IMPITOYABLE : Un genre se réveille, un réalisateur se révèle

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impitoyableafficheQuand on associe les mots acteur et western, on peut penser à deux noms. Soit on pense classicisme, méchants indiens et chemise impeccable du début à la fin du film et c’est le nom de John Wayne qui nous vient à l’esprit. Soit on pense violence, duel, poussière, sang et sueur, et on clame le nom de Clint Eastwood. Mais si John Wayne a incarné l’age d’or du western, Clint Eastwood est synonyme de son crépuscule… et de sa renaissance avec Impitoyable, dont il est également le réalisateur.

Impitoyable fut un des plus grande surprise cinématographique du début des années 90. Tout d’abord parce qu’il consacra définitivement Clint Eastwood comme un grand réalisateur puisque Impitoyable fut récompensé de l’oscar du meilleur film. Surprise aussi parce que depuis les derniers westerns de Sergio Leone à la fin des années 60, ce genre était totalement tombé en désuétude.

Impitoyable, c’est aussi un peu l’histoire d’Eastwood lui-même. En effet, il raconte l’histoire de deux tueurs, aux exploits légendaires, mais depuis longtemps retirés comme fermier au fin fond de l’ouest. Afin d’assurer l’avenir de leur famille, qui est loin d’être le cas par leur seule activité agricole, il décide d’accepter un dernier contrat. Il s’agit d’éliminer les deux agresseurs d’une prostituée, dont les collègues se sont cotisées pour réunir la somme de la récompense. Mais elles vivent dans une bourgade sur lequel veille un shérif peu commode, lui aussi vieux routier de l’ouest.

Clint Eastwood, Morgan Freeman, Gene Hackman, trois acteurs pour trois rôles de héros rattrapés par leur âge. Des personnages dont la carrière est aussi longue et légendaire que leurs interprètes. L’histoire de William Munny est aussi un peu celle du western en lui-même, en sommeil pendant de longues années pour renaître pour un dernier tour de piste. D’ailleurs, Impitoyable n’a pas vraiment relancé le genre, et seul un Open Rage fut vraiment digne d’intérêt depuis lors.

impitoyableIl faut dire, il est difficile de rivaliser avec Impitoyable, et surtout avec le talent d’Eastwood. Il a connu les dernières heures de l’âge d’or d’Hollywood et il en est le digne héritier. Son style déborde d’élégance. La photographie est sublime, le montage posé. Bref, on peut y accoler le mot classique, mais au sens noble du terme. Clint Eastwood n’est pas un réalisateur de clip vidéo, mais un vrai cinéaste.

Son talent n’a également pas son pareil pour diriger les acteurs. Impitoyable est avant tout un film de personnage avant d’être un film d’action. Le rythme de narration est un peu lent, mais c’est parce qu’il s’efforce de nous faire réellement connaître les protagonistes de cette histoire. Mais ces derniers sont assez savoureux et surtout assez remarquablement interprétés pour qu’Impitoyable ne soit en rien un film contemplatif, mais une grande et passionnante histoire.

Impitoyable fait déjà sans aucun doute des grands classiques éternels du 7ème art. Un grand film d’un immense réalisateur.

Fiche technique :
Réalisation : Clint Eastwood
Production : Clint Eastwood, David Valdes; Malpaso
Scénario : David Webb Peoples
Musique : Lennie Niehaus, Clint Eastwood
Directeur de la photographie : Jack N. Green
Directeur artistique : Adrian Gorton, Rick Roberts
Décors : Henry Bumstead
Montage : Joel Cox
Sortie: 7 août 1992 (USA), 9 septembre 1992 (France)
Durée: 131 minutes

Distribution :
Clint Eastwood : William Munny
Gene Hackman : Little Bill Daggett
Morgan Freeman : Ned Logan
Richard Harris : English Bob
Jaimz Woolvett : le Kid de Schofield
Frances Fisher : Strawberry Alice
Anna Thomson : Delilah Fitzgerald
Saul Rubinek : W.W. Beauchamp 

LES NOCES REBELLES ; Quand la médiocrité du quotidien nous offre un chef d’oeuvre

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lesnocesrebellesafficheCombien de comédies romantiques ? Combien de fins heureuses ? Combien de « et il vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ? Le cinéma nous en offre beaucoup. On ressort de ces films avec une folle envie de tomber amoureux, une folle envie de prendre dans ses bras la première inconnue et lui dire « je t’aime » ! Le cinéma est une machine à rêves, il est rare qu’il choisisse de les briser. Mais les Noces Rebelles, le nouveau film de Sam Mendes, met à rude à épreuve notre foi dans l’amour et le bonheur éternels.

Frank et April Wheeler s’étaient promis d’être un couple hors du commun, de vivre leur vie intensément, de ne jamais renoncer à leurs rêves. Mais alors qu’ils ont à peine la trentaine, ils vivent l’existence caricaturale des banlieusards américains. Lui travaille dans l’entreprise où son père a travaillé toute sa vie. Il y occupe un emploi qu’il déteste, prenant chaque matin le même train, quittant la grande maison qu’ils ont acheté pour élever leurs deux enfants. Elle rêvait d’être actrice et se retrouve femme au foyer, dans une banlieue peuplée de gens inintéressants et médiocres. Mais elle refuse de perdre espoir et se décide à convaincre son mari de vivre leurs rêves tant qu’il en est encore temps et de partir vivre à Paris.

