BROOKLYN AFFAIRS : Toc toc

brooklynaffairsafficheLe cinéma a ceci de magique qu’il peut rendre positif quelque chose qui dans la vie ne l’est franchement pas. Par exemple, les tics et les tocs ne sont pas forcément des caractéristiques qui rendent la vie plus plus belles pour ceux qui en sont frappés et ceux qui y sont confrontés. Pourtant, le 7ème art nous a souvent proposé des personnages qui en présentent, et parfois même des sévères, pour qu’au final cela les rendent plutôt sympathiques. Une nouvelle preuve avec Brooklyn Affairs, deuxième film d’Edward Norton. Cependant, cela ne s’avère tout de même pas suffisant pour donner tout son intérêt à un film.

Brooklyn Affairs se situe entre le polar et le film de gangsters. Mais ce que l’on retiendra surtout c’est le syndrome de Gilles de la Tourette dont est frappé son personnage principal. Parce que pour le reste, l’intrigue passionne peu. Elle ne possède pas l’épaisseur qui justifie deux heures et demi de film et du coup tout est dilué et perd en impact. On entre assez facilement dans l’histoire, mais à mesure que le mystère se dissipe, on est généralement assez déçu des explications données. On finit sur une impression assez désagréable de « tout ça, pour ça ». On ne s’est pas tant ennuyé que ça, mais on a quand même l’impression de s’être fait avoir par un scénario qui parvient simplement à masquer longtemps sa faiblesse.

brooklynaffairsEdward Norton s’offre avec Brooklyn Affairs un rôle qu’il a taillé exprès pour lui-même. Cependant, tous les rôles « avec handicap » ne sont pas des rôles oscarisables potentiels. Pas de Dustin Hoffman dans Rain Man ici. Je doute que ce rôle, et le film en général, marque réellement les mémoires. Edward Norton n’est pas réalisateur maladroit, son film présentant une certaine élégance artistique. Mais tout cela manque passablement d’une vraie flamme créatrice. Tout est trop attendue, cadrée pour vraiment émouvoir ou étonner. Il ne signe pas un film raté, mais une œuvre pas totalement aboutie et qui aurait dû être nettement plus audacieuse pour s’avérer réellement marquante.

LA NOTE : 10/20

Fiche technique :
Production : Class 5 films, MWM, Warner Bros Pictures
Distribution : Warner Bros France
Réalisation : Edward Norton
Scénario : Edward Norton, roman de Jonathan Lethem
Montage : Joe Klotz
Photo : Dick Pope
Décors : Beth Mickle
Musique : Daniel Pemberton
Directeur artistique : Michael Ahern
Durée : 144 min

Casting :
Eward Norton : Lionel Essrog
Gugu Mbatha-Raw : Laura Rose
Alec Baldwin : Moses Randolph
Bobby Cannavale : Tony Vermonte
Willem Dafoe : Paul
Bruce Willis : Frank Minna
Ethan Suplee : Gilbert Coney
Cherry Jones : Gabby Horowitz
Robert Wisdom : Billy Rose

IT MUST BE HEAVEN : Humour étranger

itmustbeheavenafficheLa poésie et le cinéma font parfois bon ménage, parfois un peu moins. Juger un film poétique peut permettre d’en souligner les grandes qualités. Mais c’est aussi parfois une manière extrêmement polie de dire qu’un film est un tantinet ennuyeux. It must Be Heaven est effectivement très poétique. Mais il est aussi, admettons-le, un tantinet ennuyeux. Léger euphémisme pour ne pas dire carrément chiant. Ses qualités sont indéniables. Mais ses défauts le sont tout autant.

