LES ANIMAUX FANTASTIQUES : LES SECRETS DE DUMBLEODRE : Magie mitigée

La magie de l’art dramatique permet à n’importe qui (d’un minimum talentueux tout de même) de devenir n’importe qui d’autre et que le spectateur adhère à l’idée. Encore plus fort, deux personnes différentes peuvent devenir le même personnage, sans que le public ne crie à la supercherie. Il est beaucoup question de magie dans Les Animaux Fantastiques : les Secrets de Dumbledore, de magie nettement plus puissante et spectaculaire que celle crée par les comédiennes et les comédiens. Mais il permet aussi de voir comment un Johnny Depp peut se transformer en Mads Mikkelsen, tout en restant Gellert Grindewald. En tout cas, le spectateur n’y perd pas au change.

Après un premier épisode vraiment réussi et un deuxième volet franchement décevant, on espérait voir la franchise redécoller avec Les Animaux Fantastiques : les Secrets de Dumbledore. Le résultat est mitigé. Le scénario manque de souffle épique, parfois de cohérence et on peut déplorer une absence totale de prise de risque qui aboutit à un résultat sans surprise qui ne génère que peu d’enthousiasme. Pour résumer, le film manque au final de magie, ce qui peut sembler paradoxal vu l’univers dans lequel il se déroule. Dire que l’on s’ennuie serait exagéré, mais dire que l’on passer un moment inoubliable serait un mensonge pur et simple.

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VORTEX : Dans la tempête

La vieillesse est un naufrage dit-on souvent. Cette assertion n’est guère rassurante quand on sait que c’est un état qui nous attend tous. On n’est encore moins rassuré après avoir vu Vortex, qui nous place de manière forte et brutale face au déclin qui vient avec l’âge. Quand on connaît l’œuvre de Gaspard Noé, on imagine facilement qu’il traite le sujet sans ménager le spectateur. Mais on pouvait craindre aussi qu’il sombre une nouvelle fois dans la forme d’excès dans laquelle il noie souvent son génie. Pour ce film, il semble cette fois-ci mesurer la valeur de la retenue.

Comme souvent chez Gaspard Noé, le spectateur se retrouve plonger sans aucun fard dans la réalité crue de ce que vivent les personnages. Ces derniers sont au nombre de trois (les deux parents âgés et leur fils) et l’écran est toujours coupé en deux pour nous permettre de suivre simultanément les allers et venues de deux d’entre eux. Le procédé peut surprendre au début mais on s’y fait vite, surtout que le réalisateur n’en abuse pas et ne cherche pas à en faire un élément gratuit et inutilement spectaculaire. Il sert au contraire le propos de Vortex et lui donne une vraie force. On sent néanmoins Gaspard Noé tiraillé par ses démons et flirter parfois avec l’excès sur la fin. Il parvient tout de même à se contrôler et ne vient jamais nuire à l’émotion sincère qu’il a su faire naître.

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EN MEME TEMPS : Salut électoral

Quoi de mieux qu’un film politique en cette période électorale ? Et quoi de mieux qu’une comédie politique quand la période électorale en question vous donne avant tout envie de pleurer ? On peut donc remercier Gustave Kervern et Benoît Délépine de nous donner un peu le sourire en parlant politique. En Même Temps est une fable fort sympathique, un peu foutraque, bref tout à l’image du reste de la filmographie des deux compères. C’est très imparfait mais l’époque nous offrant peu de raison de se réjouir, on accepte le présent sans réserve.

En Même Temps est un vrai film politique. Au-delà de la fantaisie pure, il livre un regard souvent pertinent sur l’état du clivage gauche-droite et la notabilité de ceux qui exerce le pouvoir. Néanmoins, tout cela ne mène pas vraiment à une conclusion forte et limpide. A chacun de tirer au final celle qu’il souhaite. Reste donc les éléments de pure comédie qui naviguent entre le premier et le huitième degré. Ils sont relativement inégaux mais on rit largement assez souvent pour ne pas considérer que l’on a perdu son temps. Surtout que le tout est porté par une énergie communicative qui emporte le spectateur avec lui.

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CONTES DU HASARD ET AUTRES FANTAISIES : Court bonheur

Si la littérature compte de très nombreux recueils de nouvelles, le cinéma utilise avec une certaine parcimonie la forme du films à sketchs. Comme si le court métrage étant vu comme un exercice de débutants, les réalisateurs s’interdisaient ensuite de raconter des histoires sur des formats plus courts. Certains se l’autorisent néanmoins. Ryūsuke Hamaguchi a triomphé l’année précédente avec Drive My Car, un récit de près de trois heures. Changement de format donc avec Contes du Hasard et Autres Fantaisies, qui nous livre trois récits distincts en deux heures.

