DANS UN JARDIN QU’ON DIRAIT ETERNEL : L’heure du thé

dansunjardinquondiraiteternelafficheTous ceux qui s’intéressent de près ou de loin au Japon ont entendu parler de la cérémonie du thé. Mais seuls ceux qui ont un vraie connaissance des traditions nippones savent réellement ce que cela signifie. J’avoue que je faisais partie des ignorants en la matière. Enfin avant de voir Dans un Jardin qu’on Dirait Éternel. Un film qui nous fait découvrir en profondeur ce pan de la culture japonaise, qui semble hors du temps, mais qui nous permet malgré tout à mieux comprendre le Japon contemporain. Évidemment, il vaut mieux s’intéresser un minimum au sujet pour apprécier ce film.

Si vous cherchez ne serait-ce qu’un minimum d’action, alors il vaut mieux peut-être éviter Dans un Jardin qu’on Dirait Éternel. Le film s’avère relativement contemplatif, à l’image d’une tradition qui cherche à créer une parfaite harmonie. Le film prend vraiment le temps d’explorer toutes les facettes de cette fameuse cérémonie à travers le parcours initiatique d’une jeune femme… sur plusieurs dizaines d’années. On se rend compte ainsi de toute la complexité d’un sujet dont on n’imaginait pas forcément faire un film. On en ressort moins ignorant, ce qui peut être un vrai plaisir pour ceux qui font preuve d’une curiosité envers le Japon et ses mystères. Les autres peuvent s’ennuyer ferme, il faut bien l’admettre.

dansunjardinquondiraiteternelDans un Jardin qu’on Dirait Eternel est un film authentiquement japonais. Déjà du fait de son sujet, mais aussi dans la forme. Là aussi, certains pourront voir poindre l’ennui. D’autres seront ravis de se faire bercer par le rythme lent et paisible d’un art de la narration qui ressemble au final d’assez près à l’art de préparer un thé dans le respect des traditions. Le film doit aussi beaucoup à Haru Kuroki. Déjà parce qu’elle est l’actrice principale de ce film, mais aussi sa narratrice. Le son de sa voix et le rythme de sa diction jouent un rôle important dans l’ambiance générale qui plane sur ce film. Elle est vraiment l’âme. Et par la même occasion, elle incarne aussi l’âme d’un japon éternel.

LA NOTE : 13/20

Réalisation : Tatsushi Ōmori
Scénario : Tatsushi Ōmori d’après l’autobiographie de Noriko Morishita
Photographie : Kenji Maki
Montage : Ryō Hayano
Musique : Hiroko Sebu
Décors : Mitsuo Harada, Genki Horime
Costumes : Masae Miyamoto
Producteurs : Tomomi Yoshimura, Ryuji Kanai, Takahiko Kondo
Durée : 100 minutes

Casting :
Haru Kuroki : Noriko
Kirin Kiki : Professeur Takeda
Mikako Tabe : Michiko
Mayu Harada : Tadoroko
Saya Kawamura : Sanae
Megumi Takizawa : Yumiko
Mizuki Yamashita : Hitomi
Fuyuka Kooriyama : la mère de Noriko
Chihiro Okamoto : le frère cadet de Noriko
Shingo Tsurumi : le père de Noriko
Mayu Tsuruta : Yukino

TENET : Vertige temporel

tenetafficheOn pense parfois que certains concepts ont donné tout ce qu’ils avaient à donner à l’histoire de la fiction. On pense qu’ils ont été exploité tellement souvent que plus rien ne viendra les renouveler profondément. Il existe heureusement dans ce monde des esprits assez géniaux et assez fous pour imaginer ce que personne n’avait encore jamais osé imaginer. Le voyage dans le temps occupe les récits depuis longtemps. Vers le futur, vers le passé, conjecturant encore et encore sur les conséquences d’une telle possibilité. Le terme remonter le temps y était fréquemment employé mais toujours dans le sens : se transporter d’un saut en arrière dans le temps avant de reprendre son cours normal à partir de son point d’arrivée. Personne (ou presque…) n’avait pensé à prendre l’expression de manière littérale, c’est à dire dans le sens de vivre le cours du temps à l’envers… Personne avant un cinéaste de génie… Monsieur Christopher Nolan qui nous a offert Tenet.