It Must Be Heaven est parcouru d’une douce poésie, portée par un humour absurde. Elia Suleiman nous propose sa vision décalée sur la Palestine, Paris et New York. Le problème est que l’on ne saisit pas toujours ce qu’il cherche à nous dire. Cela donne au film un caractère très répétitif et pour tout dire relativement lassant. On aimerait pourtant rentrer pleinement dans cet univers qui parvient tout de même assez sympathique et amusant. Mais Elia Suleiman a tout simplement oublié de le rendre accessible au spectateur. Se sentant bêtement exclu, ce dernier finit par s’en détourner.

itmustbeheavenTout cela est vraiment dommage car It Must Be Heaven est visuellement assez abouti. La réalisation apporte une touche esthétique indéniable et met parfaitement en valeur des personnages que l’on ne comprend pas toujours par ailleurs. En choisissant de faire de lui-même le personnage principal de son film, Elia Suleiman donne définitivement l’impression de nous livrer un univers extrêmement personnel. Sans doute un peu trop pour être partagé. Un OVNI cinématographique donc, mais avec un extra-terrestre qui ne parle pas tout à fait la même langue que nous.

LA NOTE : 08/20

Fiche technique :
Production : Possibles Média, Rectangle Productions, Nazira Films, Zeynofilm, Pallas Film, Doha Film Institute
Réalisation : Elia Suleiman
Scénario : Elia Suleiman
Montage : Véronique Lange
Photo : Sofian El Fani
Distribution : Le Pacte
Directeur artistique : Juna Suleiman
Durée : 97 min

Casting :
Elia Suleiman : Elia Suleiman
Tarik Kopty : le voisin
Grégoire Colin : Homme dans le métro
Vincent Maraval : producteur
Gael Garcia Bernal : lui-même

SEULES LES BETES : Puzzle au sommet

seuleslesbetesafficheUne histoire peut ressembler soit à un long fil que l’on déroule et qui vous mène au dénouement dans un même mouvement. Certaines ressemblent au contraire à un puzzle où chaque pièce se met en place une à une, sans que l’on puisse voir au début comment tout cela va bien pouvoir former une image cohérente. Seules les Bêtes est l’archétype de ce dernier genre de construction. Une histoire racontée du point de vue de chaque protagoniste, qui dévoilera chacun une part de vérité. Un puzzle réussi est un puzzle où toutes les pièces s’emboîtent à la perfection. Celui proposé ici a été découpé avec la plus grande précision.

Ce genre de film peut facilement tomber dans deux pièges. Soit il propose des surprises qui n’en sont pas, soit il propose des éléments surprenants car totalement incohérents et irréalistes. Seules les Bêtes échappe avec brio à ces deux écueils. La qualité de la narration est ici assez remarquable pour intriguer immédiatement le spectateur qui se demande bien quel peut être le rapport entre tous les faits qui lui sont présentés. Elle se poursuit sur la même lancée pour livrer une explication finale qui s’avère à la fois convaincante et inattendue. On est là dans le pur plaisir que peut nous faire ressentir un bon polar. C’est futile, mais c’est bon.

seuleslesbetesSeules les Bêtes offre enfin un premier rôle, et un beau, à Laure Calamy. Cette actrice, pour qui j’ai une affection particulière, prouve qu’elle a largement les épaules pour ça. A ses côtés, Denis Menochet livre une présentation à hauteur de son talent. La vraie révélation reste néanmoins la jeune Nadia Tereszkiewicz qui marque vraiment le film de sa présence. Globalement, que ce soit à l’écriture ou à la réalisation, Dominik Moll fait preuve d’une maîtrise totale. On regrette amèrement qu’il se fasse si rare sur nos écrans, avec un film tous les 5 ans environ. Mais peut-être que c’est justement cette rareté qui lui permet de nous offrir des œuvres toujours aussi abouties.

