politique, depuis que je suis élu, j’ai d’autant plus la conviction que le clivage droite/gauche n’a rien d’artificiel, qu’il vient bien de deux manières de penser radicalement différente. Après, sur des points très pragmatiques, on peut arriver à la même solution, mais ce n’est pas pour cela que le chemin pour y aboutir fut le même. C’est une vaste question et m’y lancer m’éloignerait forcément du sujet qui m’intéresse ici. Pour résumer, et forcément caricaturer j’en ai bien conscience, face à un problème, la droite cherchera à faire disparaître le symptôme quand la gauche soulagera le symptôme et chercher à faire disparaître la maladie. Pour prendre un exemple, un peu simpliste j’en conviens, la droite cherchera uniquement à faire baisser la délinquance par la répression, quand la gauche s’intéressera aussi à ses causes profondes et luttera contre la pauvreté et l’exclusion. Raccourci rapide peut-être, mais aux dernières nouvelles, je n’ai jamais été tenté, ni même eu l’occasion de devenir délinquant, tout simplement parce que j’ai eu la chance de naître dans un milieu relativement bourgeois et éduqué. C’est une chance et offrir cette chance au plus grand nombre doit être pour moi la vraie priorité pour lutter efficacement et durablement contre la délinquance.

En quoi le programme de François Hollande se situe-t-il dans cette logique ? Il est déjà important de distinguer les maladies des symptômes. C’est une question délicate car extrêmement dépendante du point de vue de celui qui la traite. Je vais donc le faire avec ma propre subjectivité, parfaitement assumée et que je ne prétends pas qu’elle constitue une vérité universelle et objective. Je traiterai ici deux « maladies » : les inégalités et la problématique du logement. Il y en a évidemment plein d’autres, sur des sujets que je maîtrise beaucoup moins bien (justice, santé, éducation…) et où je ne m’aventurerai pas.

Pourquoi ai-je parlé des inégalités et non pas du chômage, de la faiblesse de la croissance ou de la dette ? Il y a là une conviction toute personnelle, même si évidemment elle s’est forgée à la lecture d’esprits beaucoup plus brillants que le mien. Cette conviction pourrait être résumée par un proverbe chinois, ou plutôt, dans mon cas personnel, sa négation : « quand les riches maigrissent, les pauvres meurent de faim ». Cette idée, que tous les faits contredisent, est fondamentale dans une certaine idéologie libérale. Or c’est cette dernière qui a envahit l’Occident en particulier depuis Tatcher et Reagan. Nos sociétés s’évertuent depuis à casser tous les systèmes de régulations qui empêchaient l’argent de se concentrer encore et toujours entre quelques mains… et du coup, c’est exactement ce qui se passe.

Toutes les statistiques montrent une montée des inégalités depuis la fin des Trente Glorieuses. Et il est intéressant de mettre cela en parallèle avec la croissance et le chômage. A mesure que les inégalités croissent, ces indicateurs se dégradent. Ce simple constat ne signifie évidemment pas obligatoirement une corrélation et n’indique pas non plus quelle est la cause, quel est l’effet. Je ne vais pas rentrer ici dans une explication de ce type, je l’ai déjà fait dans d’autres billets. Simplement, je reste convaincu que c’est la montée des inégalités qui provoque un phénomène de « l’argent va à l’argent » qui appauvrit la base de la pyramide sociale et par la même occasion fragilise l’économie tout entière.

Que peut faire l’Etat pour lutter contre les inégalités ? Il a deux moyens d’action : les salaires et la fiscalité. Les premiers peuvent sembler constituer le levier idéal, le plus solide. En effet, il combat le mal vraiment à la source, alors que l’impôt n’apporte qu’une correction a posteriori. Mais tous les efforts dans ce domaine seront vains tant que le chômage sera si haut. La loi de l’offre et la demande reste encore la force économique la plus forte et tant qu’un déséquilibre existera, les salaires seront irrémédiablement tirés vers le bas. On peut promettre un SMIC à 1700 euros comme le fait Jean-Luc Mélanchon. C’est beau sur le papier, mais tout ce que l’on récoltera, c’est une inflation galopante !

Reste donc la fiscalité. Et dans ce domaine, le programme de François Hollande aborde enfin le problème dans sa dimension peut-être la plus technique, mais la plus fondamentale : celle des bases. J’ai déjà écrit deux article sur le sujet (Plutôt que le Taux, Basons-nous sur la Base et les Limite de la Valeur Travail), je ne vais donc pas y revenir. Le rapprochement entre l’impôt sur le revenu et la CSG ne fait peut-être pas rêver, ne sonne pas comme une promesse de lendemains qui chantent, mais elle constitue une des idées le plus intéressantes de cette campagne. Dommage que son caractère technique la rende invisible.

Corriger les inégalités ne sera évidemment pas suffisant pour nous assurer croissance et prospérité à long terme. On ne peut nier la mondialisation et la compétitivité est une notion que l’on ne peut ignorer. Or, la France a de formidables atouts dans ce domaine. Les Français ont la productivité/horaire la plus élevée au monde ! C’est à dire que quand un Français travaille une heure, il produit plus de richesses que n’importe où ailleurs. Cela constitue évidemment un élément sur lequel s’appuyer.

A côté de ça, il y a évidemment le coût de production de cette richesse. Il constitue un thème central de cette campagne. Là encore, le débat est de nature technique et du coup, les arguments avancés restent particulièrement superficiels. Il y a cependant bien là une ligne de fracture nette entre Nicolas Sarkozy et François Hollande. Le Président sortant veut nous rendre plus compétitif en abaissant le coût du travail. Or quand une usine est délocalisée, elle part pour un pays où ce dernier est 5 fois (Pologne) ou 10 fois (Chine) inférieur. Dans ce domaine, la partie est perdue d’avance, nous ne pouvons pas lutter. Ce ne sont pas les quelques ajustement proposés par la droite qui vont fondamentalement changer quoique ce soit. Au mieux, nous entrerons dans une logique de concurrence avec nos voisins européens, qui va se traduire par un dumping social, tirant toute l’Europe vers le bas, alors que des politiques coordonnées peuvent tout à fait l’éviter.