Notre perception du temps si profondément ancré dans notre perception de la réalité même que l’on a du mal à accepter que le temps soit autre chose que ce que nous percevons. Tous ceux qui se sont intéressés de prêt ou de loin à la théorie de la relativité le savent bien. Tenet nous offre une expérience tellement contraire à notre manière habituelle de percevoir le temps qu’il est facile de se montrer totalement rétif à cette histoire. Mais si vous acceptez ce point de départ, cette idée simple, celle que peuvent cohabiter des êtres et des objets ne vivant pas le temps dans le même sens, mais aux conséquences vertigineuses et parfois impossibles à appréhender, alors vous vivrez une expérience en tout point extraordinaire. En se laissant simplement porter par l’histoire, en ne cherchant pas à comprendre chaque détail de chaque seconde du film (il faudrait le revoir dix fois pour ça), alors le voyage s’avère merveilleux.

Surtout que Christopher Nolan fait une nouvelle fois preuve d’une incroyable faculté à rendre accessible l’immense complexité dans lequel il cherche à plonger le spectateur. Ici la tâche était trop ardue pour qu’il y parvienne totalement. Mais il conserve l’aspect très pédagogique de ses récits, où il propose plusieurs scènes ne servant qu’à expliquer les concepts qu’il utilise. On peut trouver ça barbant, tant cela ressemble parfois à des cours très théoriques, mais si vous aimez les conférences qui vous emmènent vers des mondes inconnus, vous serez enchantés de recevoir la leçon. Tenet ne se résume heureusement pas à un cours sur la relativité, mais constitue avant tout un film d’aventures haletants, doublés d’un polar où la structure même de l’univers peut-être vue comme l’arme du crime.

tenetTenet bénéficie pleinement de la maestria de Christopher Nolan. Les scènes d’actions sont à couper le souffle, même si, pour la dernière, il se laisse peut-être aller à un peu de cabotinage. Les scènes d’intrigues sont toujours aussi prenantes alors qu’elles pourraient passer juste pour du bavardage. Il maintient constamment le récit, et ainsi le spectateur, sous tension et lui offre régulièrement de quoi en prendre plein les mirettes. On fait face à un cinéaste au sommet de son art, à qui on ne pourra en tout cas jamais reprocher l’absence de prises de risque ou une paresse qui le conduirait à arrêter d’explorer de nouveaux territoires et à repousser les limites du possible en termes de narration.

Tenet est tellement marqué par son réalisateur que l’on aurait tendance à oublier de parler des comédiens ou de tous ceux qui ont travaillé sur ce film. S’il y a un élément qui place ce film un cran plus bas qu’Inception, c’est sans doute son casting. Il est juste très bon, sans être exceptionnellement brillant. On retiendra simplement que Robert Pattinson est définitivement un acteur excellent sur tous les terrains. On saluera aussi la musique de Ludwig Göransson qui est en parfaite harmonie avec le reste du film. Et quand on connaît sa complexité, on devine que la tâche n’avait rien d’évident.

Nous ne savons pas encore où nous emmènera Christopher Nolan la prochaine fois. Mais on a hâte de la suivre, même si c’est pour s’y perdre.

LA NOTE : 16,5/20

Fiche technique :
Production : Warner Bros, Syncopy
Distribution : Warner Bros
Réalisation : Christopher Nolan
Scénario : Christopher Nolan
Montage : Jennifer Lame
Photo : Hoyte Van Hoytema
Décors : Nathan Crowley
Musique : Ludwig Göransson
Durée : 150 min

Casting :
John David Washington : Le protagoniste
Robert Pattinson : Neil
Elizabeth Debicki : Kat
Kenneth Branagh : Andrei Sator
Dimple Kapadia : Priya
Michael Caine : Sir Crosby
Clémense Poésy : Barbara
Aaron Taylor-Johnson : Ives
Himesh Patel : Victor

LES NOUVEAUX MUTANTS : Bienvenue à eux

lesnouveauxmutantsafficheLes films Marvel au cinéma sont parvenus à séduire un public très large en sachant varier les genres. Entre les combats dantesques et cosmiques de Infinity Wars, les blagues potaches de Deadpool ou la fresque crépusculaire comme Logan, il existe de grands écarts. Et pourtant il s’agit toujours de super-héros. En refusant de se prendre totalement au sérieux, cet univers ne s’interdit rien et se trouve prêt à accueillir toutes sortes d’histoires. Avec les Nouveaux Mutants, Marvel s’attaque cette fois-ci au film d’horreur. Pour un résultat plutôt convaincant, même s’il séduira certainement plus les fans de super-héros que ceux de ce genre cinématographique si particulier.