15 ans après Titanic, Leonardo Di Caprio et Kate Winslet ont bien mûri. Leurs personnages aussi. Les Noces Rebelles nous compte l’histoire d’un couple qui a renoncé à être « the king of the world », qui en souffre et qui se le reproche mutuellement. Ce film est tellement loin de l’image du couple véhiculée d’habitude par le cinéma, que ce film a profondément marqué les esprits de tous ceux qui l’ont vu. Après l’on pourra débattre sur le fait que la réalité ressemble malheureusement plus souvent à ça, mais je ne pense pas que cela soit l’objet d’une critique cinéma.
Les Noces Rebelles est surtout un film sur l’oppression qu’exercent les normes sociales sur nos aspirations. Bien sûr, le film se déroule dans les années 50, une époque beaucoup moins « libérée ». On peut d’ailleurs faire facilement la parallèle entre ce film est Loin du Paradis, où une femme blanche tombait amoureuse de son jardinier noir. Mais la réflexion reste évidemment d’actualité. Combien de fois renonçons-nous parce que cela ne se fait pas, parce que ce n’est pas « raisonnable » ? Bien sûr, cela ne nous consume pas comme les personnages de ce film, et heureusement. Mais la réflexion est forte, profonde, touchera chacun d’entre nous, surtout que la mise en image est d’une splendeur époustouflante.

lesnocesrebellesLa caméra de Sam Mendes est une des plus élégante du cinéma américain, on le savait déjà. Il nous avait déjà prouvé son talent prodigieux avec Americain Beauty, mais Les Noces Rebelles est encore un cran au dessus. Filmer la tension du quotidien est un exercice difficile car cela repose beaucoup plus dans les moments de silence, dans les non-dits que dans les explosions de colère passagers. Ce film déborde de tension, une tension transmise au spectateur de la première à la dernière seconde. Ne croyez pas une seule seconde que l’on peut s’ennuyer devant ce film, tant chaque plan vous enserre l’esprit et le c?ur. On ne ressort pas indemne de ce film, qui vous prend littéralement aux tripes. Il révèle au grand jour la médiocrité de nos quotidiens, la mort de nos désirs, alors que le cinéma, la publicité, la morale et la société tout entière essayent de nous vendre ça pour du bonheur. Frank et April ont tout pour être heureux, disent leurs voisins, qui refusent d’imaginer qu’ils puissent être malheureux. Car si eux le sont, alors ils le sont tous !

L’autre grand monsieur des Noces Rebelles est Leonardo Di Caprio. Pourtant, dieu sait ce que j’ai pu détester cet acteur quand il traînait sa bouille indécemment juvénile de blondinet bien pensant. Ce temps est loin désormais et il faut que j’arrête de faire référence à cette époque à chacune des critiques que j’écris sur un film où il joue. Leonardo Di Caprio est un immense acteur, réellement immense et plus rien ne l’empêchera de rentrer à jamais dans l’histoire du 7ème art. Sa performance dans les Noces Rebelles est un modèle par sa justesse et sa force. Il fait à la fois preuve d’une retenue qui rend son personnage humain et accessible, et d’une expressivité qui transmet chaque once des sentiments qui le torturent. Ce film lui doit beaucoup, le cinéma dans son ensemble également désormais.

Les Noces Rebelles sera peut-être battu par l’extraordinaire Slumdog Millionnaire demain aux Oscars. Mais tout autre année, aucun doute n’aurait plané sur le nom du film lauréat !

Fiche technique :
Production : Dreamworks Pictures, BBC Films, Evamere Entertainment, Neal Street
Distribution : Paramount
Réalisation : Sam Mendes
Scénario : Justin Hayes
Montage : Tariq Anwar
Photo : Roger Deakins
Décors : Kristi Zea
Son : Danny Michael
Musique : Thomas Newman
Effets spéciaux : John Stifanich
Costumes : Gail Fitzgibbons
Maquillage : Michele Paris
Directeur artistique : Terri Carriker-Thayer
Durée : 125 mn

Casting :
Kate Winslet : April Wheeler
Leonardo DiCaprio : Frank Wheeler
Kathryn Hahn : Milly Campbell
David Harbour : Shep Campbell
Kathy Bates : Mrs Givings
Richard Easton : Mr Givings
Michael Shannon : John Givings
Ryan Simpkins : Jennifer Wheeler
Ty Sympkins : Michael Wheeler

KUNG-FU PANDA : le retour du cartoon !

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kungfupandaafficheQuand on pense film d’animation, plutôt qu’un film comme Valse avec Bachir, on pense plus volontiers aux cartoons qui ont peuplé notre enfance tous les dimanches soir. Ah Tom et Jerry, Bip Bip et le Coyotte, Bugs Bunny… Que du bonheur ! Depuis, nous avons eu droit à une nouvelle vague de films d’animation, toujours aussi drôles, mais plus dans le second degré et visant un public plus adulte : Shrek, Les Indestructibles (du même réalisateur que le film dont il est question ici) ou encore Monstres et Cie… Autant de films qui rassemblent toute la famille autour d’un DVD, les plus petits se régalant des gags visuels, les plus vieux se délectant des clins d’œil et des références aux styles qu’ils parodient. Il est vrai qu’il nous manquait un vrai bon dessin-animé à l’ancienne, un vrai cartoon, surtout axé sur l’humour premier degré, mais l’humour premier degré drôle (Horton, sorti récemment, étant sympa mais sans plus !). Et bien, ceci se retrouve dans un film très réussi et véritablement hilarant : Kung-fu Panda !

L’idée de base est gentillette. Po, un panda bedonnant, fils d’un canard vendeur de nouilles, rêve secrètement de devenir le roi du kung-fu et de rejoindre ses idoles, les 5 Cyclones : tigresse, grue, mante, vipère et singe. Ce rêve semble totalement hors de portée jusqu’au jour où…

Bref de toute façon, on ne va pas voir Kung-Fu Panda pour l’épaisseur du scénario. Certes, une histoire sympa ne gâche rien et c’est plutôt le cas ici. Les péripéties sont très nombreuses, s’enchaînent avec rythme et ne s’endort jamais dans de longs passages lénifiants ou moralisateurs. Les personnages sont attachants, aux personnalités variées et dont les relations marchent très bien. Le personnage du méchant est lui aussi très réussi, ce qui est capital pour rendre un film vraiment bon.

kungfupandaGraphiquement, le film est vraiment réussi. C’est à la fois un style très cartoon, très dessin animée au sens premier du terme, tout en gardant la beauté d’une production Dreamworks. On n’a plus l’aspect un peu trop « images de synthèse », que je n’aime pas trop dans un Monde de Nemo par exemple, tout en gardant les possibilités qu’offrent l’informatique en termes d’effets visuels. Bref, c’est beau, parfaitement animé et agréable aux yeux.