On oublie parfois de le rappeler mais la France reste un pays plus riche que la Chine et la Pologne. Notre productivité nous permet donc d’être plus efficace qu’une économie qui mise tout sur les bas salaires. Or cette productivité, qui explique que la France est un des pays au monde où les investissements étrangers sont les plus élevés, rappelons-le, tient notamment de la qualité de notre main d’œuvre (à prendre au sens large, c’est à dire y compris cadres, chercheurs, etc…) et donc de notre système éducatif. Si ce dernier continue son déclin, par manque d’investissement, nous perdrons notre plus grand atout.

La priorité donnée par François Hollande à l’éducation, et plus globalement à la jeunesse, est donc particulièrement pertinente. Elle revient à lutter avec nos armes, notre force et non pas à nous aventurer sur un terrain dont nous ne pouvons sortir que perdants et appauvris. Elle n’empêche pas de développer d’autres atouts, comme un tissu de PME plus solide. Ce dernier fait la vraie force de l’Allemagne (et non un coût du travail plus faible que chez nous) et le propositions de François Hollande allant dans ce sens m’apparaissent apporter une vraie réponse s’attaquant une nouvelle fois au fond des problèmes.

Voilà pourquoi avoir défini la justice fiscale et la jeunesse comme les deux grandes priorités a emporté mon adhésion et au-delà des mesures concrètes et pragmatiques, qui seront du ressort du gouvernement et du Parlement (on l’oublie trop souvent avec Nicolas Sarkozy), me donne à penser que placer François Hollande à la tête du navire France, c’est choisir le capitaine qui a fixé le bon cap.

Que les lecteurs fatigués s’arrêtent là, je leur pardonnerai. Je serai déjà content si quelqu’un arrive jusque là. Comme évoqué plus haut, je vais parler un peu de la politique du logement, domaine que je connais aussi assez bien. Voilà un problème qui se pose depuis toujours… du moins à mon échelle, c’est à dire depuis une trentaine d’années. J’ai toujours entendu que les prix montaient trop vite, que l’on ne construisait pas assez. Le problème des banlieues est une sorte de patate chaude que les gouvernements se passent les un après les autres, malgré des promesses de prendre les choses en main.

J’ai beaucoup apprécié les propos de François Hollande dénonçant le plan Marshall pour les banlieues proposé par Sarkozy en 2007 et qui n’a jamais vu le jour. Qu’on le veuille ou non, les politiques foncières sont des politiques de long terme, de l’ordre de la décennie, voire du quart de siècle. Aucune politique ne répondra au manque de logement ou au problème des banlieues en une mandature. La loi SRU, celle des 20% de logements sociaux, votée sous le gouvernement Jospin se situait dans cette logique. Elle fixait un cadre général et c’était à chaque commune, dont c’est la compétence, de trouver les solutions d’ici à 2020.

François Hollande propose de renforcer ce cadre. Ca peut paraître trop peu, trop lent. Il promet bien sûr plus de moyens, mais rien de révolutionnaire. Pas de promesses, pas d’annonces spectaculaires, comme les 30% de droits à construire supplémentaires voulus par Sarkozy. On peut du coup y voir le signe que cette thématique a été oubliée. Personnellement, j’y vois un discours raisonnable qui dit peu, mais dit des choses justes, faisables et réalistes. Encore un fois, il s’agit d’une élection présidentielle, il ne s’agit pas de définir le contenu exact des futures lois, mais de fixer les priorités, les cadres généraux, les directions à suivre.

La thématique du logement me permet une transition vers la dernière partie de ce (trop) long texte. J’ai parlé jusqu’à présent des mesures pour régler les problèmes sur le long terme. Et on vient de voir que cela peut prendre du temps. En attendant, il faut soulager les symptômes qui frappent directement les plus fragiles de nos concitoyens, qui n’ont pas vraiment le temps d’attendre. Pour le logement, le poids des loyers est évidemment un problème qui doit être traité sans attendre une rééquilibrage de l’offre et la demande. Dans ce domaine, François Hollande a eu la bonne idée d’aller en piquer une ailleurs, en Allemagne plus précisément. Ce pays ne connait pas du tous les mêmes phénomènes que nous grâce à un système d’encadrement des loyers qui fonctionne et qui n’empêche pas les propriétaires d’Outre-Rhin de mettre leurs bien en location. Evidemment, c’est un domaine où la droite a oublié de citer nos cousins germains en exemple.

En fait plus globalement, on en vient au problème du pouvoir d’achat. L’Etat peut agir de trois manières dans ce domaine. En poussant à la hausse des salaires ou par la fiscalité. J’ai déjà longuement évoqué ces deux points, je ne vais pas recommencer. Reste à agir sur les prix. Cela peut se faire par la TVA, à la hausse ou à la baisse. Mais cet impôt représente 50% des recettes fiscales, il est donc difficile de le diminuer et à l’inverse tentant de l’augmenter, comme le propose la droite. On peut surtout avoir des politiques plus ciblées, et donc plus efficaces. C’est exactement ce que fait François Hollande sur le loyers, on vient de le voir, ou sur le coût de l’essence en réintroduisant la TIPP flottante ou en proposant une réforme de la tarification du gaz et de l’électricité. Ce ne sont certainement pas des solutions à long terme, mais elles répondent à une urgence. Après, développer les transports en commun, proposer un grand programme d’isolation des bâtiments doit rendre le consommateur moins dépendant du coût de l’énergie qui ne va de toute façon pas baisser. On retrouve là encore une grande cohérence chez François Hollande entre le court et le long terme.

Enfin, je voudrais revenir sur une dernière mesure. Celle des 150 000 emplois d’avenir. Une mesure dénoncée par la droite alors qu’elle vient tout juste d’augmenter le nombre de ses emplois aidés pour faire diminuer, en vain, les chiffres du chômage avant les élections. Je suis arrivé sur le marché du travail au moment de la suppression par le gouvernement Raffrarin des emplois jeunes crées par Lionel Jospin. Et je peux vous assurer que le résultat fut désastreux. Bien sûr dans un absolu idéal, une économie qui tourne rond ne devrait pas avoir besoin de ce genre de dispositif. Mais on est encore loin de cet idéal et ce genre de mesure reste nécessaire. Surtout que les chiffres montrent qu’une large majorité des personnes embauchées restent dans la structure qui les accueillent à la fin du dispositif.

Voilà, c’est tout…

mais…

… et la dette ?