LA NOTE : 13,5/20

Fiche technique :
Réalisation : Dominik Moll
Scénario : Dominik Moll et Gilles Marchand, d’après l’œuvre de Colin Niel.
Décors : Emmanuelle Duplay
Costumes : Virginie Montel et Isabelle Pannetier
Photographie : Patrick Ghiringhelli
Montage : Laurent Roüan
Musique : Benedikt Schiefer
Producteur : Simon Arnal-Szlovak, Carline Benjo, Barbara Letellier et Carole Scotta
Durée : 117 minutes

Casting :
Denis Ménochet : Michel Farange
Laure Calamy : Alice Farange
Valeria Bruni Tedeschi : Evelyne Ducat
Damien Bonnard : Joseph Bonnefille
Bastien Bouillon : Cédric Vigier
Guy Roger N’drin : Armand
Nadia Tereszkiewicz : Marion
Marie Victorie Amie : Brigitte
Fred Ulysse : le père d’Alice
Colin Niel : le vendeur de la coopérative

SYMPATHIE POUR LE DIABLE : A bonne distance

sympathiepourlediableafficheDécidément, ce dernier trimestre cinématographique aura été marqué par les films consacrés aux reporters de guerre. Et même plus précisément au sujet de la distance qu’ils gardent, ou non, avec les protagonistes des conflits qu’ils sont chargés de couvrir. Après le très réussi et touchant Camille, voici Sympathie pour le Diable, qui nous replonge dans le siège de Sarajevo en 1992. Il nous permet de faire la connaissance de Paul Marchand, qui a couvert le conflit avec acharnement et beaucoup de conviction. Quitte à s’attirer les foudres des autorités ou même de ses collègues, qu’il ne trouvait pas toujours assez engagés.

Sympathie pour le Diable est un film au triple intérêt. Il s’agit tout d’abord d’un film portrait d’un homme au caractère hors du commun. Un vrai personnage de cinéma, si ce n’est qu’il a réellement existé. Après, difficile de savoir si l’écart inévitable entre la fiction et la réalité est important ou pas. Ensuite, le film nous plonge dans le quotidien des habitants de Sarajevo et nous fait découvrir les acteurs de ce conflit. On en apprend beaucoup sur une situation très compliquée, qui est présentée ici de manière claire et précise, sans jamais ralentir l’intrigue. Enfin, il y enfin une vraie réflexion sur le rôle et la place d’un journaliste dans une telle situation. Paul Marchand n’était pas un témoin neutre et distancié. Etait-ce un mal ou bien ? Le film ne répond pas vraiment mais donne beaucoup d’éléments pour que chacun puisse se faire une idée.

sympathiepourlediableSympathie pour le Diable offre un rôle de premier ordre à Niels Schneider, César du Meilleur Espoir Masculin en 2017. Il interprète son rôle avec la même conviction que celui qu’il incarne exerçait son rôle de journaliste. Un personnage complexe mais qui reprend vie ici avec beaucoup de crédibilité. A ses côtés, Ella Rumpf, découverte dans Grave, rivalise avec lui en termes de personnalité et de présence à l’écran. La réalisation de Guillaume de Fontenay est volontairement datée pour nous plonger avec encore plus de réalisme dans l’ambiance de l’époque. Il livre un film marquant et réussi, qui nous en apprend beaucoup et nourrit notre réflexion.

LA NOTE : 13/20

Fiche technique :
Réalisation : Guillaume de Fontenay
Scénario : Guillaume de Fontenay, Jean Barbe, Guillaume Vigneault d’après le récit de Paul Marchand
Production : Monkey Pack Films, Go Films, Nexus Factory, Logical Pictures
Directeur de la photographie : Pierre Aïm
Montage : Mathilde Van de Moortel
Durée : 100 min

Casting :
Niels Schneider : Paul Marchand
Ella Rumpf : Boba
Vincent Rottiers : Vincent

PROXIMA : Des étoiles au coeur

proximaafficheLoin des yeux, loin du cœur. Et sûrement encore plus quand ce lointain se situe en dehors de notre planète. Difficile d’imaginer ce que représente la douleur de quitter ses proches avant de partir pour un long séjour dans l’espace. Cela concerne peu de monde ici-bas, mais assez pour que Alice Winocour nous propose Proxima. Un film qui explore la relation d’une astronaute et de sa fille dans les semaines et les jours qui précèdent le grand départ. Un thème banal, mais développé dans des circonstances qui le sont nettement moins, pour un résultat aussi touchant qu’intéressant.