Mais la plus grande qualité de Kung-Fu Panda, c’est avant tout que c’est drôle ! On rit beaucoup, on rit souvent ! Humour premier degré souvent, mais de très bonne facture ! Jamais redondant, jamais lourdingue, jamais grossier bien sûr. Mais toujours efficace ! Que les gags soient purement visuels, ou alors situationnels, ils font toujours mouche, provoquant l’hilarité du spectateur. Pas de temps mort, pas de passages ennuyeux, ce film est d’une remarquable densité, rare pour un film comique quelque il soit.

Kung-Fu Panda est donc un vrai divertissement familial qui ravira les grands et les petits ! Pour les plus grands, je conseille surtout de voir ce film en VO (enfin de toute façon, la question ne se pose pas…) vu la qualité du casting vocal. Il n’y a peu de films, d’animation ou pas, qui peuvent se targuer de réunir une telle brochette de stars.

Puissions-nous ne jamais cesser d’être de grands enfants !

Fiche technique :
Production : Paramount pictures, Dreamworks SKG animation
Réalisation : Mark Osborne, John Stevenson
Montage : C.K. Norness
Photo : Yong Duk Jhun
Décors : Raymond Zibach
Distribution : Paramount pictures france
Musique : Hans Zimmer
Durée : 98 mn

Casting :
Jack Black : Po
Angelina Jolie : Tigresse
Dustin Hoffman : Shinfu
Lucy Liu : Vipère
Jackie Chan : Singe 

GRAN TORINO : Dien est parmi nous…et il s’appelle Clint

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grantorinoafficheIl est des exercices quelque peu lassant ! On doit toujours chercher de nouveaux mots, de nouvelles façons d’exprimer la même idée. Parler du génie de Clint Eastwood rentre totalement dans cette catégorie. Quand, en plus, il nous offre un nouveau film tout juste quatre mois après la sortie du précédent, on ne peut, en tant que critique, que s’écrier « quand c’est trop, c’est trop ! » Merde à la fin, nous ne sommes pas non plus des machines à compliments ! Mais bon, que voulez-vous, Gran Torino donne surtout envie de s’écrirer « que c’est bon ! ».

Walt est un octogénaire qui traîne son aigreur depuis la guerre de Corée, où il a vécu et du commettre les pires horreurs. De plus, il vit dans un quartier où une large majorité de la population est d’origine asiatique. Alors quand il se retrouve veuf, on pense qu’il va s’enfoncer inexorablement dans sa solitude et sa méchanceté. Mais encore plus que les Asiatiques, Walt ne supporte pas l’injustice et va se retrouver mêler au conflit entre ses voisins, qu’il déteste, et un gang local.

Gran Torino surprendra plus d’un spectateur. Non pas parce qu’il est génial, car venant de Clint Eastwood, ça n’a plus rien de surprenant. Non, c’est par le ton du film que l’on est plutôt décontenancé, surtout lorsque l’on a vu maintes fois la bande-annonce. En effet, il s’agit en grande partie d’une comédie et l’ancien interprète de l’inspecteur Harry, après 50 ans de carrière, nous faire rire comme il ne l’avait encore jamais fait. Comme quoi, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Néanmoins, la bande-annonce n’est pas totalement mensongère puisque le ton s’inverse brutalement sur la fin.

Le personnage de Walt est d’une incroyable richesse. A première vue, il prête à rire (un peu jaune) par sa méchanceté bête et méchante, son racisme primaire et son aigreur permanente. Mais on découvre vite que tout cela n’est qu’une façade qui cachent bien des douleurs profondes. Le ressort comique est donc loin d’être épuisé lorsque le personnage évolue vers une autre dimension, beaucoup plus profonde et riche d’émotions, mais tout aussi réussie. Walt, et Gran Torino globalement, inspirent aux spectateurs successivement des sentiments aussi extrêmes que diverses. Le tout avec même et extraordinaire réussite.

Il faut également saluer bien bas la performance de la jeune Ahney Her, révélation de ce film, qui interprète un jeune fille aussi sympathique et espiègle que Walt est méchant et acariâtre. La réussite de ce personnage est absolument décisive dans l’immense réussite qu’est Gran Torino. C’est en effet par elle que l’évolution de Walt s’amorce et si cela n’avait pas été crédible, le scénario s’en serait vu considérablement affaibli. Mais cela fonctionne au contraire à la perfection, comme tout le reste dans ce film.

GrantorinoJe tiens encore à insister sur l’immense richesse de ce film. Le scénario nous offre une histoire si simple, mais si réussie, si inspirante, si drôle, si bouleversante… Gran Torino n’est pas un film, c’est un concentré de cinéma pur, d’émotions à l’état brut. Comme si Clint Eastwood avait décidé de nous offrir d’un coup tout ce que son talent nous avait distillé pendant cinquante ans de carrière. Les neurones du spectateur se retrouvent tous stimulés en même temps. Voir ce film est presque une épreuve physique tant on l’impression d’avoir vu des dizaines de films d’un coup, en un peu moins de deux heures… Et de très bons films !

Evidemment, Gran Torino porte la patte de Clint Eastwood quant à l’élégance de la mise en image. La sobriété de la photographie ne retire en rien son incroyable qualité. Elle ne brille pas inutilement, car l’essentiel n’est pas là. Mais elle est au service des acteurs et du scénario, qui ne s’en retrouvent que magnifiés. Comme si ils en avaient besoin…

Après Slumdog Millionnaire, Les Noces Rebelles, The Wrestler, l’Etrange Histoire de Benjamin Button, Gran Torino vient s’ajouter à ce début d’année cinématographique d’une exceptionnelle qualité. Clint Eastwood est depuis longtemps au panthéon des réalisateurs tant qu’il tournera, il y trônera bien plus haut qu’aucun autre ne peut espérer aller.