Ah bah oui, je n’en ai pas parlé. C’est pourtant le problème du moment ! Nos vilains déficits budgétaires ! Alors évidemment, on peut s’en foutre comme Jean-Luc Mélanchon en promettant de faire marcher la planche à billets. On peut se faire le champion de la rigueur comme Nicolas Sarkozy qui annonce le retour à l’équilibre pour 2016, alors que François Hollande ne l’annonce que pour…2017. Mais face à un problème pour le coup vraiment systémique, qui a pris doucement de l’ampleur depuis trente ans, et certainement pas seulement depuis la crise, il faut juger la politique proposée dans sa globalité, dans sa pertinence, dans sa cohérence. Et surtout dans sa faculté à régler les difficultés à leur racine et sur le long terme. Après que l’équilibre soit atteint en 2016 ou même en 2025, ce n’est pas le plus important. Le important est que notre pays aille globalement et pour longtemps dans le bons sens.

Et pour moi, François Hollande nous propose une politique qui répond à cette attente.

P.S : pour d’autres sujets, comme la réforme des retraites ou le nucléaire, j’ai déjà écrit des billets à ce sujet :

UNE CHANCE AU GRATTAGE, UN PEU MOINS AU TIRAGE

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sondageMon dieu, les courbes se croisent ! La droite reprend espoir, Nicolas Sarkozy reprend sa marche en avant que rien ne va arrêter et qui va le conduire tout droit à un nouveau mandat… ou pas. Comme la campagne intéresse de moins en moins les Français semble-t-il, il fallait bien essayer de lui redonner un peu de suspense. Pour ça les médias s’en donnent à cœur joie pour faire mousser un non-évènement.

Que le score de Nicolas Sarkozy au premier tour s’améliore, c’est relativement logique. Déjà parce que les « petits » candidats le plus à même de lui piquer des voix sont tous sortis de la course les uns après les autres. Une Boutin ou maintenant un De Villepin faisaient peut-être rire avec avec leur score compris entre 0 et 2%, mais c’est comme ça que l’on passe de 25 à 27% au premier tour. Et puis, le président sortant n’avait aucune chance de réellement progresser tant qu’il n’était pas pleinement candidat, ce qu’il est désormais.

Reste le problème du deuxième tour qui est, rappelons-le, a priori le seul susceptible de désigner le futur Président de la République. Et là, les choses restent très compliquées pour Nicolas Sarkozy. Le dernier sondage en date donne encore un score de 55-45 en faveur de Hollande. Bien sûr, il y a moins de deux mois, on était à 60-40. Le président sortant progresse, c’est incontestable. Cependant, personne n’a jamais imaginé sérieusement que l’élection se jouerait avec 20 points d’écart. Ce mouvement était inexorable et même si les Socialistes pouvaient espérer qu’il soit le plus tardif possible, ils savaient bien qu’il finirait par se produire.

Cependant, le temps presse pour Nicolas Sarkozy. Surtout que la campagne va désormais changer de visage avec l’instauration de l’égalité du temps de parole. Il ne pourra plus envahir la télévision et bénéficiera de la même exposition que Jacques Cheminade. Cependant, un mois avant le premier et un mois et demi avant le second laissent encore le temps pour que beaucoup de choses se passent… Au moins en théorie, car jamais dans l’histoire un tel écart a pu être ainsi remonté sur une si courte période. On cite souvent l’inversion de tendance entre Chirac et Balladur en 1995. Je peux en témoigner, car, à cette époque, j’étais au Kenya pour 15 jours et quand nous sommes rentrés, le paysage avait changé de manière brutale et inattendue. Mais il s’agissait là de deux champions du même camp. Il ne s’agissait pas de convaincre des électeurs de passer du blanc au noir.

François Hollande reste donc de très loin le mieux placé pour l’emporter. Il subit simplement aujourd’hui les désagréments d’être parti le premier, ce qui a longtemps constitué un avantage mais qui forcément implique une descente sur le long terme. Il part de si haut qu’on a du mal à l’imagine finir sa course sous les 50%.

Mais l’élection de Sarkozy en 2007 avait prouvé une chose. Si le pire n’est jamais sûr, il n’est jamais impossible…

LES LIMITES DE LA VALEUR TRAVAIL

impots75

impots75La proposition de François Hollande de taxer les revenus supérieurs à 1 000 000 euros annuels a fait couler beaucoup d’encre. C’était d’ailleurs le but, avouons-le, mais c’est le jeu de la campagne. La droite dénonce une mesure démagogique, la gauche parle pudiquement de mesure symbolique. Il s’agit tout simplement d’une question hautement politique et il regrettable que ce terme prenne alors une connotation négative. Car cela signifie en fait tout simplement, qu’au-delà de son efficacité technique, cette proposition soulève tout un tas de débats de fond sur le modèle de société que l’on souhaite. Et il serait dommage de passer à côté.

Un des enseignements de cette mesure peut sembler le plus anecdotique, mais ne l’est pas tant que ça. Ceux qui ont eu l’occasion de débattre de la question autour d’eux ont eu l’occasion de s’apercevoir que beaucoup de contribuables ignorent totalement comment est calculé leur impôt sur le revenu. C’est quand même assez embêtant, alors que la fiscalité est un des grands thèmes de cette campagne électorale. Non, François Hollande ne veut pas taxer à 75% l’ensemble du salaire de ceux qui gagnent plus de 1 000 000 euros par an. Il veut taxer à 75% ce qui est gagné au-delà de   1 000 000 euros par an.

En fait, il y a deux niveaux dans le débat. Un aspect moral et un aspect technique. Le premier est évidemment sujet à d’infinies discussions puisque totalement subjectif. En fait, ce n’est pas tant les montants des très hautes rémunérations qui est choquante, mais leur croissance à deux chiffres chaque année, même en période de crise. L’économie va mal, mais pas les salaires des grands patrons. Du coup, il est difficile d’admettre le fameux « oui mais vous comprenez, cet argent, ils le méritent, ils ont de lourdes responsabilités, ils font marcher l’économie…».

Ce n’est peut-être qu’un point de vue personnel, mais pour moi, la notion de responsabilité fonctionne dans les deux sens ; quand ça va bien et quand ça va mal. Donc s’augmenter en temps de crise n’est vraiment pas la démonstration de responsabilités assumées. C’est seulement la preuve que ces niveaux de rémunération n’ont tout simplement aucune signification objective, aucune relation avec l’économie réelle, la compétence, le talent ou la réussite, mais simplement le résultat d’un pouvoir économique hors de tout contrôle et aux mains d’une oligarchie qui ne rend plus de comptes.