Une histoire ne peut tenir par son seul décor. Mais celui de Proxima joue quand même un rôle central et ajoute un supplément d’intérêt loin d’être négligeable. Le film décrit de manière assez précise, parfois passionnante, à quoi peut ressembler la préparation d’une astronaute, l’engagement cela exige et les doutes qui peuvent naître quand celle qui doit partir est une femme. Mais tout cela reste secondaire face à la description du lien entre une mère et sa fille et la manière dont il menace de distendre face à l’absence et plus tard face à l’éloignement. Le sujet principal du film reste avant tous les relations humaines, avant l’aventure que peut représenter la préparation pour un tel voyage. Il est traité avec beaucoup d’humanité et de subtilité.

proximaProxima offre un très beau rôle à Eva Green. Un rôle parfois physique, mais qui joue souvent sur l’intime. Ce n’est pas facile de faire passer autant d’émotions, en interprétant un personnage qui cherche à tout prix à cacher les siennes pour paraître forte. Elle parvient vraiment à trouver le bon équilibre et porte le film sur ses épaules. La réalisation d’Alice Winocour se montre une nouvelle fois particulièrement élégante, brillante même par moments. Cela donne une vraie beauté au film, aussi bien sur la forme que sur le fond. Un film qui ne nous emmène peut-être pas dans les étoiles, mais nous offre un joli moment de cinéma.

LA NOTE : 13/20

Fiche technique :
Production : Dharamsala, Darius films, Pathé, Pandora Film, France 3 Cinéma
Distribution : Pathé
Réalisation : Alice Winocour
Scénario : Alice Winocour, Jean-Stéphane Bron
Montage : Julien Lacheray
Photo : George Lechaptois
Décors : Florian Sanson
Musique : Ryuichi Sakamoto
Durée : 106 min

Casting :
Eva Green : Sarah Loreau
Zélie Boulant-Lemesle : Stella
Matt Dillon : Mike Shanon
Alexei Fateev : Anton Ochievski
Lars Eidinger : Thoma
Sandra Hüller : Wendy
Nancy Tate : Naomi

STAR WARS, EPISODE IX : L’ASCENSION DE SKYWALKER : The return of the fan

lascensiondeskywalkerafficheJ’avais intitulé ma critique de The Last Jedi : Kill the fan, kill the past pour saluer la manière dont Rian Johnson s’était efforcé de tourner une page pour engager la saga Star Wars sur un nouveau chemin. Il tournait aussi par la même occasion définitivement le dos à la nostalgie ayant légèrement plombé l’épisode VII, signé JJ Abrams. Cependant, cette tentative de rupture a provoqué un déluge délirant de haine et de reproches de la part de tous les fans incapables de faire le deuil de leur enfance. Il suffit de voir Star Wars, Episode IX : l’Ascension de Skywalker pour comprendre que cette réaction d’enfants gâtés a eu un réel impact sur la production, qui s’est empressée de rappeler JJ Abrams aux manettes. Ils ont gagné. Pas sûr que le cinéma, lui, soit gagnant.

Star Wars, Episode IX : l’Ascension de Skywalker constitue un bon exemple de film pour lequel il est quasiment impossible d’écrire une critique totalement objective. En effet, difficile de ne pas le juger, non dans l’absolu, mais pour sa place dans un ensemble beaucoup plus grand et surtout par rapport aux attentes que l’on pouvait formuler à son égard. Si on assume cette subjectivité, alors on peut estimer que ce film est décevant. Il aurait pu, il aurait dû se révéler bien meilleur, plus original, plus ambitieux, plus surprenant. Il s’efforce au contraire de ramener l’histoire, les personnages, les péripéties dans un cadre déjà connu, où le fan se sent peut-être à l’aise, mais qui ne lui permet pas de connaître des émotions nouvelles. Pas d’émotions du tout du coup ?