Les Nouveaux Mutants est un film d’horreur qui ne fait pas très peur, soyons honnêtes. Il reprend quelques codes du genre, avec cette histoire d’adolescents enfermés faisant face à une puissance maléfique. Mais on ne dépassera pas le stade du « à la manière de ». Seules les âmes les plus jeunes ou les plus sensibles trembleront réellement devant les péripéties qui attendent les héros. On fait donc plutôt face à un film d’aventures assez efficace pour ne pas s’ennuyer et pour passer un moment tout à fait distrayant. Les amateurs de l’univers Marvel prendront par contre beaucoup de plaisir à voir apparaître à l’écran quelques héros, jouant peut-être en deuxième division, mais pour qui ils ressentent une affection particulière. C’est mon cas, je l’avoue, et cela a sûrement permis un attachement immédiat aux personnages.

lesnouveauxmutantsLes Nouveaux Mutants confirme la capacité des films Marvel à adapter à l’écran de manière convaincante des éléments des comics qui auraient pu être écartés, car prêtant à sourire. Ils choisissent au contraire la fidélité et n’ont pas peur de donner vie à un démon-ours. Les fans des comics les remercient. Les fans de Games of Thrones aussi car ils seront ravis de voir sur grand écran Maisie Williams. Soyons honnêtes, son rôle est ici infiniment moins marquant que celui d’Arya Stark. La vraie star du film est définitivement Anya Taylor-Joy que l’on espère revoir dans d’autres films. Son interprétation d’un personnage qui rappelle, dans un style assez différent tout de même, Harley Quinn, est absolument savoureuse. Au final, ce film est plus anecdotique que vraiment indispensable, mais il fera plaisir à bien des publics.

LA NOTE : 12/20

Fiche technique :
Réalisation : Josh Boone
Scénario : Josh Boone et Knate Lee, d’après les personnages créés par Chris Claremont et Bob McLeod
Direction artistique : Steve Cooper
Décors : Molly Hughes
Costumes : Leesa Evans et Virginia Johnson
Photographie : Peter Deming
Montage : Matthew Dunnell, Robb Sullivan et Andrew Buckland
Musique : Mark Snow
Musiques additionnelles : Nate Walcott et Mike Hogis
Production : Simon Kinberg
Producteurs délégués : Stan Lee, Karen Rosenfelt et Lauren Shuler Donner
Durée : 94 minutes

Blu Hunt : Danielle « Dani » Moonstar
Anya Taylor-Joy : Illyana Rasputin
Colbie Gannett : Illyana Rasputin, enfant
Maisie Williams : Rahne Sinclair
Charlie Heaton : Samuel « Sam » Guthrie
Henry Zaga : Roberto « Bobby » Da Costa
Alice Braga : Dr. Cecilia Reyes
Adam Beach : William Lonestar
Happy Anderson : le révérend Craig
Thomas Kee : Thomas Guthrie
Marilyn Manson (voix), Dustin Ceithamer (capture de mouvement) : l’Homme Grimaçant

EFFACER L’HISTORIQUE : Point à la ligne

effacerlhistoriqueafficheBenoît Délépine et Gustave Kervern ont fini par se faire une vraie place dans le monde du cinéma français, ce qui n’est jamais garanti quand on vient du monde du petit écran. Leur univers décalé et poétique nous a déjà offert de jolis moments et surtout surprenants. Effacer l’Historique se situe vraiment dans la continuité de leur filmographie sur bien des points. Il bénéficie donc de toutes les qualités habituelles qui nous les ont faits aimer en tant que réalisateurs. Mais il se heurte aussi aux mêmes limites.