Reste l’argument du « oui mais les riches font marcher l’économie ». En voilà, une maxime de bon sens qui jusqu’à preuve du contraire… n’a jamais été prouvé par quoi que ce soit. Au contraire, les contre-exemples sont désespérément nombreux. Les pires dictatures où la misère règne en maître ne manquent jamais d’immenses fortunes. Et sans aller jusque là, l’impact négatif des inégalités salariales sur l’économie est assez simple à comprendre. En effet, elles ne tirent vers le haut aucun des deux moteurs de l’économie que sont l’investissement et la consommation.

tvaparrevenuMais pourtant les riches consomment plus que les pauvres… C’est du bon sens, c’est mathématique… C’est vrai en valeur absolue, sauf que si on regarde la part des hauts revenus consacrée à la consommation, on voit qu’elle est bien inférieure à celle des ménages les plus modestes. On peut le voir sur ce graphique qui montre le poids de la TVA, et donc de la consommation, dans le budget des ménages. Et encore, cet indicateur minimise le phénomène puisque les produits de première nécessité, qui pèsent plus dans le budget des plus modestes, bénéficient d’une TVA très réduite. Quoiqu’il en soit, si vous avez 1 million d’euros à distribuer, vous stimulerez plus la consommation en donnant 1 000 euros à 1 000 bénéficiaires des minima sociaux, que 1 000 000 à un PDG.

Reste l’investissement… Parce que bon, le bénéficiaire des minima sociaux, il n’investit pas quand le riche fait travailler des dizaines, des milliers des salariés. C’est en partie vrai, mais il est bon de regarder d’où vient l’argent de ces supers riches. Je vais me permettre un petit moment de narcissisme et je vais m’auto-citer en reprenant ce que j’ai écrit dans un billet que j’ai écrit le 24 octobre 2010 : Sachez que depuis 2005 (c’est à dire avant et après la crise), le montant des dividendes distribuées aux actionnaires par les entreprises françaises a dépassé leur résultat comptable (sauf en 2007). C’est à dire que les entreprises s’endettent pour continuer à rémunérer leurs actionnaires. Cette situation est évidemment intenable à moyen terme. Mais le plus grave est que cela se traduit mécaniquement par un sous-investissement. Or, l’investissement, c’est le progrès, l’emploi, l’avenir… Je ne citais alors que la rémunération actionnaires, mais le salaires des patrons du CAC 40, particulièrement concernés par le taux à 75%, qui s’augmentent alors que l’économie stagne contribue elle aussi évidemment à ce sous-investissement.

Mais alors si les très haut revenus ne servent ni la consommation, ni l’investissement, ni la croissance, où va l’argent ? Il vient les inonder les marchés financiers et la spéculation, dont l’efficacité et l’apport à l’économie réelle est difficilement défendable depuis la dernière crise. On est là face à un système de vampirisation dont certaines rémunérations constituent un des aspects. Etre payé plusieurs millions d’euros par an, c’est être payé au-delà de la richesse que l’on contribue à créer. Ca ne s’appelle pas du vol, puisque c’est légal, mais l’outil fiscal est tout à fait dans son rôle s’il contribue à compenser cette injustice flagrante.

La nouvelle tranche d’imposition proposée par François Hollande n’est donc pas que moralement juste, elle est aussi économiquement rationnelle. Les seules limites qui n’existent pas sont celles que l’on refuse de poser. Les citoyens sont en droit de poser le principe d’une limite quant à la valeur que l’on peut donner au travail d’un homme, qui est forcément subjective, et non totalement rationnelle, comme voudrait faire croire les ayatollah du marché.

Espérons qu’ils en useront dans 70 jours.

AGRICULTURE : SMALL IS NOT ALWAYS BEAUTIFUL

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siaSalon oblige, voici que tous les candidats aux prochaines élections présidentielles ne parlent plus que d’agriculture. Ah bah voilà un sujet que j’ai la prétention de connaître, puisque c’est un peu le domaine dans lequel je travaille. Pour preuve, j’ai toujours des bottes dans le coffre de ma voiture, parce que parfois, la terre, ça colle. Cela fait dire aussi beaucoup de conneries.

S’il y a bien une chose que m’ont apportée mes études d’ingénieur agronome, c’est bien la prise de conscience que les médias relayent un certain nombre d’inepties, trouvant échos dans l’opinion. Ou alors, c’est le contraire, je ne sais pas trop. Ce qui m’inquiète vraiment, c’est qu’il n’y a pas de raison que ce phénomène soit uniquement limité à l’agriculture, ce qui me fait sérieusement douter de la fiabilité des informations que l’on peut trouver et surtout de mes propres croyances. Mais ceci est un autre débat.

Revenons à nos vaches, cochons, couvées. En tant qu’expert dans le domaine de l’agriculture (enfin paraît-il, si j’en crois certaines invitations professionnelles), je dois avouer qu’aucun des candidats n’a apporté le moindre début d’une analyse précise et pertinente, ou même d’une simple réelle connaissance du sujet. En tout cas, rien qui soit à la mesure de la complexité des questions agricoles, qui ne peuvent se régler avec deux trois idées qui flottent dans l’air du temps. Cela illustre aussi à quel point on peut faire passer une contre-vérité pour du simple bon sens.

Je ne prendrai qu’un seul exemple : le culte que semble vouer les élus pour les « petites exploitations ». Bah oui, parce que les « gros », c’est rien que des méchants qui s’enrichissent sur le dos du système et qui ne font rien qu’à polluer. Ils sont le symbole d’une agriculture productiviste, peu soucieuse de la nature, du goût et de la santé du consommateur, mais uniquement du profit. Alors que le paysan à la surface modeste traite la terre avec respect, vous vend des produits sains et défend des valeurs autrement plus respectables que l’argent.

Evidemment, tout cela est totalement caricatural. Pire, cela est souvent complètement faux. Pour le premier reproche, c’est à dire l’enrichissement par le système, si le raccourci est facile, il y a un fond de vérité. Voilà un domaine, le contrôle des structures, dont j’ai été un acteur, et il est incontestable que la Politique Agricole Commune, malgré quelques évolutions, apportent une rente de situation qui profite à ceux qui gagnent déjà très bien leur vie, à qui ont donne ainsi encore plus de facilité pour s’agrandir et accroitre leur patrimoine et leurs revenus.