Non, il serait injuste d’affirmer cela. Car si on essaye de juger Star Wars, Episode IX : l’Ascension de Skywalker dans l’absolu, alors on peut qu’en souligner de nombreuses qualités. Comme souvent dans ce genre de film, la qualité de la réalisation semble rester totalement ignorée de la part de nombreux critiques. JJ Abrams reste pourtant un vrai, un grand cinéaste. Le film possède une qualité esthétique qui n’a rien à voir avec la qualité des effets spéciaux. La photographie, le sens du cadrage, le montage ne peuvent que forcer l’admiration. Cela donne une grandeur supplémentaire aux meilleurs passages du film, qui finiront par rester ceux que les spectateurs retiendront au final, j’en reste persuadé.

lascensiondeskywalkerCar Star Wars,Episode IX : l’Ascension de Skywalker propose quand même quelques beaux moments. Le scénario, au milieu des péripéties convenue imaginées pour faire plaisir aux fans sans imagination, recèle quelques passages valant le détour. Ils tournent tous autour de la relation entre Rey et Kylo. Il s’agit de l’héritage de Rian Johnson. Le fait que le meilleur de cet épisode vienne de lui renforce les regrets face à ce retour forcé à l’orthodoxie. Mais cela sauve quand même le film d’une complète platitude et apporte une dose d’émotion salutaire. Tout cela vaut mille fois mieux que les tous les clins d’œil à la trilogie initiale, aussi omniprésents que dans l’épisode VII, mais qui ne feront jamais un film, aussi sympathiques soient-ils.

Star Wars, Episode IX : l’Ascension de Skywalker souffle donc le chaud et le froid et provoque des sentiments mêlés. Avec un peu de recul, on mesure combien les critiques le plus incendiaires relèvent d’un snobisme un peu crétin, mais aussi combien les rares avis totalement enthousiasmes tiennent d’une foi quelque peu aveugle. Une chose est sûre. Disney a totalement raté son coup. Le départ moyen au box-office et l’accueil critique très froid permettent déjà de conclure que ce repli vers la zone de confort de la saga conduira à un échec peut-être encore plus profond que l’audace du précédent épisode. On ne sait pas encore quelles seront les conséquences pour le futur de la saga. En attendant la conclusion de cet arc narratif laisse les fans avec pas mal de regret, mais avec quand même quelques beaux nouveaux moments à savourer encore et encore.

LA NOTE : 13/20

Fiche technique :
Production : Lucasfilm, Bad Robot, Walt Disney Pictures
Distribution : Walt Disney Studios Motion Pictures International
Réalisation : J. J. Abrams
Scénario : J. J. Abrams et Chris Terrio
Montage : Maryann Brandon, Stefan Grube
Photo : Daniel Mindel
Musique : John Williams
Durée : 142 min

Casting :
Carrie Fisher : Leia Organa
Mark Hamill : Luke Skywalker
Oscar Isaac : Finn
John Boyega : Poe
Daisy Ridley : Rey
Adam Driver : Kylo Ren / Ben Solo

A COUTEAUX TIRES : Scandale dans la famille

acouteauxtiresafficheUn manoir, une famille nombreuse, avec quelques domestiques, un mort et un détective privé perspicace… Vous pensez tout de suite à Agatha Christie ou à quelques parties de Cluedo qui ont rythmé votre enfance. Désormais, vous pourrez penser également à A Couteaux Tirés, le dernier film de Rian Johnson, l’homme qui a offert au monde le meilleur ou le pire des Star Wars, selon chaque camp. En tout cas, cette fois-ci le résultat est unanimement salué comme étant une grande réussite. Le film parvient à être d’un classicisme total, tout en livrant une intrigue relativement inédite. Avec surtout beaucoup de second degré particulièrement rafraîchissant.