Comme beaucoup de leurs films, Effacer l’Historique s’apparente presque à un films à sketch, mais sans l’être de manière assumée. Le scénario s’efforce de rassembler toutes les séquences pour faire progresser une seule et même histoire. Il y parvient dans l’absolu, mais cela garde un petit aspect artificiel. On parfois l’impression qu’ils ont d’abord listé tous les travers du monde numérique et on construit l’histoire pour que tout y trouve sa place. Cet entre-deux empêche le film de prendre vraiment une vraie dimension et de devenir une dénonciation forte et profonde. Il en restera au stade de la dénonciation légère et poétique,ce qui correspond bien au style de Délépine et Kervern. Certes leur cinéma est militant, mais sans jamais se prendre réellement au sérieux.

effacerlhistoriqueEncore une fois, ils parviennent à rassembler un casting qui rendrait jaloux bien des réalisateurs. Il offre notamment à Blanche Gardin son rôle le plus marquant de sa carrière d’actrice. Même si elle reste dans un registre qui lui correspond totalement, on ne peut que saluer la qualité de sa prestation. Elle rivalise largement avec Denis Podalydes toujours aussi juste. On ne compte plus ensuite le nombre de caméos plus ou moins longs et savoureux qui peuple Effacer l’Historique. C’est anecdotique, mais autant de second, troisième et quatrième rôles de qualité tirent évidemment la qualité globale du film vers le haut. Ils contribuent tous donc à faire de ce film une réussite sympathique qui nous donnerait presque envie de nous débarrasser de notre smartphone. Allez, je commence demain…

LA NOTE : 12/20

Réalisation et scénario : Benoît Delépine et Gustave Kervern
Décors : Madphil
Costumes : Agnès Noden
Directeur de la photographie : Hugues Poulain
Montage : Stéphane Elmadjian
Son : Régis Boussin et Fabien Devillers
Production : Sylvie Pialat, Benoît Delépine, Gustave Kervern et Benoît Quainon
Durée : 106 minutes

Casting :
Blanche Gardin : Marie
Denis Podalydès : Bertrand
Corinne Masiero : Christine
Vincent Lacoste : le sextapeur
Benoît Poelvoorde : le livreur Alimazone
Bouli Lanners : Dieu, le hackeur
Vincent Dedienne : le fermier bio
Philippe Rebbot : la feignasse
Michel Houellebecq : l’acheteur de voiture suicidaire
Clémentine Peyricot : Cathya
Lucas Mondher : Sylvain
Jean-Louis Barcelona : le serveur grognon
Candy Ming : la guichetière de la Poste
Joseph Dahan : le guichetier de la Poste
Pierre Gommé : le gamin de la banque
Jackie Berroyer : le voisin pointilleux
Jean Dujardin : le chasseur de pandas (en photo)
Denis O’Hare : le millionnaire américain
Gustave Kervern : l’autre dodo

LIGHT OF MY LIFE : It’s a men’s world

lightofmylifeafficheEt si demain, le monde se trouvait privé de la moitié féminine de l’humanité ? Oui certes, on pourrait définitivement regarder le football en buvant des bières, mais qui alors garderait les enfants ? Il est vrai que la perpétuation de l’espère deviendrait également problématique. Voici une question posée par Casey Affleck dans Light of My Life. J’admets pas tout à fait dans ces termes, mais il nous emmène dans un monde où un virus mystérieux et mortel aurait affecté les femmes du monde entier et les aurait décimées. Une idée plus originale qu’elle en a l’air… mais qui est au final totalement sous-exploitée.

Light of My Life est au final un récit extrêmement classique où un père et une fille essaye de survivre dans un monde devenu hostile, en vivant au maximum à l’écart. En coupant ses personnages de leur environnement, Casey Affleck se prive de la possibilité d’explorer vraiment les conséquences d’une disparition des femmes de la surface de la Terre. Cela ne devient qu’un prétexte pour un film qui s’assmile plus à un récit sur les rapports père/fille qu’à un récit de science-fiction. Ce n’est pas que le propos est déplaisant, ni dénué d’intérêt ou de poésie, mais se prive de la possibilité d’être réellement marquant.

lightofmylifeCasey Affleck est assez à l’aise pour diriger Casey Affleck en lui permettant de faire du Casey Affleck. Avec sa voix et sa diction si particulières, il peut horripiler. Mais si au contraire, on l’apprécie pour cela, alors on peut pleinement profiter de Light of My Life. Par contre, il nous permet de découvrir la jeune Anne Pniowsky qui livre une prestation remarquable. Enfin, c’est toujours autant un plaisir de voir Elisabeth Moss à l’écran. La réalisation de Casey Affleck est relativement élégante et comme souvent avec lui, elle prend son temps. Peut-être un peu trop parfois, mais cela permet d’apprécier l’ambiance particulière qu’il parvient à faire naître. Au final, on en reste quand même un à un sentiment d’un film inabouti, qui est loin d’avoir la dimension qu’il aurait pu prendre.