Par contre, il est absolument faux de penser qu’il est logique qu’un petit agriculteur va polluer moins qu’un gros. C’est même exactement l’inverse. Si vous ne cultivez que 100 hectares, vous devrez, pour avoir un revenu convenable, tirer le maximum de profit de la moindre parcelle de terre et vous serez condamné à une agriculture la plus intensive possible. Mais le bio alors ? Effectivement, le bio rompt avec cette logique… en vous proposant des produits plus chers. J’y reviendrai.

Par contre, si vous exploitez 300 hectares, vous aurez énormément plus de latitude dans vos choix économiques et techniques. Les économies d’échelle pourront constituer des leviers puissants qui vous autoriseront à opter pour une agriculture plus extensive, c’est à dire moins polluante. Je pourrais rentrer dans de longues explications techniques, mais il faut simplement garder à l’esprit, que plus le tracteur est gros, moins il pollue. Ca paraît contre-intuitif, mais c’est en fait logique. Un tracteur plus puissant vous permettra avec le même litre de gasoil de cultiver une surface plus importante et donc de faire pousser une quantité plus importante de blé. Au final, le grain de blé qui a poussé chez l’agriculteur à 300 hectares aura généré moins de pollution et de pression sur les écosystèmes que celui qui pousse chez l’agriculteur à 100 hectares.

Comme je l’ai dit, reste le cas de l’agriculture biologique. On le sait, se situer dans cette logique augmente les coûts de production. C’est d’ailleurs tout à fait logique. En effet, l’agriculteur biologique augmente la quantité de main d’œuvre à l’hectare et nécessite le plus souvent un matériel spécifique qui est plus cher que le matériel classique. L’agriculture biologique demande donc des investissements plus importants. Et d’ailleurs, toute amélioration des techniques culturales pour les rendre plus écologiquement efficientes demandent des investissements parfois très lourds. Mais qui possède le plus de moyens d’investir, l’agriculteur à 100 hectares qui se démène déjà pour dégager un maigre revenu ou celui à 300 hectares qui dégagent lui de confortables marges ?

Mais voilà, la réponse à cette question complexifie considérablement les problèmes agricoles. Car il existe bien d’autres raisons valables de promouvoir une agriculture de petites exploitations : l’emploi, le lien social avec la population locale, le dynamisme des zones rurales profondes… Mais pour ce qui est de la pollution, c’est le modèle à grosses exploitations qui est le plus efficace pour à la fois diminuer l’impact de l’agriculture sur l’environnement et proposer des produits de qualité à des prix accessibles pour les classes sociales le plus modestes. Vouloir à la fois de l’agriculture biologique et des petites exploitations, la condamne à rester cher et limite donc sa diffusion et son développement. C’est emmerdant, mais c’est comme ça. Et ça ne sert à rien de tomber dans le déni de réalité généralisé en cours actuellement dans les discours de beaucoup d’acteurs politiques ou de la société civile.

Je n’ai aucunement l’intention ici d’affirmer qu’il faut promouvoir une agriculture qui ne compterait plus que des exploitants cultivant des surfaces toujours plus importantes. Simplement, les arbitrages doivent être rendus en ne se voilant pas la face, sinon les politiques qui en sortiront engloutiront des sommes colossales pour n’atteindre au final que très partiellement les objectifs initiaux. Mon expérience professionnelle me montre chaque jour que c’est malheureusement exactement ce qui est en train de se passer.

Et les débats actuels tendent à me faire penser que ce n’est pas prêt de changer. En attendant, il y a de quoi être inquiet pour l’environnement. Et sûrement dans bien d’autres domaines auxquels je ne connais rien…

LA MEDIOCRITE INTELLECTUELLE AU POUVOIR

sarkoallegre

sarkoallegreNicolas Sarkozy est certainement très content de lui. Je suis persuadé qu’il y a en lui une jubilation quelque peu enfantine, que l’on pourrait aisément qualifiée de mesquine. L’arrivée de Claude Allègre dans son équipe de campagne est sûrement pour lui la preuve de sa supériorité sur son adversaire, qui ne compte pas auprès de lui d’anciens ministres du camp d’en face. Mais s’il est content de lui, pas sûr qu’il tire le moindre bénéfice électoral.

Ce ralliement, très certainement recherché par le chef de l’Etat, montre bien à quel point il pousse loin la médiocrité intellectuelle. On avait raillé le soir de son élection les « artistes » qui l’entouraient : Faudel, Mireille Matthieu… On n’a pu se moquer des ministres qui ne devaient leur nomination à des postes à si hautes responsabilités qu’à leurs qualités de courtisans : Luc Chatel, Laurent Wauquiez et l’inénarrable Nadine Morano. Ce manque de discernement et de prise de hauteur est tout à fait symbolique du quinquennat qui vient de s’achever.

Nicolas Sarkozy est donc soutenu par deux anciens ministres de gauche : Claude Allègre et Bernard Tapie. Bon, déjà ce n’est guère une surprise puisque ces deux là avaient déjà retourné leur veste en 2007. La prise de responsabilités de l’ancien ministre de l’éducation montre bien que ce cirage de bottes peut finir par payer et ne doutons pas qu’il y a derrière tout ça un rêve (une promesse ?) de retour au gouvernement, en cas de victoire du Président sortant. Mais bon soyons sérieux. Ni l’un, ni l’autre ne sont des modèles de probité et de pertinence intellectuelle.

La présence de Claude Allègre, négationniste de l’origine humaine du réchauffement climatique, aux côtés de Sarkozy sonne même comme une provocation. On peut en rire, tellement tout cela semble ridicule. On pourrait y voir là un mépris de la droite sur les questions environnementales. Mais il ne faut même pas pousser le raisonnement aussi loin. Le calcul est avant tout politique et seul son statut d’ancien ministre de Lionel Jospin vaut au géophysicien son entrée dans l’équipe de campagne. Les idées, la pertinence face aux graves problèmes que notre pays, et pour le coup l’humanité entière, affrontent, la compétence, rien de tout cela ne rentre en ligne de compte. Et c’est particulièrement désolant, pour ne pas dire inquiétant.