Difficile de définir ce qui lie les trois histoires qui composent Contes du Hasard et Autres Fantaisies. Il est beaucoup questions de relations entre les personnes, mais elles sont à chaque fois de nature et dans des configurations différents. Pourtant, il existe une certaine unité entre eux. Une volonté d’explorer l’âme humaine et les sentiments qui la traversent. Le tout avec une forme de retenue et de pudeur toute japonaise. Cependant, le talent de Ryūsuke Hamaguchi nous permet d’en saisir toute la puissance malgré tout. Chaque spectateur ne sera peut-être pas touché de la même façon par chacune de ses histoires, mais ne doutons pas qu’il en trouvera forcément une qui lui parlera et le touchera au cœur.

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L’OMBRE D’UN MENSONGE : Parce que l’amour le vaut bien

L’amour se nourrit souvent de sincérité. Mais parfois, un petit subterfuge peut aider deux être à se rapprocher. Comme dans L’Ombre d’un Mensonge, dont le titre ne fait pas forcément penser à première vue à une comédie romantique. Bon, certes, le terme de comédie n’est peut-être pas le plus adapté pour désigner ce film. Mais il est bel et bien question de romance. S’il pose aussi de vraies questions morales, il donne toute sa place à l’amour d’une manière subtile, sans diminuer en rien la force des sentiments. Et les beaux sentiments font du bien en ces heures un peu sombre.

Parler d’une telle histoire n’a jamais rien d’évident pour ne pas donner l’impression qu’elle est d’une banalité affligeante. Raconter l’attirance entre deux êtres, pas forcément destinés à s’aimer au départ, est sans doute le sujet le plus ancien depuis que les humains se racontent des histoires. Le grand intérêt de l’Ombre d’un Mensonge est du coup tout ce qui tourne autour de l’axe principal. Les personnages sont d’une remarquable profondeur et la romance qu’ils vivent permet de révéler tout ce qu’ils ont au fond d’eux. En s’ouvrant l’un à l’autre, il s’ouvre aussi au spectateur et ce dernier les en remercie par un attachement profond et une envie de savoir où tout cela va les mener.

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MORBIUS : Sang dent

Marvel et Jared Leto sont deux choses que j’aime énormément sur cette Terre. Leur réunion sur grand écran pouvait donc avoir quelque chose de très alléchant. Certes, le voir incarner un personnage relativement mineur de l’univers de Spider-Man pouvait laisser circonspect, mais on pouvait se dire qu’on n’est jamais à l’abri d’une bonne surprise, comme ce fut le cas avec Shang-Chi. Mais malgré mon regard de fan, prêt à devenir très bon public, je ne peux pas non plus tout laisser passer sans broncher. Morbius est un vrai navet qui ne fait pas honneur à Marvel. Si tout ne peut pas être réussi dans un univers aussi vaste, la paresse est un travers difficilement pardonnable.

Des scénaristes inconnus, un réalisateur sans rien de notable à sa filmographie, on ne peut pas dire que les studios se soient vraiment donnés les moyens de faire de Morbius une réussite. Mais même des artistes médiocres pouvaient produire quelque chose de moins affligeant. L’intrigue frôle souvent le ridicule et certains dialogues fleurent bon la série Z. Si tout cela venait d’une prise de risque, comme pour Venom, on n’aurait pu se montrer un minimum magnanime. Mais même pas. Tout cela donne vraiment l’impression que personne n’a vraiment essayé de proposer quelque chose de bon. Du coup, c’est franchement mauvais…

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EN CORPS : A la pointe

Le rapport au corps est un sujet qui se prête particulièrement à la mise en images. En effet, quoi de plus visuel que notre enveloppe qui reste la première chose qui nous définit au regard des autres. Cela est encore plus fort pour celles et ceux dont le corps représente le premier instrument d’expression quand ce n’est pas de travail. Les danseurs entrent dans cette catégorie et le cinéma en a souvent fait des personnages centraux. Le nouveau film de Cédric Klapish, En Corps, s’inscrit dans cette lignée. Et le jeu de mot qui forme le titre nous dit bien à quel point la question du corps constitue son sujet principal.