LA NOTE : 10,5/20

Fiche technique :
Réalisation et scénario : Casey Affleck
Décors : Sara K. White
Costumes : Malgosia Turzanska
Photographie : Adam Arkapaw
Montage : Dody Dorn et Christopher Tellefsen
Musique : Daniel Hart
Production : John Powers Middleton et Teddy Schwarzman
Coproducteur : Geoffrey Quan
Producteurs délégués : Michael Heimler, Whitaker Lader et Ben Stillman
Durée : 119 minutes

Casting :
Casey Affleck : le père
Anna Pniowsky : Rag
Elisabeth Moss : la mère
Tom Bower : Tom
Timothy Webber : Lemmy
Hrothgar Mathews : Calvin

AKIRA : Bienvenue en 2020

akiraafficheLa culture est comme le gruyère (bon l’emmental en fait). On a beau faire, il y a toujours des trous. C’est même pour ça qu’on l’apprécie. Si on avait un jour l’impression d’avoir tout lu ou tout vu, la vie serait beaucoup plus triste. Le film Akira faisait partie des gros trous dans ma propre culture. Un trou uniquement cinématographique puisque le manga trône en intégralité depuis longtemps dans ma bibliothèque. La ressortie du film sur grand écran constituait une occasion unique de boucher cette regrettable cavité, occasion que je n’ai évidemment pas ratée (sinon, je ne serai pas en train d’écrire cette critique). J’ai pu comprendre pourquoi il était devenu culte à ce point… mais aussi les critiques qui lui ont été adressés.

La principale critique porte sur un choix d’adaptation audacieux et risqué. En effet, les trois premiers quarts du film sont assez fidèles au manga. Sauf que les événements racontés ne représentent qu’un tiers de l’histoire originelle. On imagine donc facilement que la fin a été profondément modifiée pour conclure le récit infiniment plus rapidement, éliminant totalement des grands pans de l’intrigue. On a vite fait d’y voir une trahison, même cela revient à dire que Katsuhiro Otomo a trahit Katsuhiro Otomo. J’avoue que j’ai eu un peu de mal à faire abstraction de ce choix quelque peu étrange et qui dénature quand même assez largement l’œuvre dont Akira est adapté. Ceci s’explique par le fait que le film est sorti avant la fin de la publication du manga, mais tout de même. Evidemment, si vous n’avez jamais lu le manga, vous n’aurez absolument pas ces considérations en tête et pourrez apprécier pleinement cette histoire qui reste extraordinaire et unique.

akiraGraphiquement, Akira commence à être quelque peu daté. Mais les vieux nostalgiques comme moi pourront dire que c’est plus une qualité qu’un défaut, n’ayant pas toujours été convaincu par les films d’animation modernes, où le recours au numérique en fait des œuvres froides et sans personnalité. Le film représente le sommet d’une animation japonaise qui aura profondément marqué ma génération. La qualité artistique est évidemment sans commune mesure avec les séries produites au kilomètre qui peuplaient le Club Dorothée. On ne peut ici que s’extasier devant cette vision d’un Tokyo futuriste… un futur qui se situe dans l’année 2020. Nouvelle raison de prendre un coup de vieux et de se sentir nostalgique. Mais le film nous donne surtout des raisons de saluer cette œuvre majeure de la science-fiction, qui recèle tout de même assez de génie pour demeurer intemporel.