Cela en dit long surtout sur le degré de convictions de tout ce joli petit monde. Faire de Nathalie Kosciusko-Morizet, censée incarner la sensibilité écologiste de l’UMP, le parte parole de la campagne, tout en faisant entrer Claude Allègre dans l’équipe qui doit la mener, montre bien que seuls importe l’assurance d’avoir un poste dans le futur gouvernement, qu’importe ce qu’on y fera. Mais le plus incroyable est de penser que Sarkozy et son équipe pensent « l’arrivée de Claude Allègue dans notre équipe va nous faire gagner des voix ». Ont-il perdu à ce point le sens de réalité ou bien est-ce encore une fois une manœuvre de désespoir devant une défaite de plus en plus inexorable ?

Place au ridicule politique, les problèmes de la planète attendront.

LE TRAVAIL DE GAUCHE A DROITE

travail

travailLe travail, c’est la santé, clame la droite. Ne rien faire c’est la conserver, lui répond la gauche ? Pas du tout ! Hier à Rouen, à l’occasion de son deuxième grand meeting de campagne, François Hollande a lui aussi placé le travail au rang des valeurs qu’il entend défendre. Au moins, Nicolas Sarkozy et lui sont d’accord sur quelque chose. Enfin au moins sur les mots, parce que lorsque l’on creuse, on voit bien que les positions sont très divergentes.

Il est vrai que pendant près d’un siècle et demi, la gauche s’est surtout construite sur la libération du « travailleur » de l’aliénation représentée par le travail. Le prolétaire, l’ouvrier formait le gros de ses troupes, avec comme bras armé les syndicats. Aujourd’hui, tout cela a bien sûr volé en éclats. Les frontières sont devenues floues. Un cadre de haut niveau est un employé, mais ne s’apparenterait-il pas plutôt au patronat du 19ème siècle ? Quand on parle du patronat, désigne-t-on les PDG ou les actionnaires ? Bref, le blanc contre noir qui a présidé le vocabulaire de gauche ne peut plus aboutir à un discours cohérent. L’appropriation par François Hollande de la valeur travail montre bien que les choses ont profondément changé à ce niveau-là.

Si on schématise, le travail est un droit pour la gauche, un devoir pour la droite. C’est assez caricatural, mais cela montre bien comment les deux camps abordent la même problématique par des côtés complètement opposés. Contre le syndicalisme de gauche, la droite s’est nourrie au cours de son histoire de l’union de deux catégories sociales.

D’un côté, les propriétaires du capital. Ils attachent évidemment une grande importance à la valeur travail, puisque c’est le travail qui leur permet de gagner de l’argent… sans eux-même travailler. Comme cette catégorie sociale ne peut assumer pleinement cette oisiveté pour dénoncer celle des autres, elle utilise deux stratagèmes. Tout d’abord, elle explique le plus souvent que ce capital est la récompense d’un dur labeur passé. Bref qu’elle mérite ! Sauf que l’héritage existant, ces efforts ont parfois été consentis un siècle plus tôt par un lointain ancêtre. On se retrouve face à des dynasties rentières où la notion de mérite a disparu depuis longtemps pour se laisser porter par l’adage que « l’argent va à l’argent ». Ensuite, elle essaye de monter ceux qui pourraient se retourner contre elle contre d’autres. Les étrangers ou les assistés, c’est au choix. On est là au cœur de l’idéologie de droite, donc Nicolas Sarkozy a été un de plus beaux instigateurs. Je mets le travail en avant, mais je commence par baisser la fiscalité des rentiers. Beau paradoxe révélateur !

De l’autre, ceux qu’on qualifient d’indépendants. Les commerçants, artisans et autres professions libérales. Le discours est ici beaucoup plus sincère. Pour la plupart, ils exercent des métiers difficiles, au moins en termes d’horaires et pour une rémunération parfois incertaine. Ils ne jouissent que de très peu de protection sociale et la liberté d’être son propre patron trouve vite ses limites quand on travaille 6 jours sur 7 et 12h par jour. Ils ressentent un sentiment d’injustice vis-à-vis d’un salariat qu’il considère comme privilégié, sans parler des bénéficiaires des minimas sociaux. Du coup, le propriétaires du capital trouvent ici un allié de circonstance, dont il flatte d’autant plus le mérité que parfois la frontière entre les deux groupes est floue : un artisan possède le capital, même modeste, de son entreprise et peut avoir des salariés. Mais l’un travaille dur, l’autre pas. Mais ce dernier arrive bien à le faire oublier.

Comment la gauche peut-elle alors se positionner ? Vis-à-vis du premier groupe, il semble difficile d’éviter le conflit. Pourtant, il est parfois bon de lui rappeler que tout cela, en un mot l’économie de marché, ne fonctionne que parce qu’il y a des clients en bout de chaîne. Et ces derniers se comptent même parmi ceux qu’ils désignent comme des assistés. Même l’agriculteur céréalier le plus réactionnaire ne cherchera pas à empêcher un RMIste de lui acheter son pain. Personne n’a intérêt à la précarisation d’une large majorité de la population, ce qui a un impact négatif sur l’ensemble de l’économie… et donc a fortiori sur les plus riches. Ces derniers se sont parfois entièrement réfugiés dans la finance, mais la crise de 2008 a bien montré que l’économie réelle finit toujours par les rattraper.

Mais si la gauche doit vraiment réellement effectuer une mutation indispensable, c’est en apprenant à parler au second groupe. Et là, François Hollande apporte une vraie nouveauté, même si Ségolène Royal avait déjà amorcé le virage. En insistant autant sur les PME, il fait déjà un choix pertinent d’un point de vue économique. Mais politiquement, il s’attaque à un public qui a beaucoup moins de raisons de voter à droite que les actionnaires des multinationales. Il sort de ce discours anti-patronat qui englobe tout et n’importe quoi. Il était temps !

Cependant, espérons qu’en réalisant ce changement de discours, la gauche n’oublie pas une chose. Le travail restera toujours un facteur d’aliénation pour une large part de la population. Tout le monde ne s’épanouit pas dans son travail. Il restera toujours des tâches ingrates, engendrant au mieux ennui, au pire souffrance. De manière générale, Le travail n’est de toute façon pas une fin en soi. La réduction du temps de travail est une tendance lourde de l’humanité depuis plusieurs siècles. Et c’est tant mieux ! Cela s’appelle tout simplement le progrès et il serait regrettable que la gauche perde sa foi dans cette notion.