On retrouve dans En Corps tout ce qu’on a toujours aimé dans le cinéma de Cédric Klapisch. Il nous livre un nouveau portrait particulièrement vivant d’un personnage qu’il parvient à nous faire aimer immédiatement, à travers un mélange de réelle profondeur et d’humour léger. Mais ici, il rajoute une sensualité et une beauté formelle qui ne caractérisait pas forcément son œuvre jusqu’à présent. Cette mue est particulièrement bienvenue tant elle est au service de l’histoire. Bien sûr, la beauté formelle de ce film fait du bien aux yeux. Mais cela paraît presque secondaire face au bien qu’il fait à la tête par le très beau message émouvant et positif qu’elle fait passer.

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HEY WHAT (Low), CONFORT TO ME (Amyl and the Sniffers), DE PELICULA (The Liminanas) : Reste le punk…

On démarre avec les Américains de Low, un groupe venu plus précisément du Minnesota, qui nous a offert l’année dernière Hey What, leur 13ème album. Bon offert est un bien grand mot car il ne constitue pas le cadeau rêvé. En effet, il se montre sans relief et en aucun cas accrocheur, du fait d’un manque flagrant d’énergie et de punch. L’aspect mélodieux ne compense pas, malgré l’intérêt du joli jeux des deux voix, qui tranche avec la ligne mélodique qui l’est nettement moins. Certains effets sonores apportent une certaine originalité, mais ils ne sont pas toujours très agréables. L’ambiance sonore éthérée ne permet pas du tout de mettre en valeur la ligne vocale.

On décolle ensuite pour l’Australie pour rejoindre Amyl and the Sniffers, et leur album Confort to Me. Un rock très punk et surtout très énergique. La voix féminine n’est pas habituelle dans ce style de musique. Ni le fait que la chanteuse articule particulièrement bien. Les codes du punk sont respectés, avec notamment l’absence quasi systématique d’intro. Le résultat est sympathique, mais très basique. La qualité est constante, mais les titres restent toujours sur leur ligne sans jamais en dévier, apportant peu de variété à cet album.

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ARISTOCRATS : Cri subtil

Comment dénoncer le poids des conventions dans un pays où ces mêmes conventions vous empêchent de hausser la voix et de crier votre indignation haut et fort ? Il faut savoir alors faire preuve d’une infinie subtilité pour faire passer les messages avec une forme de douceur apparente mais qui ne nuit en rien à l’impact du propos. Ce n’est évidemment pas facile à réaliser et il faut beaucoup de talent pour y parvenir. La japonaise Yukiko Sode n’en manque pas, comme le prouve Aristocrats, un film qui met en lumière la pratique encore vivace des mariages arrangés au sein de la haute bourgeoisie nippone. Or, aussi incroyable que cela puisse paraître, celle-ci est composée d’êtres humains frappés des mêmes sentiments que n’importe qui.

Aristocrats peut apparaître dans sa première partie comme un film plutôt contemplatif. Il est vrai que la mise en place et la présentation des personnages prennent beaucoup de place et de temps. Mais alors qu’on pourrait craindre d’être sur le point de décrocher, les rouages finement agencés commencent à se mouvoir et le reste du film tiendra le spectateur en haleine. N’attendez rien de spectaculaire. L’ambiance est feutrée, le rythme de narration typiquement asiatique, mais le vitriol passé sur la haute société s’avère particulièrement corrosif. Mais c’est bien ici une société, un système et son poids écrasant qui sont jugés. Yukiko Sode garde un regard bienveillant sur celles et ceux qui le subissent, qui restent tout de même avant tout des victimes.

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CHER MONSIEUR ROUSSEL…

…Vous aurez donc ma voix. Vous aurez ma voix à défaut de mon enthousiasme. Je voterai pour vous sûr de mon choix, mais en gardant à l’esprit que j’aurais préféré en avoir un autre.

Je ne voterai pas pour vous par défaut. Tout simplement parce que si je votais par défaut, je n’aurais pas non plus voté pour vous. Certes, je ne voterai pas pour Anne Hidalgo pour les mêmes raisons pour lesquelles j’ai quitté le PS, que j’ai déjà exposées par ailleurs. Certes, je ne voterai pas non plus par Yannick Jadot parce que le voir clamer encore hier que les agriculteurs tuent des enfants alors que son conseiller agriculture est un antivax notoire me donne la nausée. Certes, je ne voterai pas pour Jean-Luc Mélenchon parce que son populisme trouvera toujours sur sa route mon opposition farouche et ne bénéficiera jamais de mon soutien. Et certes, j’aurais pu ne pas voter pour vous à cause de certaines de vos propositions auxquelles je suis profondément opposé, pour votre relation trouble avec la Chine et au final un populisme avec lequel vous flirtez parfois un peu trop à mon goût.

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