LA NOTE:15/20

Fiche technique :
Réalisation : Katsuhiro Ōtomo
Scénario : Katsuhiro Ōtomo et Izō Hashimoto
Décors : Kazuo Ebisawa, Yuji Ikehata et Koji Ono
Direction artistique : Toshiharu Mizutani
Photographie : Katsuji Misawa
Montage : Takeshi Seyama
Musique : Shoji Yamashiro (Tsutomu Ōhashi)
Animations : Studio Fuga, Telecom Animation Film Co., Ltd., Dragon Production
Production : Ryôhei Suzuki, Shunzō Katō, Hiroe Tsukamoto, Yutaka Maseba, Haruyo Kanesaku et Shunzo Kato
Durée : 124 minutes

Casting :
Shôtarô Kaneda : Mitsuo Iwata
Tetsuo Shima : Nozomu Sasaki
Kei : Mami Koyama
Le colonel Shikishima : Tarō Ishida
Docteur Onishi : Mizuho Suzuki
Ryu : Tetsusho Genda
Kaori : Yuriko Fuchizaki
Yamagata : Masaaki Okura
Kaï : Takeshi Kusao
Lady Miyako : Kōichi Kitamura

MIGNONNES : La fin de l’enfance

mignonnesafficheGrandir est un processus exaltant, mais aussi douloureux. Surtout quand on veut grandir trop vite dans l’espoir d’échapper à un milieu qui vous oppresse. Cette problématique se trouve au cœur du sujet de Mignonnes, qui traite en particulier de la sexualisation précoce de certaines jeunes adolescentes. Des sujets forts et délicats mais qui sont ici traités avec beaucoup de pertinence par Maïmouna Doucouré. Cette dernière fait également preuve de beaucoup de qualités artistiques.

Mignonnes peut faire craindre dans ses premières minutes que le film va se résumer à une litanie de clichés. Mais contrairement à beaucoup de films traitant de l’adolescence, celui-ci évite tous les chausse-trappes qui se trouvent sur la route de son histoire. Le scénario offre une belle profondeur aux personnages, aussi jeunes soient-ils. On s’y attache malgré leurs défauts et leurs excès car le film parvient à ce que les spectateurs les comprennent. Or, tout parent vous expliquera que comprendre un adolescent n’a rien d’un exercice évident. Tout cela ne fait que décupler l’émotion véhiculée par l’histoire.

mignonnesAvec Mignonnes, Maïmouna Doucouré prouve qu’elle est une réalisatrice accomplie, malgré une filmographie qui se limite à deux films. Elle parvient par l’image à mettre en lumière les âmes et les corps. L’intrigue étant centré sur un concours de danse, ces derniers participent aussi à donner un sens profond à cette histoire. Si on ajoute à cela, le talent et le culot de la jeune Fathia Youssouf, on obtient un très beau film, émouvant et parfois dérangeant, car il ne fait pas l’impasse sur les réactions inavouables que peut provoquer ces jeunes filles, sortant pourtant à peine de l’enfance.

LA NOTE : 13/20

Fiche technique :
Réalisation : Maïmouna Doucouré
Scénario : Maïmouna Doucouré, Alice Winocour, Valentine Milville, Nathalie Saugeon
Costumes : Valérie Ranchoux
Musique : Niko Noki
Montage : Stéphane Mazalaigue, Mathilde Van de Moortel
Photographie : Yann Maritaud
Son : Clément Maléo
Casting : Tania Arana, Angélique Vergara, Kenza Barrah
Durée : 95 minutes

Casting :
Fathia Youssouf : Amy
Medina El Aidi : Angelica
Esther Gohourou : Coumba
Ilanah Cami-Goursolas : Jess
Myriam Hamma : Yasmine
Demba Diaw : Ismael
Maïmouna Gueye : la mère
Thérèse Mbissine Diop : la tante
Bass Dhem : El Hadj

ENRAGE : Dans la peau de Russell Crowe

enrageafficheCertains acteurs ont un don incroyable pour se métamorphoser physiquement à chaque rôle. On ne parle pas simplement de prendre ou de perdre du poids, mais véritablement de changer de tête. Parfois le matin, en se regardant dans la glace, on aimerait avoir ce pouvoir, mais il est malheureusement réservé à quelques uns. Russel Crowe en fait partie. Il nous le prouve une nouvelle fois avec Enragé. Un film haletant, mais pas trop, dont l’intérêt principal tient à la performance de la star australienne.