Fiche technique :
Production : Malpaso, Bouble Nickel Entertainement, Village Roadshow
Distribution : Warner Bros Pictures
Réalisation : Clint Eastwood
Scénario : Nick Schnenk
Montage : Joel Cox, Gary D. Roach
Photo : Tom Stern
Format : 35mm
Décors : James J. Murakami
Musique : Kyle eastwood, Michael Stevens
Costumes : Deborah Hopper
Directeur artistique : John Warnke
Durée : 115 mn

Casting :
Clint Eastwood : Walt Kowalski
Christopher Carley : Le père Janovich
Bee Vang : Thao
Ahney Her : Sue
Brian Haley : Mitch Kowalski
Geraldine Hughes : Karen Kowalski
Brian Howe : Steve Kowalski

IL ETAIT UNE FOIS DANS L’OUEST : Une légende de l’Ouest

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IletaitunefoisdanslouestafficheDe tous les westerns spaghetti, Il était une fois dans l’Ouest est le plus grand. De tous les westerns, Il était une fois dans l’Ouest est pour moi le plus grand. Bon, je n’irai pas jusqu’à dire que de tous les films, Il était une fois dans l’Ouest est le plus grand. Mais parmi les plus grands, oui, c’est incontestable.

Il était une fois dans l’Ouest débute sur un quai de gare pour une scène mémorable. Trois hommes à la mine patibulaire attendent l’arrivée d’un train, visiblement armée de mauvaises intentions. Il finit par arriver mais l’homme qu’ils attendent ne semble pas être là. Mais alors que le train repart, ils entendent un air d’harmonica et aperçoivent l’homme en question qui les fixe de l’autre côté de la voie… La suite ? En dire plus serait un crime et j’invite tous ceux qui ne l’ont pas encore fait à se précipiter sur ce film pour la connaître.

Bon, je sens que certains d’entre vous attendent un peu plus d’explications avant de croire mes propos.

Il était une fois dans l’Ouest est l’apogée du style Sergio Leone. Cet homme était capable de vous raconter une histoire complexe rien qu’à partir de gros plans sur les visages ou de longs travellings silencieux. Mais son cinéma ne se résume pas qu’à ça. Car ce qui fait la force de ses films, c’est le contraste entre ces longs moments de calme, où il nous fait sentir qu’il va se passer quelque chose et pendant lesquels la tension monte peu à peu, et les moments où les armes se déchaînent et où les cow-boys dégainent leur colt aussi vite que leur ombre.

Il était une fois dans l’Ouest est donc ce mélange rare de plans sublimes et inoubliables avec des moments de pur souffle épique. Sergio Leone a sorti le western spaghetti de son statut de sous-western pour, au contraire, réaliser des œuvres artistiquement mille fois plus abouties que le western classique machiste et anti-indien à la John Wayne.

Les films de Sergio Leone, et Il était une fois dans l’Ouest en particulier, doivent aussi leur succès à la formidable synergie entre le réalisateur et le compositeur, à savoir Ennio Morricone. Seuls les couples Steven Spielberg-John Williams et Tim Burton-Dany Elfman peuvent soutenir la comparaison. Il était une fois dans l’Ouest est la bande-originale la plus aboutie d’Ennio Morricone. Les principaux thèmes sont magnifiques, dégageant un souffle épique incroyable. La musique n’est pas ici seulement écrite pour accompagner l’action, mais elle en fait intégralement partie. Une fois que vous aurez vu le film, vous n’aurez plus qu’à réécouter la musique pour avoir l’impression de revivre le film.

IletaitunefoisdanslouestMais un autre couple est au cœur du succès d’Il était une fois dans l’Ouest. Ou plutôt, deux paires. Deux paires d’yeux bleus de deux légendes d’Hollywood. Enfin, si Charles Bronson est légendaire, c’est surtout pour avoir joué dans Il était une fois dans l’Ouest car le reste de sa filmographie n’est pas vraiment au niveau. Avec un réalisateur autant amateur de gros plans que Sergio Leone, le regard des acteurs joue un rôle évidemment capital. D’un côté, les petits yeux rentrés dans leurs orbites de Charles Bronson, deux petits points bleus à l’image de son personnage si mystérieux et dont on ne sait si peu. De l’autre, le grand regard clair de Henry Fonda qui colle parfaitement avec la suffisance et la confiance en soi de son personnage, tueur implacable et sans pitié. Ce duo mythique nous fera vivre un duel final mémorable.

Enfin, un peu de douceur dans ce monde de brute, avec la présence de Claudia Cardinale, une des plus belles actrices de l’histoire. Elle est la grâce incarnée, le charme absolu et contraste avec les manières rustres et souvent antipathiques des personnages qui l’entourent. Sa présence n’est en rien accessoire, sa beauté étant un élément fondamental de l’histoire. Bien sûr, elle ne gâte en rien le plaisir du spectateur.

Il était une fois dans l’Ouest est un monument intemporel du cinéma. Un film, de part sa beauté et sa force, que l’on ne se lasse jamais de voir et de revoir.

Fiche technique
Titre : Il était une fois dans l’Ouest
Titre original : C’era una volta il West
Titre anglais : Once Upon a Time in the West
Réalisation : Sergio Leone
Scénario : Dario Argento, Bernardo Bertolucci, Sergio Donati, Sergio Leone
Photographie : Tonino Delli Colli
Musique : Ennio Morricone
Production : Fulvio Morsella
Distribution : C.I.C.
Date de sortie : 21 décembre 1968 (Italie), 27 août 1969 (France)
Film italo-américain, tourné en anglais, post-synchonisé en italien.
Format : Couleurs – 2,35:1 (Cinémascope) – 35 mm
Genre : drame, western
Durée : 165 minutes
Langue de tournage : anglais
Film interdit aux moins de 13 ans à sa sortie en France, sans interdiction de nos jours.