Les premières minutes de A Couteaux Tirés semblent nous mener dans une direction totalement attendue. On imagine déjà tous les protagonistes rassemblés dans une même pièce avec le détective désignant tout à coup le coupable, très certainement celui que l’on soupçonnait à première vue le moins. Et bien… pas du tout. L’histoire ne va pas suivre ce cheminement cousu de fil blanc, mais un autre bien plus original et pour le coup bien plus réjouissant. Il y a un vrai effet de surprise (que je viens de gâcher un peu… oups!) et cela vous met dans les meilleures dispositions pour suivre le reste de l’intrigue. Elle ne réservera pas de twist renversant mais elle est menée avec assez d’intelligence, sans se prendre au sérieux, pour apporter une bonne grosse dose de plaisir au spectateur.

acouteauxtiresA Couteaux Tirés bénéficie d’un casting d’un très haut niveau. Daniel Craig crève l’écran comme à son habitude. Il n’est certainement pas l’acteur le plus expressif de l’histoire, mais il parvient justement, sans en savoir l’air, à livrer un vrai numéro d’acteurs. Il apporte une réelle touche d’humour à son personnage, qui diffuse sur tout le film. Quel bonheur de revoir Jamie Lee Curtis ! Elle se fait extrêmement rare à l’écran et on ne peut que le regretter. Il serait trop long de citer tous les grands acteurs qui se partagent l’affiche ici. Alors contentons nous de saluer la prestation pleine de fraîcheur de Ana de Armas, la moins connue du lot (et de loin) mais qui brille par un rel enthousiasme dans son interprétation. Tout ce petit monde s’amuse, ça se voit et cela s’avère particulièrement communicatif pour livrer un film indispensable pour bien finir l’année.

LA NOTE : 14/20

Fiche technique :
Production : Lionsgate, Media Rights Capital, T-Street
Distribution : Metropolitan FilmExport
Réalisation : Rian Johnson
Scénario : Rian Johnson
Montage : Bob Ducsay
Photo : Steve Yedlin
Décors : David Crank
Musique : Nathan Johnson
Durée : 130 min

Casting :
Daniel Craig : Benoit Blanc
Chris Evans : Ransmon Drysdale
Ana de Armas : Marta Cabrera
Jamie Lee Curtis : Linda Drysdale
Michael Shannon : Walt Thrombey
Don Johnson : Richard Drysdale
Toni Collette : Joni Thrombey
Christopher Plummer : Harlan Thrombey
LaKeith Stanfield : Lt Elliott

LE MANS 66 : Vavavoum !

lemans66afficheCertains vont dire que je radote quelque peu (normal à mon âge), puisque je me sers régulièrement de cet argument pour introduire des critiques, mais je vais rappeler une nouvelle fois que le cinéma parvient à rendre magnifique certains sports qui pourtant, dans la réalité, me laissent totalement froid, voire m’insupportent. Le cas le plus emblématique reste la boxe, mais il y en a d’autres. La course automobile par exemple, comme le prouve Le Mans 66 qui nous raconte comment Ford est parvenu à mettre fin à la suprématie de Ferrari aux 24h du Mans, compétition dont je me tamponne le coquillard habituellement. Pourtant, ce film m’aurait presque fait vibrer.

L’art de la narration, quand il s’agit d’une histoire vraie, revient à embellir quelque peu les faits tout en permettant au spectateur d’y croire quand même. Du peu que j’en sais, le scénario flirte avec la trahison des faits et parfois un peu avec la crédibilité. C’est parfois un peu trop beau pour être vrai (ça ne l’est d’ailleurs pas toujours) mais on se surprend à vouloir y croire quand même. Parce que tout cela est raconté avec assez d’intelligence pour embarquer le spectateur à bord et démarrer en trombe. Evidemment, Le Mans 66 repose sur beaucoup de faux suspense (personne n’imagine que ça soit une Ferrari qui gagne à la fin), mais réserve quelques vrais rebondissements aussi.