Enragé nous raconte pour la énième l’histoire de la jeune femme innocente qui va se retrouver poursuivie par un psychopathe. Rien de bien nouveau ou de très original. Certes, cette fois le personnage du fou dangereux n’est pas piqué des hannetons, comme disent les jeunes qui ont longtemps vécu. Le scénario ne cherche d’ailleurs pas spécialement à nous surprendre, mais simplement à se montrer efficace. Il y a parvient plutôt bien. Le film dure une heure et demi tout juste, preuve qu’il va directement à l’essentiel. Ainsi, on passe tout de même un bon moment, même si on ne retiendra rien de vraiment marquant dans cette intrigue assez banale.

enragePar contre, on se souviendra vraiment de la tête de fou furieux qu’arbore Russel Crowe dans Enragé. Physiquement, il a décidé de ressemble à John Goodman et y parvient sans problème. Il est comme ça, Russel, il décide qui il est ! En tout cas, ce numéro d’acteur, même pour un film aussi gratuit, vaut le détour. Le reste du casting apparaît totalement transparent à ses côtés et c’est sans doute un peu injuste pour eux. Les fans de cette acteur ne doivent donc rater ce film sous aucun prétexte. Les autres pourront éventuellement attendre une longue soirée lors du prochain confinement pour y jeter un œil.

LA NOTE : 11/20

Fiche technique :
Réalisation : Derrick Borte
Scénario : Carl Ellsworth
Direction artistique : Paul Jackson et Paul Luther Jackson
Décors : Freddy Waff
Costumes : Denise Wingate
Photographie : Brendan Galvin
Montage : Michael McCusker, Steve Mirkovich et Tim Mirkovich
Musique : David Buckley
Producteurs : Lisa Ellzey, Mark Gill et Andrew Gunn
Durée : 90 min

Casting :
Russell Crowe : Tom Cooper
Caren Pistorius : Rachel Hunter
Jimmi Simpson : Andy
Gabriel Bateman : Kyle Hunter
Lucy Faust : Rosie
Anne Leighton : Deborah Haskell
Austin P. McKenzie : Fred Purvis
Stephen Louis Grush : Leo
Devyn A. Tyler : Mme Ayers
Michael Papajohn : Homer

THE PERFECT CANDIDATE : La comédie humaine

theperfectcandidateafficheDe plus en plus de cinéastes issus du monde arabo-musulman porte des œuvres pour défendre la place des femmes dans la société. Haifaa Al Mansour avait été une précurseuse en la matière en signant le magnifique Wadja en 2012. Elle revient cette fois-ci avec The Perfect Candidate, l’histoire d’une jeune femme qui se retrouve, presque par hasard, candidate à une élection municipale en Arabie Saoudite et qui va tout faire pour remporter la victoire. Une histoire au sujet sérieux, mais traité sous un ton de comédie, que l’on devine surtout choisi pour contourner la censure. Il prouve encore une fois que la légèreté peut être une arme redoutable pour porter, sans en avoir l’air, bien haut des messages pourtant très lourds de sens.

Le grand mérite d’Haifaa Al Mansour est d’avoir trouver le parfait équilibre qui lui permet de critiquer de manière forte un patriarcat aux fondements profondément religieux… sans jamais critiquer formellement le poids de la religion ou même le système instauré par le pouvoir. En effet, The Perfect Candidate se concentre sur les femmes et les hommes d’Arabie Saoudite et le regard qu’elles/ils portent les uns sur les autres. Finalement, cela s’avère un excellent choix, car c’est bien parce que chacun le fait vivre, ou simplement l’accepte, que de tels systèmes oppressifs parviennent à survivre. Le film parvient à ne se montrer jamais manichéen. Il n’y a pas de méchant, juste une chape de plomb qui pèse sur tous. Cette réussite se concrétise particulièrement dans une dernière scène, assez attendue certes, mais qui parvient à nous émouvoir profondément. Preuve tout ce qui a précédé qui a fonctionné à la perfection.

theperfectcandidateThe Perfect Candidate permet de découvrir une superbe actrice en la personne de Nora Al Awadh. Elle porte réellement le film sur ses épaules avec son talent, son énergie et son charisme hors norme. Elle parvient surtout à trouver une justesse qui colle parfaitement avec celle du propos. Son personnage n’est pas que sympathique, mais on s’y attache avec une facilité déconcertante et on épouse rapidement ses aspirations qui deviendront un combat. Mais le reste du casting n’est pas en reste avec les deux comédiennes qui incarnent ses deux sœurs, qui se placent dans ses traces. Une preuve éclatante que l’Arabie Saoudite devrait penser à donner à ses habitantes la place qu’elles méritent. Car elle ont un talent fou !