Distribution
Charles Bronson : l’homme à l’harmonica
Henry Fonda : Frank
Claudia Cardinale : Jill McBain
Jason Robards : Manuel Gutierrez dit Cheyenne
Frank Wolff : Brett McBain
Lionel Stander : le barman
Keenan Wynn : le shérif de Flagstone
Gabriele Ferzetti : Morton (patron du chemin de fer)
Paolo Stoppa : Sam
Jack Elam : Snaky (membre du gang de Frank)
Woody Strode : Stony (membre du gang de Frank)
Enzo Santaniello : Timmy McBain (l’enfant assassiné par Frank)
Marilù Carteny : Maureen McBain 

REC : Nouvelle terreur venue d’Espagne

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recafficheAprès le très réussi l’Orphelinat, le cinéma espagnol nous envoie un nouveau petit bijou du film qui fait peur avec Rec. Cependant, cette fois, on donne dans le extrêmement classique : un lieu clos, un groupe d’hommes et de femmes aux profils variés et des zombies… Enfin techniquement, les puristes diront que ce ne sont pas des zombies, mais des personnes atteintes d’une maladie infectieuse, mais ça revient strictement au même.

Les deux héros principaux de Rec sont la journaliste et le caméraman d’une équipe de télé en train de faire un reportage en suivant une équipe de pompiers pendant toute une nuit. Au départ, ils craignent que le résultat soit quelque peu ennuyeux… En termes d’émotions fortes, ils seront au final particulièrement servis…

Rec ressemble en bien des points à Cloverfield, sorti récemment. Sauf que cette fois, le fait qu’un des personnages passent tout le film les yeux rivés à sa caméra paraît beaucoup plus naturel. Et le résultat est surtout mille fois plus angoissant. Car Rec fait vraiment peur. Les âmes sensibles se doivent donc de s’abstenir. Il sort une petite dizaine de films de ce genre par an, mais la plupart divertissent ou amuses bien plus qu’il ne font peur. Ce n’est pas le cas de ce film qui vous fera vous enfoncer dans votre fauteuil et fermer les yeux à maintes reprises.

Rarement, je n’ai vu un film où la sensation d’un danger imminent est aussi présente du début à la fin. On tremble à chaque seconde en craignant que quelque chose d’affreux ne surviennent par surprise. Si le début, lorsque les reporters sont encore à la caserne, ne laisse rien présager de ce qui va survenir par la suite, ensuite la situation dégénère très vite et la tension monte rapidement en flèche. Le rationnel disparaît et les personnages, et les spectateurs par la même occasion, s’aperçoivent sans tarder qu’ils font face à une situation exceptionnelle et potentiellement mortelle.

recLe ressort narratif principal de Rec n’est donc pas un mystère qui se dévoile peu à peu, comme dans l’Orphelinat. Bien sûr, on apprend peu à peu ce qui se passe réellement, mais l’explication n’est que secondaire. Rec se démarque vraiment par l’intensité de la tension qui règne, de la peur primale qui habite les personnages et les spectateurs. Le film ne cherche pas la subtilité ou l’originalité mais à frapper fort au plus profond de nos peurs enfouies et de notre instinct de survie. Et les coups portés ici atteignent quasiment tous leur but avec une puissance remarquable.

La peur étant un sentiment qui se transmet, Rec n’aurait pas été aussi réussi si les acteurs n’avaient pas réussi à la communiquer. Ils passent de l’appréhension, à la peur puis à l’angoisse la plus totale et au désespoir le plus profond avec un talent remarquable. Une mention toute spéciale est à accorder à Manuela Velasco, qui incarne la jeune journaliste. Elle est incontestablement la star de ce film et une vraie révélation.

Rec peut donc se résumer ainsi : un film qui fait peur… Mais où le mot peur n’est pas un vain mot…

Fiche technique :
Production : Filmax
Distribution : Wild Side Films
Réalisation : Jaume Balaguero et Paco Plaza
Scénario : Jaume Balaguero, Paco Plaza et Luis A. Berdejo
Montage : David Gallart
Photo : Pablo Rosso
Format : 1.85
Son : Xavi Mas
Effets spéciaux : David Ambit
Maquillage : Lucia Salanueva
Directeur artistique : Gemma Fauria
Durée : 80 mn

Casting :
Manuela Velasco : Angela
Ferran Terraza : Manu
Pablo Rosso : Marcos
Carlos Lasarte : Cesar
Jorge Yaman : Sergio
 

SOS FANTOMES : Culte…même 15 ans après

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sosfantomesafficheAh les amours de jeunesse ! Ne sont-elles pas les plus belles ? Quand on est un enfant ou un jeune adolescent, on peut donner une affection sans limite à quelque chose qui objectivement ne le mérite pas. Pour nous, cette chose est alors la plus belle du monde et ne souffre aucun défaut. Et puis, quelque fois, le temps passe et l’on retombe de longues années plus tard dessus et on y porte alors un regard d’adulte. Et parfois, le choc est d’importance… Ghostbusters a été une des VHS que j’ai le plus regardé du temps où j’habitais encore chez mes parents. Un de mes films culte que j’ai mis étonnement près d’une décennie à acquérir en DVD… Pour donc le revoir, près de 15 ans plus tard…

Peter Venkman, Raymond Stantz et Egon Spengler sont trois scientifiques à première vue ratés menant des expériences sur le paranormal à l’université de New York. Sans aucun résultat probant, ils sont renvoyés de la faculté. Mais au même moment, des fantômes commencent à apparaître un peu partout en ville. Ils décident alors de fonder la société Ghostbusters, spécialisée dans la chasse, la capture et la mise en détention d’ectoplasmes en tout genre.

15 ans plus tard, mon Dieu que ce film m’est apparu visuellement cheap. Les effets spéciaux sont très mal faits et on reconnaît du premier coup d’œil toutes les ficelles utilisées pour qu’ils soient les moins nombreux et donc les moins chers possibles. Je n’avais absolument aucun souvenir de ça et même si, depuis, on a fait énormément de progrès dans ce domaine, là, on est plus proche du King Kong des années 30 (qui est objectivement beaucoup mieux faits d’ailleurs) que du Retour du Roi.