Enfin, espérons que l’électeur ne confonde pas la valeur travail avec la valeur du travail, c’est à dire le salaire. Car à une époque où augmenter les salaires est presque devenu un gros mot, il ne faut pas oublier qu’on continue chaque année à être plus productif, à produire globalement plus de richesses. Le partage de cette valeur ajoutée doit être au centre des débats car voilà un domaine où le clivage gauche-droite à encore tout son sens.

Et après dix ans d’explosion des inégalités provoquée par la droite, se traduisant par une stagnation de l’économie, il est temps d’amorcer un virage à 90° !

UN CARTON ROUGE MERITE MAIS TARDIF

christianvanneste

christianvannesteA force de flirter avec la ligne blanche, Christian Vanneste a fini par passer définitivement du côté obscur de la Force. C’est d’ailleurs un vrai prodige qu’il vient de réaliser, car on pensait que l’UMP de Claude Guéant n’aurait plus honte de quoi que ce soit. Mais le révisionnisme reste encore un tabou absolu dans la politique française et on ne peut que s’en réjouir. La droite nous prouve qu’elle pouvait encore s’indigner, alors qu’on commençait à en douter.

Mais cela ne doit évidemment pas faire oublier le lent glissement du parti du Président vers l’extrême-droite. Christian Vanneste a toujours milité pour une alliance entre l’UMP et le FN et il a du croire que certains propos lui donnaient carte blanche pour nous livrer toutes ses idées les plus indignes. On n’avait plus trop de doute sur les véritables convictions du personnage, cette fois même son propre camp est obligé de le mettre au ban. Non qu’ils soient tous foncièrement en désaccord malheureusement, mais certains savent quand même avancer leur pions avec plus de subtilité.

On peut légitimement poser la question du pourquoi avoir attendu aussi longtemps. En effet, ce débordement de Christian Vanneste n’est pas simplement un débordement, mais un énième débordement. Mais il pose une question plus large qui concerne l’ensemble des formations politiques. Que faire de leurs membres qui se livrent à ce genre de propos scandaleux ? Le PS a eu son George Frêche et, si elle a fini par l’exclure, cela ne fut ni facile, ni immédiat. Il est navrant de voir qu’il faut attendre le mot de trop pour voir ceux dont les convictions sont évidentes et contraires aux valeurs qu’ils sont censés défendre être renvoyés de leur parti.

Si ce n’est pas si simple, c’est tout simplement qu’un Frêche ou un Vanneste ont quelque chose en commun. La légitimité des urnes. On peut le regretter, mais dans notre système démocratique, elle reste celle qui compte en dernier ressort. Espérons tout de même que les électeurs du Nord sauront la retirer définitivement à ce triste sire.

LES DERNIERES CARTES

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nicolassarkozy2La mascarade va bientôt cesser. Nicolas Sarkozy n’attendra pas début mars, comme initialement prévu, mais devrait se déclarer candidat dès la semaine prochaine. A la fois, s’il y a une seule personne qui a encore un doute sur sa candidature, soit c’est un génie visionnaire, soit il devrait consulter. Bref, son premier tract de campagne vient de sortir. Il s’appelle Figaro Magazine.

Depuis plusieurs mois, le Président et son équipe ont tout essayé pour remonter dans l’opinion, mais rien n’y fait. François Hollande continue d’être donné gagnant à 60% et si rien ne change dans les trois semaines qui viennent, ce score risque fort d’être définitif. Il faut donc réagir, même si les vacances qui commencent ne vont pas lui faciliter la tâche. En effet, quand on regarde le calendrier de près, le temps est de plus en plus compté. Cette accélération du planning est donc tout à fait compréhensible.

Mais ce temps limité fait aussi que le candidat Sarkozy n’aura pas beaucoup de cartes à jouer. Il ne faudra donc pas se tromper et frapper juste et rapidement. Cependant, un discours très polarisé constitue une vraie prise de risque. C’est tout ou rien. Certes, le flou n’est pas une tactique très efficace, mais tomber à côté signifie perdre toute chance au moment du sprint final.

L’interview dans le Figaro donne le ton. Faute de pouvoir convaincre par des propositions concrètes, sa dernière intervention télévisée le prouve, il va donc tenter d’amener la campagne sur le terrain des « valeurs ». Travail, famille,… bon on n’ose plus dire patrie, mais le discours ressemble un peu à ça. Il se rapproche surtout d’une frange de la droite qui ne tire pas vraiment vers le centre, c’est le moins que l’on puisse dire. Conjuguée à la dernière sortie de Claude Guéant, on voit bien comment l’UMP essaye de se concentrer sur des thèmes qui vont plaire à son électorat et sur lesquels la gauche ne pourra les suivre (et c’est tant mieux!).

Cependant, le problème pour Nicolas Sarkozy est qu’on ne gagne pas une élection présidentielle avec son seul électorat. Il l’a parfaitement compris en 2007 et c’est d’ailleurs une des raisons de sa victoire, quand son adversaire dépensait une énergie folle à convaincre son propre camp. Plus pragmatiquement, l’UMP semble tout miser sur le premier tour. Faire le score le plus proche possible de celui de François Hollande, voire même le dépasser, en mobilisant au maximum son électorat, semble constituer sa seule chance. Il compte en effet sur l’avantage de celui qui est en tête et qui a tendance à attirer les voix des vrais indécis. Cependant, si l’écart au premier tour est moins abyssal dans les sondages, il reste encore beaucoup de chemin à parcourir. A moins que Marine le Pen ne puisse se présenter… On peut vraiment soupçonner l’UMP de vraiment chercher cette fois-ci que le FN soit absent, malgré tous les beaux discours sur la démocratie.

Cette tactique est extrêmement risquée car elle pourrait figer définitivement la campagne dans un affrontement entre deux visions radicalement opposées. Or, le rapport de force actuel n’est absolument pas en faveur de Nicolas Sarkozy. La proposition d’organiser des référendums, au-delà de leur caractère ridicule et irréalisable (les sujets évoqués ne peuvent pas être raisonnablement tranchés par un simple oui ou non), montre bien comment il cherche avant tout à convaincre ses propres électeurs. Qui a envie d’un référendum sur l’indemnisation des chômeurs à part ceux qui veulent la restreindre ?