LA NOTE : 13/20

Fiche technique :
Réalisation : Haifaa al-Mansour
Scénario : Haifaa al-Mansour et Brad Niemann
Photographie : Patrick Orth
Montage : Andreas Wodraschke
Musique : Volker Bertelmann
Pays d’origine : Drapeau de l’Allemagne Allemagne, Drapeau de l’Arabie saoudite Arabie saoudite
Genre : drame
Durée : 104 minutes

Casting :
Nora Al Awadh : Sara
Dae Al Hilali : Selma
Mila Al Zahrani : Maryam
Khalid Abdulraheem : Abdulaziz

L’INFIRMIERE : Doute à l’arrivée

linfirmiereafficheRaconter une histoire, c’est aller d’un point A vers un point B. Pour certaines, depuis le premier, on aperçoit clairement le deuxième et le chemin qui y mène. Pour d’autres, la route est plus sinueuse et tout le plaisir procuré par le film vient du fait qu’il nous fait avancer à l’aveugle. Peu à peu, la route se dessine pour nous conduire à un dénouement que l’on imaginait pas forcément au premier abord. L’Infirmière fait clairement partie de cette dernière catégorie avec un scénario qui va dévoiler progressivement tous ces contours pour entraîner avec lui le spectateur et aspirer irrésistiblement le personnage principal. Cependant, si ce genre d’expérience s’avère le plus souvent particulièrement agréable, on est vraiment heureux quand le point d’arrivée nous satisfait aussi pleinement. Ici, ce n’est malheureusement pas tout à fait le cas.

L’Infirmière brille à la fois par la qualité de sa narration, mais aussi par l’ambiance particulière dans laquelle nous plonge Kôji Fukada. Il parvient à nous faire sentir très rapidement que quelque chose va venir troubler une situation de départ presque banale. On se doute bien, quand un premier événement survient, que ce dernier va avoir une série de répercussions qui vont nous emmener loin du point de départ. Cette atmosphère quelque peu troublante vient titiller fortement la curiosité du spectateur. On nous cache quelque chose et on veut savoir quoi ! Si la réponse est la hauteur, les dernières minutes du film peine à apporter une réelle conclusion au propos. On peut s’interroger sur le sens profond de l’ultime scène par exemple. Si on positive, on peut considérer que le réalisateur a voulu entretenir jusqu’au bout l’impression de mystère, ou bien considérer plutôt qu’il ne savait pas vraiment comment apporter un vrai point final à son histoire. Ceci ne vient pas gâcher l’ensemble, mais peut renfrogner quelque peu le spectateur.

linfirmiereL’Infirmière est littéralement illuminé par la performance de Mariko Tsutsui. Le film repose largement sur ses frêles épaules. Elle incarne à la perfection son personnage pourtant complexe, car porteur de sentiments très forts et contrastés. Elle rend parfaitement crédible son personnage et tous les sentiments qui viendront peu à peu la torturer. Son jeu est parfaitement mis en valeur par la réalisation très élégante de Kôji Fukada, qui fait vraiment de ce film une œuvre artistiquement aboutie. Elle aurait pu être plus enthousiasmante avec une fin mieux maîtrisée, mais elle restera un des bons films de cet été cinématographique, où les salles auront été bien trop désertées par les spectateurs.

LA NOTE : 12,5/20

Fiche technique :
Réalisation et scénario : Kōji Fukada
Photographie : Ken’ichi Negishi
Montage : Kōji Fukada et Julia Gregory
Musique : Hiroyuki Onogawa
Production : Daisuke Futagi, Kazumasa Yonemitsu et Masa Sawada
Durée : 111 minutes

Casting :
Mariko Tsutsui : Ichiko
Mikako Ichikawa : Motoko Oishi
Sōsuke Ikematsu : Kazumichi,
Mitsuru Fukikoshi : le docteur Totsuka
Hisako Ōkata : Tōko Oishi
Miyu Ogawa : Saki Oishi
Ren Sudo : le neveu d’Ichiko