Cependant, cela a-t-il altéré une seule seconde mon amour pour ce film ? Evidemment que non ! Quel pied de le revoir ! Et oui, Ghostbusters n’est absolument pas un film d’aventures, les fantômes n’étant qu’un prétexte, mais une excellente comédie. Et dans ce domaine, la présence seule de Bill Murray assure au film de fonctionner à la perfection. Son personnage de scientifique baratineur, maniant à la perfection le sarcasme et l’ironie, est légendaire.

sosfantomesMais Ghostbusters, c’est avant tout le bébé de Dan Akroyd, acteur et scénariste. Quand on sait que son autre bébé, pour lequel il avait tenu les mêmes rôles, sont The Blues Brothers, on se dit qu’il s’y connaît en film culte, indémodable et hilarant. On ne pourra que regretter que son compère John Belushi soit mort avant de pouvoir participer au projet, comme prévu initialement. Mais bon, quand on sait qu’il a été remplacé par Bill Murray, les regrets sont moindres.

Pourtant, avec le recul, le scénario paraît également nettement plus faible que dans mon souvenir. Mais bon, là aussi, ce n’est qu’un support. Ce film fait partie des inexplicables réussites. Des films dont l’âme forme un tout qui dépasse de très très loin la somme des parties. Bref,, l’archétype du film culte.

Ghostbusters, film culte, il est, film culte, il restera.

Fiche technique :
Titre : S.O.S. Fantômes
Titre original : Ghostbusters
Réalisation : Ivan Reitman
Scénario : Dan Aykroyd et Harold Ramis
Production : Ivan Reitman, Bernie Brillstein, Joe Medjuck et Michael C. Gross
Sociétés de production : Columbia Pictures, Delphi Productions et Black Rhino Productions
Musique : Elmer Bernstein
Direction artistique : John DeCuir
Costumes : Theoni V. Aldredge
Photographie : Laszlo Kovacs
Son : Richard Beggs et Tom McCarthy Jr
Effets spéciaux : Richard Edlund
Société d’effets spéciaux : Entertainment Effects Group
Montage : Sheldon Kahn et David Blewitt
Budget : 30 000 000 $
Pays d’origine : États-Unis
Lieux de tournage :
New York : New York
Californie : Los Angeles Public Library
Format : Couleurs (Metrocolor (en)) – 2,35:1 – Son Dolby Stéréo – 35 mm – Filmé en Panavision
Genre : comédie, fantastique
Durée : 101 min
Dates de sortie :
États-Unis : 8 juin 1984 sur le reste du territoire
France : 12 décembre 1984

Casting :
Bill Murray : Dr Peter Venkman
Dan Aykroyd : Dr Raymond Stantz
Harold Ramis : Dr Egon Spengler
Sigourney Weaver : Dana Barrett
Rick Moranis : Louis Tully
Annie Potts : Janine Melnitz
William Atherton : Walter Peck
Ernie Hudson : Winston Zeddemore
David Margulies : le maire 

SLUMDOG MILLIONAIRE : Du cinéma, du vrai !

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slumdogmillionaireafficheQuand on aime réellement le cinéma, on aime voir des films. Mais, me direz-vous, on en voit à chaque fois que l’on se rend dans une salle obscure. Non, car ici je parle de vrais moments de cinéma. D’images, de musiques, de sons, de couleurs, d’intrigue, de rythme, d’acteurs, de spectacle, de rebondissements, de mouvements de caméra et le tout à chaque image ! Du cinéma donc, pas des téléfilms à gros budgets, pas du théâtre filmé… Non, du cinéma ! Et bien ce genre de plaisir est un plaisir plus que rare, que l’on ne ressent guère plus qu’une dizaine de fois par an. Et personne ne contestera que c’est exactement ce que l’on ressent à la vue de Slumdog Millionnaire, le nouveau film de Danny Boyle.

Jamal n’est qu’un enfant des bidonvilles, qui sert le thé aux employés d’un centre d’appels. Alors lorsqu’il est sur le point de remporter plusieurs millions de roupies à la version indienne de « Qui veut gagner des millions ? », d’un côté il déchaîne l’enthousiasme des spectateurs, mais de l’autre il éveille la suspicion de la police. Cette dernière l’embarque et utilise une technique d’interrogatoire musclée pour lui faire admettre qu’il a triché. Mais à la place de ça, elle aura le droit au récit de la vie de Jamal dans le monde impitoyable des bidonvilles indiens et des circonstances qui lui ont permis de connaître les réponses aux questions qu’on lui a posées.

On cite souvent Slumdog Millionnaire comme le favori pour la prochaine cérémonie des Oscars. Personnellement, je serai vraiment ravi qu’il obtienne la récompense suprême, ce qui constituerait un évènement historique, puisque ce film est un film anglais. Mais c’est un tel choc visuel, un tel bonheur scénaristique que cela serait pleinement mérité. On retrouve ici la force que Danny Boyle avait su faire passer dans Trainspotting. Il prouve ici que son empreinte dans l’histoire du 7ème art ne se résumera pas à un seul film. C’est la confirmation d’un talent immense et rare, qui prend ici toute son ampleur.

Passionnant, beau, prenant, enthousiasmant, magnifique, riche, puissant… parler de Slumdog Millionnaire peut vite ressembler à un concours de superlatifs. Il est même difficile de retranscrire le bonheur que procure ce film, tant il s’agit d’une oeuvre réellement originale, difficilement classable et ne ressemblant à rien de déjà vu. Il y’a tout autant de Ken Loach que de John Woo dans ce film. On ne retrouve une telle maîtrise technique dans tous (mais alors tous !) les aspects d’un long métrage chez des grands maîtres comme Stanley Kubrick ou Quentin Tarantino.

slumdogmillionaireDe la profondeur et du spectacle sont donc les deux piliers du succès de Slumdog Millionnaire. Un propos social très fort, sur la violence et la lutte pour la survie dans les bidonvilles indiens. L’histoire de deux orphelins livrés à eux-mêmes qui vont devoir grandir avant l’heure pour échapper à un destin tragique. Une histoire d’amour qui est peut-être l’élément le moins original de ce film, mais qui donne un sens et un fil directeur à l’histoire. Enfin, une mise en image sublime, dont j’ai déjà longuement parlé.