On est donc face à un candidat qui ne peut plus que miser sur un coup de poker. Mais vu le jeu qu’il a en main, il ne pourra compter que sur le bluff pour l’emporter. Un tactique qui permet peut-être de remporter quelques parties. Mais un titre prestigieux, c’est moins sûr…

LE POIDS DES MOTS

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claudegueantCe soir, au 20h de France 2, lorsque l’on a interrogé Rachida Dati sur les propos polémiques de Claude Guéant, elle a commencé sa réponse par « Les Socialistes… ». On se demande vraiment ce que ces derniers venaient faire là. Cependant, cela venait en échos de « contrairement à la gauche,… » qui avait introduit les propos du Ministre de l’Intérieur. C’est bien la preuve que contrairement à ce qu’il a déclaré, il y a bien un calcul politique derrière tout ça. Surtout quand on connaît le public devant lequel ces propos ont été tenus, l’UNI, syndicat étudiant, qualifié pudiquement par les médias de « très à droite ».

Il y a dans les mots employés par Claude Géant une ambiguïté volontaire visant à brouiller les cartes. Car si on s’en tient à la deuxième partie de sa déclaration, on peut y voir la défense d’un modèle démocratique, humaniste, respectant la dignité des individus et l’égalité des sexes. Mais les termes « supérieures » et surtout « civilisation » cachent un sens beaucoup plus lourd et totalement abject.

Claude Guéant n’a pas dénoncé des modèles sociétaux inacceptables. Il a créé une échelle de valeur, sur laquelle il place l’Occident tout en haut. Peut-être que d’autres modèles sont, dans son esprit, tout aussi valables, mais cela n’a rien d’évident. La notion de supériorité renvoie surtout à des idéologies nauséabondes et cet emploi de vocabulaire n’a peut-être rien d’innocent. Il parle aux instincts les plus bas d’une partie de son électorat… et d’un électorat qu’il aimerait visiblement récupérer.

Enfin, le mot civilisation est sans doute ce qui fait définitivement basculé son propos dans l’inacceptable. En effet, il n’a pas parlé de régime politique ou de gouvernement. Il a employé un terme qui recouvre quelque chose de beaucoup plus large : la culture, l’art, le mode de vie, la langue, une certaine façon de penser… Une civilisation s’inscrit dans le temps et ne concerne pas que des élites au pouvoir, mais l’ensemble d’une population. Et là, on voit très bien ce à quoi son propos cherche à faire implicitement référence. Il est évident qu’il évoquait l’islam et le monde musulman.

Un discours contient ce que l’on dit clairement, explicitement. Puis, il y a les sous-entendus, les non-dits. Ces derniers seront plus ou moins bien perçus selon son auditoire. En prononçant son discours devant des membres de l’UNI, Claude Guéant savait très bien ce qu’ils allaient comprendre derrière ses propos. Maintenant qu’il l’assume et dise le fond de sa pensée au grand jour ! Mais c’est un pas qu’il n’ose pas encore franchir…

…mais il n’en pense pas moins !

FRONTIERE OBJECTIVEMENT SUBJECTIVE… OU L’INVERSE ?

frontieres

frontieresParmi les nouvelles anecdotiques mais qui se font une place dans les journaux, il y a eu aujourd’hui l’histoire de ce maire renvoyé en correctionnelle après avoir giflé un adolescent qui l’avait insulté. On a beaucoup débattu, beaucoup discuté pour savoir si, vraiment, la justice avait besoin de se mêler de cette histoire finalement assez anodine. Après tout une bonne paire de claques n’a jamais tué personne, surtout pas les petits cons. Cette histoire m’a pourtant amené à une réflexion plus large.

Une loi est une loi. Un coup est un coup. Or, donner des coups est puni par la loi. Je crois que personne ne voudrait que ce principe assez simple soit remis en cause. Simplement, nous sommes dans le cas d’un « oui, mais… » ou ce qui suit le mais est tellement long qu’il s’apparente à un nom à un non. Simplement, on n’écrit pas les lois de cette façon. Elles doivent tracer des lignes blanches dont le franchissement constitue une infraction. Après qu’on la franchisse un peu, beaucoup, passionnément ou à la folie, cela ne remet pas en cause la réalité de l’infraction.

En fait, cela pose le problème des frontières. Non, je ne veux pas parler d’immigration. Simplement de toutes les situations où l’on doit fixer une limite, une barrière, un seuil, un maximum, un minimum, appelons ça comme l’on veut. Et dans tous les cas, se pose la question du statut des éléments qui se situent juste à proximité, mais du mauvais côté, de cette ligne imaginaire.

Prenons deux exemples. Personnellement, je travaille sur des problèmes d’aménagement du territoire ou de développement territorial. Si les territoires administratifs ont des frontières bien définies, les « territoires de projet » n’en ont pas de facto, il faut les définir. Je travaille notamment sur un programme qui pousse à recycler localement les déchets. Il a fallu faire un bilan chiffré des entrées et des sorties du territoire que l’on avait défini, le but étant, à terme, de diminuer leur importance. Cela peut paraître un critère simple et objectif pour juger les priorités. Cependant, si on y réfléchit, il n’est peut-être pas plus urgent de traiter le problème relatif à 500 tonnes d’un déchet qui part à 10km de la frontière arbitraire que l’on s’est fixé que 50 t qui partent à l’autre bout du monde. Une solution simple pourrait être de reculer la frontière que l’on s’est fixé de 10km… sauf que l’on retrouvera exactement les mêmes problèmes à la nouvelle frontière. De proche en proche, on finirait par englober le monde entier et on perdrait totalement la notion du local qui présidait le projet de départ.

L’autre exemple concerne tous les automobilistes qui en recevant leur PV se plaignent de payer une amende, alors qu’ils n’ont dépassé la vitesse autorisée que d’un seul kilomètre/heure. Cependant, si on considère, par exemple, que, pour une limitation à 50km/h, on ne sanctionne pas jusqu’à 55km/h (on ne tient pas compte ici des tolérances dues à l’imprécision des mesures), la vitesse maximum autorisée devient de fait 55km/h, et non plus 50 km/h. Et donc, l’automobiliste sanctionné à 56km/h se plaindra à son tour et tout recommencera.

Les frontières imposées par toute règle objective constituent-elles donc une difficulté insurmontable ? Non bien sûr. Pour y arriver, il faut tout simplement un peu de bon sens, de souplesse, de jugement et de discernement. Autant de notions qui semblent extrêmement positives. Sauf qu’elles impliquent forcément une forme d’arbitraire… Bref pour que l’objectivité fonctionne totalement, il faut un peu de subjectivité…

Joli paradoxe…