lemans66Le Mans 66 bénéficie d’un casting particulièrement rutilant avec deux des plus grandes stars d’Hollywood à l’affiche. Matt Damon et Christian Bale forment un duo qui justifie presque à lui seul d’aller voir le film. Il ne s’agit sûrement pas là de leur plus grand rôle, pas le plus difficile, mais il possède un charisme à l’écran tel qu’on retient avant tout leur performance. Ce film confirme que James Mangold est un des réalisateurs les plus solides d’Hollywood, sachant allier efficacité et le minimum de personnalité pour être considéré comme un véritable cinéaste. On peut simplement peut-être lui reprocher d’avoir donné une longueur légèrement excessive à son récit, mais sans jamais plongé le spectateur dans l’ennui. Ce n’est pas assez passionnant pour donner envie de s’intéresser aux 24h du Mans dans la vie réelle, mais assez pour passer un bon moment même quand on se contrefout du sport automobile.

LA NOTE : 12,5/20

Fiche technique :
Production : Chernin Entertainment, 20th Century Fox
Distribution : 20th Century Fox France
Réalisation : James Mangold
Scénario : Jez Butterworth, John-Henry Butterworth, Jason Keller
Montage : Andrew Buckland, Michael McCusker, Dirk Westervelt
Photo : Phedon Papamichael
Décors : François Audouy
Musique : Marco Beltrami, Buck Sanders
Durée : 152 min

Casting :
Matt Damon : Carroll Shelby
Christian Bale : Ken Miles
Tracy Letts : Henry Ford II
Caitrona Balfe : Mollie Miles
Josh Lucas : Leo Beebe
Jon Bernthal : Lee Iacocca
Remo Girone : Enzo Ferrari
Noah Jupe : Peter Miles

LES EBLOUIS : Lumière éteinte

leseblouisafficheL’extrémisme religieux, sous une forme ou sous une autre, faisant bien trop souvent la une de l’actualité, il sert de point de départ à bien des films, de genre très diverses. Mais il est vrai que dans la plupart des cas, c’est l’islamisme qui se trouve au cœur des scénarios, le terroriste islamiste ayant remplacé l’espion communiste dans l’imaginaire des scénaristes. Mais l’extrémisme guette toutes les religions, l’actualité l’a souvent prouvé également. Les Eblouis nous plonge dans les dérives sectaires que peut connaître la religion catholique dans certaines communautés qui se referment sur elles-mêmes. Sans être totalement crédible, il parvient tout de même à nous plonger dans une histoire réellement prenante.

Finalement, les Eblouis est plus un polar qu’une réflexion sur les raisons qui peuvent conduire certains à s’abandonner à l’influence d’une secte. On a un peu de mal à croire à la rapidité du processus décrit ici. Du coup, cette part du récit apparaît plutôt comme un moyen pour permettre au reste d’exister, plutôt qu’un sujet en lui même. Le cœur de l’intrigue sera le parcours d’une des filles pour remettre en doute les convictions qu’on veut lui imposer et chercher à sortir du piège qui s’est refermé sur elle et sa famille. C’est cette quête que l’on suit avec beaucoup d’intérêt, porté par une tension narrative réelle qui va crescendo, avec quelques vrais rebondissements. Par cela, il se laisse regarder avec beaucoup de plaisir.

leseblouisLes Eblouis bénéficie d’un casting de premier ordre. Mais la plus grande star de ce film est la jeune Céleste Brunnquell qui porte vraiment le film sur ses épaules. Pourtant le rôle n’a rien de facile et demandait beaucoup de maturité. Camille Cottin, Eric Caravaca et Jean-Pierre Darroussin mettent tout leur talent au service de leur personnage, mais ne parviennent pas à compenser pleinement leur léger manque de crédibilité. Mais c’est sûr qu’ils l’auraient été encore moins avec des comédiens d’une moindre envergure. Il contribue à faire de ce film une réussite imparfaite, mais qui vaut largement le coup d’être vu.