Un mot enfin sur les acteurs de ce film. On a beaucoup parlé de Dev Patel, qui a été propulsé d’un coup au rang d’icône mondiale. Mais le reste de la distribution n’est pas en reste. On retiendra évidemment la sublime (le mot est faible) Freida Pinto, qui prouve une nouvelle fois que les plus belles femmes du monde sont indiennes. Mais on félicitera surtout l’ensemble des enfants qui interprètent les personnages à des âges diverses. Ils jouent tous avec une justesse remarquable, un talent qu’envieraient la plupart des acteurs « adultes », même quand il s’agit de nous transmettre les sentiments les plus extrêmes.

Slumdog Millionnaire est donc un film… Une phrase qui passe pour une évidence à première vue, mais qui, en faire, résume parfaitement le bonheur absolu que représente ce film.

Fiche technique :
Production : Pathe pictures, FilmFour, Celador films
Distribution : Pathe distribution
Réalisation : Danny Boyle
Scénario : Simon Beaufoy, d’après le roman de Vikas Swarup
Montage : Christopher Dickens
Photo : Anthony Dod Mantle
Décors : Mark Digby
Musique : A.R. Rahman
Durée : 120 mn

Casting :
Dev Patel : Jamal
Anil Kapoor : Prem
Irrfan Khan : L inspecteur
Madhur Mittal : Salim
Freida Pinto : Latika
Saurabh Shukla : Le sergent 

THE VISITOR : Poésie humaine

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thevisitorafficheLa frontière entre le film plein de bons sentiments lourdingue et écœurant et le vrai moment d’émotion est particulièrement fine. Il est souvent difficile de réellement expliquer ce qui fait basculer une oeuvre d’un côté ou l’autre. Mais quand la magie fonctionne, quand un supplément d’âme vient nous bouleverser, on peut assister à un grand film, même avec peu de moyens, simplement avec une magnifique histoire et des personnages merveilleusement interprétés. Nous sommes dans ce cas là avec The Visitor, le plus beau moment de poésie humaniste cinématographique depuis La Visite de la Fanfare.

Walter Vale est un professeur d’université qui, pour faire simple, se fait chier dans la vie. En fin de carrière, cela fait 20 ans qu’il donne le même cours. Veuf, il essaye tant bien que mal d’apprendre le piano. Un jour, il est envoyé contre son gré à New York pour assister à une conférence. Il y possède un pied à terre où il ne vient que rarement. A son arrivé, il a la surprise de découvrir que l’appartement est squatté par un jeune couple qui pense en être locataire en bonne et due forme. Ne voulant pas les jeter à la rue, il accepte de les héberger le temps de trouver une solution. Les membres de ce trio appartiennent à des mondes très différents, mais se retrouvent dans leur amour de la musique. Cependant, à la suite d’un incident anodin, le jeune homme est arrêté et enfermé dans un centre de détention pour clandestins. Walter Vale se décide alors à l’aider mais va se heurter à une administration déshumanisée.

Si The Visitor est un film magnifique, c’est notamment parce qu’il possède une véritable intrigue. On n’est pas dans une comédie romantique, on ne sait pas à l’avance comment l’histoire va se terminer. Cela crée une vraie tension dramatique qui maintient l’intérêt du spectateur à son maximum du début jusqu’à la fin. Bien sûr, on n’apprécie pas ce film avant tout pour son suspense, mais le fait de posséder un réel support scénaristique en fait que renforcer l’impact du message.

thevisitorComme je l’ai évoqué, il est difficile d’expliquer pourquoi l’histoire de cette rencontre fonctionne si bien, pourquoi on y croit, pourquoi elle nous émeut tellement. La performance du duo Richard Jenkins – Haaz Sleiman y est sûrement pour beaucoup, mais le tout découle d’une subtile alchimie entre tous les éléments qui composent le film. Tout est fait avec justesse, n’essayant jamais de s’appuyer sur des clichés ou de l’émotion facile et larmoyante. Thomas McCarthy n’a pas fait le choix de la facilité, mais, au final, il a fait celui de la réussite.

Ensuite, reste le message politique. Là encore, tout est fait avec mesure. Le message découle naturellement de l’histoire et ce n’est pas l’histoire qui a été construite un peu artificiellement pour faire passer le message. Il n’en a que plus de force et entraîne le spectateur dans le même sentiment de révolte que les personnages. Ceci est bien sûr d’autant plus émouvant quand on sait à quel point ce sujet est malheureusement également d’actualité en France.

The Visitor est pour moi le film américain indépendant de l’année et méritera une place de choix dans tous les palmarès de 2008.

Fiche technique :
Production : Groundswell prod, Next Wednesday, Particpant prod.
Distribution : TFM
Réalisation : Tom McCarthy (Thomas McCarthy)
Scénario : Tom McCarthy
Montage : Tom McArdle
Photo : Oliver Bokelberg
Format : 1.85, Dolby digital
Décors : John Paino
Musique : Jan A.P. Kaczmarek
Effets spéciaux : Janimation
Durée : 104 mn

Casting :
Richard Jenkins : Professeur Walter Vale
Haaz Sleiman : Tarek Khalil
Danai Gurira : Zainab
Hiam Abbass : Mouna Khalil
Marian Seldes : Barbara
Michael Cumpsty : Charles

WATCHMEN – LES GARDIENS : Naissance d’un film culte

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watchmenafficheComment reconnaît-on un film culte ? C’est par définition très difficile, puisque ce genre de films se caractérisent par un succès et un attachement démesuré par rapport à leurs qualités objectives. Mais voilà, l’art est subjectif et aucune explication rationnelle ne peut expliquer pourquoi Star Wars a pu devenir la saga la plus culte de l’histoire cinéma, malgré des acteurs très moyens, des scénarios pas particulièrement recherchés et des dialogues parfois involontairement comiques. Bien sûr, ces films possèdent à côté de ça de nombreuses qualités, mais cela n’explique pas pourquoi l’amour que les spectateurs leur portent est infiniment supérieur à celui qu’ils portent à des oeuvres beaucoup plus proches de la perfection. Alors, comment juger ces films ? Sur leurs qualités objectives ou sur l’enthousiasme qu’ils procurent ? Watchmen, les Gardiens nous pose exactement cette question !