LA NOTE : 11,5/20

Fiche technique :
Réalisation : Sarah Suco
Scénario : Sarah Suco et Nicolas Silhol
Photographie : Yves Angelo
Montage : Catherine Schwartz
Musique : Laurent Perez del Mar
Son : Cyril Moisson, Guillaume d’Ham, Hervé Buirette
Casting : Elsa Pharaon et David Bertrand
Décors : Manu de Chauvigny
Costumes : Nathalie Raoul
Producteur : Dominique Besnehard, Michel Feller et Antoine Le Carpentier
Durée : 99 minutes

Casting :
Camille Cottin : Christine Lourmel
Jean-Pierre Darroussin : le berger
Éric Caravaca : Frédéric Lourmel
Céleste Brunnquell : Camille Lourmel
Laurence Roy : Mamie
Daniel Martin : Papi
Spencer Bogaert : Boris
Benjamin Gauthier : Jean-Marie

LES MISERABLES : Sous le choc !

lesmiserablesafficheAvec la Haine, en 1995, la banlieue a fait une entrée fracassante dans le cinéma français en remportant le César du meilleur film. Près de 25 ans plus tard, aucun des problèmes mis en lumière par ce film n’a vraiment été réglé, bien au contraire. Sinon, il n’y aurait pas eu les Misérables. Un long métrage qui représentera la France dans la course à l’Oscar du meilleur film en langue étrangère. Un film qui démontre à quel point cette problématique continue d’irradier le cinéma français. Et de plus en plus, ce sont les acteurs des ces quartiers eux-mêmes qui passent derrière la caméra pour en parler. A la vue de ce film, on ne peut que considérer qu’on ferait mieux de les écouter.

La personnalité de Ladj Ly peut être sujette à polémique et certains de ses propos aussi. Mais le grand mérite de Les Misérables est de nous livrer un point de vue tranché presque extrême, mais qui n’est en rien manichéen. Chaque partie prenante à sa part d’ombre et de lumière et le film ne porte aucun jugement définitif sur aucun d’eux. Le film est un constat fort sur la colère et la violence qui menace, en montre les causes, mais sans vraiment dénoncer un coupable unique. Il dénonce par contre avec une incroyable force la situation globale, le système, même si je déteste ce mot, dans lequel tous les protagonistes sont enfermés et qui ne peut conduire qu’à la haine et à l’affrontement. Chaque spectateur se fera sa propre opinion des protagonistes de cette histoire. Il pourra détester, compatir, mépriser, comprendre chacun d’eux selon sa propre sensibilité. Le grand mérite de cette histoire est de laisser ouvert l’esprit du spectateur et la fin est absolument remarquable en la matière.

lesmiserablesLadj Ly joint la qualité de la forme avec la qualité du propos. Sa réalisation suit vraiment la montée de la tension qui vient avec l’intrigue. Si au début, elle semble maîtrisée, mais globalement assez ordinaire, elle finira par nous immerger totalement dans les événements qui viennent conclure cette histoire. Le dernier quart d’heure est une véritable claque cinématographique qui vous fait ressortir de la salle quelque peu (ou même profondément) sonné. Il suffit de voir avec quelle lenteur la salle s’est vidée à la fin du film pour comprendre à quel point les spectateurs restaient dans un état second. Les Misérables restera un des films le plus marquant de cette année qui tire doucement à sa fin. Marquant cinématographiquement, mais aussi parce qu’il nous rappelle brutalement les démons qui rongent notre société.

LA NOTE : 15/20

Fiche technique :
Production : SRAB films, Rectangle productions, Ly Films
Réalisation : Ladj Ly
Scénario : Giordano Gederlini, Ladj Ly, Alexis Manenti
Montage : Flora Volpelière
Photo : Julien Poupard
Décors : Flora Volpelière
Distribution : Le Pacte
Musique : Pink noise
Durée : 102 min

Casting :
Steve Tientcheu : le maire
Issa Perica : Issa
Jeanne Balibar : la commissaire
Alexis Manenti : Chris
Djibril Zonga : Gwada
Damien Bonnard : Stéphane
Al-Hassan Ly : Buzz