Au début des années 80, les Etats-Unis, gouvernés par Nixon qui en est à son quatrième mandat, sont au bord de la guerre nucléaire avec l’URSS. Il y’a quelques années, une loi a interdit les super-héros masqués. Ces derniers sont donc soit repartis dans l’anonymat, soit exercent leurs talents à visage découvert dans des fonctions beaucoup « normales ». L’un d’eux, le Comédien, meurt assassiné. Un de ses anciens collègues, Rorschach, pense qu’il s’agit d’un complot contre les anciens super-héros. Il se décide à mener l’enquête et à avertir les autres, qui le reçoivent tous avec incrédulité.

Le synopsis que je viens de vous livrer est loin de refléter la richesse et la complexité de l’intrigue de Watchmen, les Gardiens. Le meurtre du Comédien, proche du fait divers, n’est que la minuscule partie immergée d’évènements d’une toute autre ampleur qui se dévoilent tout au long du film. Ce film dure un peu moins de trois heures, mais ne manque sûrement pas de contenu. On appréciera que les producteurs n’aient pas sacrifié la richesse de l’histoire pour un format un peu plus commercial.

watchmenUn film de super-héros avec un scénario riche et complexe ? Voilà qui est étonnant… Mais Watchmen, les Gardiens n’est pas vraiment un films de super-héros. C’est un film avec des super-héros, certes, mais c’est bien plus que ça. D’ailleurs, il est assez difficile de ranger clairement ce film dans une case. Il est issu d’une bande-dessinée qui a longtemps été jugée inadaptable. Il est vrai que c’est une oeuvre qui surprend, mais au vu du résultat, on se dit que les craintes étaient infondées. Il suffisait juste d’oser sortir des chemins balisés du cinéma commercial.

Si je dois vraiment comparer ce film à un autre OVNI cinématographique, je le comparerai à The Rocky Horror Picture Show, dans l’idée de reprendre des éléments issus d’univers cinématographiques différents pour en faire une oeuvre résolument originale. Watchmen, les Gardiens est sûrement moins provocateur, même s’il tente de délivrer un message politique assez fort. Je ne pense pas que les supporters les plus acharnés du parti républicain aient adoré ce film !

Si le contenu est résolument innovant, la forme se contente de nous livrer ce que le cinéma hollywoodien sait faire de mieux. C’est déjà beaucoup me direz-vous. Vous retrouverez donc dans Watchmen, les Gardiens des effets spéciaux superbes, des scènes d’action musclées (même si assez peu nombreuses au final), se terminant par un affrontement final grandiose. Les acteurs sont tous parfaits dans leur rôle, sans qu’aucune tête d’affiche ne soit vraiment marquante. On retiendra tout de même un vrai travail dans la réalisation pour retranscrire l’ambiance sombre, gothique et décadente qui règne sur ce film. Cela ne se hisse pas au niveau d’un Ridley Scott dans Blade Runner ou d’un Tim Burton dans Batman, mais Zack Snyder s’en sort tout de même très bien.

Watchmen, les Gardiens souffrent tout de même de quelques défauts. Etre une oeuvre ésotérique fait à la fois la force et l’originalité de ce film, mais aussi sa faiblesse lorsque cela se traduit par de longs discours quelques peu obscurs, ressemblant parfois à de la sous-philosophie existentielle. Cela ne plombe pas non plus excessivement le film, mais il aurait gagné à abréger ces moments de « profondeur » pour gagner un petit quart d’heure.

Watchmen, les Gardiens séduira donc un public bien au-delà des fans de films de super-héros… Il n’est d’ailleurs pas évident que ces derniers soient ceux qui rentreront le plus aisément dans cet univers très particulier, et à des années lumière du manichéisme simpliste d’un Iron Man. Ce film s’adresse plutôt aux amateurs de films noirs, d’univers ésotériques ou encore d’histoires aux multiples facettes. Rien ne garantit que la magie opérera sur tout le monde, mais vous serez nombreux à être séduits et fascinés.

Même si ces deux films ne sont pas du tout comparables, Les Noces Rebelles sont, par exemple, objectivement et cinématographiquement d’une autre trempe que Watchmen, les Gardiens. Cependant, si je verrai le premier guère plus de deux à trois fois dans ma vie, je verrai avec le même plaisir le second une bonne dizaine de fois sans problème. Je ne sais pas si cela suffit à en faire un chef d’œuvre. Par contre, un film culte sans aucun doute !

Fiche technique :
Production : Warner Bros pictures, Paramount pictures, Legendary, Lawrence Gordon, DC Comics
Distribution : Paramount Pictures
Réalisation : Zack Snyder
Scénario : David Hayter, Alex Tse, d’après la BD de Dave Gibbons, Alan Moore
Montage : William Hoy
Photo : Larry Fong
Décors : Alex mcDowell
Musique : Tyler Bates
Effets spéciaux : John
Costumes : Mickael Wilkinson
Durée : 163 mn

Casting :
Malin Akerman : Le spectre soyeux
Matthew Goode : Ozymandias
Billy Crudup : Dr. Manhattan
Jackie Earle Haley : Rorschach
Jeffrey Dean Morgan : Le comédien
Patrick Wilson : Le hibou