MON CRIME : Délice filmé

Mon Crime affiche

François Ozon est un grand cinéaste, même si je ne me suis pas toujours montré enthousiaste à son propos. Mais il est vrai que plusieurs de ces dernières œuvres m’avaient plutôt séduit, notamment Grâce à Dieu et Été 85. Il a souvent pris l’habitude de nous proposer du théâtre filmé. Cela avait donné le meilleur, 8 Femmes, comme le plutôt moyen, Peter Van Kant. Mon Crime est de son côté une vraie réussite, même s’il n’échappe pas totalement aux travers de ce genre. En tout cas, il permet de passer un excellent moment en compagnie d’un formidable casting.

Une bonne dose de fantaisie

Comédie policière, Mon Crime nous propose une intrigue à tiroirs avec quelques rebondissements bien amenés, qui en surprendront plus d’un. Le spectateur reste toujours en éveil à l’affût de ce qui pourra se passer ensuite et en quête du fin mot de l’histoire. Le sujet est très classique, le traitement aussi. L’ambiance des années 20 est savoureusement reconstituée, avec un rien de kitch et d’exagération mais qui colle très bien au spectacle proposé. Le film nous propose une bonne dose de fantaisie, particulièrement enthousiasmante par moments.

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EMPIRE OF LIGHT : Hors de la lumière

Empire of Light affiche

Il est décidément beaucoup question de cinéma au cinéma ces derniers temps. Et pour des films très différents. Babylon a été une vision psychédélique du Hollywood des années 20. The Fabelmans une quasi autobiographie intimiste. Et Empire of Light un mélodrame particulièrement émouvant. Signé par le grand Sam Mendes, ce film est passé largement inaperçu. Certes, il ne figurera pas dans les œuvres les plus marquantes du cinéaste. Mais elle méritait un peu plus que cette indifférence.

En deux dimensions

Il est possible de formuler quelques reproches à l’encontre de Empire of Light. Celui notamment d’enfoncer quelques portes ouvertes en dénonçant sans forcément beaucoup de subtilité le racisme et le machisme de l’Angleterre des années 60. Mais le propos de ce film dépasse largement ce cadre-là. Les personnages cachent des blessures intimes qui offrent une autre dimension à l’histoire. Celle-ci est beaucoup moins attendue et donne même une vraie touche d’originalité au film. Elle apporte surtout un supplément d’émotion, sur un autre plan, qui transporte vraiment le spectateur.

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LES ENFANTS DE DUNE (Frank Herbert) : L’appel du désert

Les Enfants de Dune

Après un épisode originel fascinant (Dune), qui justifie à lui seul le caractère mythique de cet univers, puis un second très décevant (le Messie de Dune), retour sur Arakis avec les Enfants de Dune. Avec ce volet, Frank Herbert renoue avec ce qui a fait le succès du premier épisode. Même sans effet de surprise, et parfois un léger manque d’action, le lecteur se laisse porter par cette ambiance unique dans l’histoire de la science-fiction. Parfois imitée, jamais égalée.

Politique ésotérique

Les Enfants de Dune nous plonge avant tout dans des intrigues politiques pour le contrôle de l’Empire. Le tout se mélange avec des réflexions ésotériques qui sont l’essence même de la saga. Contrairement à l’épisode précédent, ce roman est parcouru par une réelle tension narrative. Du moins au début car il est vrai qu’elle se dilue quelque peu au fur et à mesure que l’ésotérique prend le pas sur tout le reste. On retrouve surtout une galerie de personnages donnant une réelle profondeur au récit.

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THE FABELMANS : La naissance d’un géant

The Fabelmans affiche

Au cours de sa carrière Steven Spielberg nous a fait voyager dans de nombreux mondes imaginaires. Il nous a aussi régulièrement fait remonter le cours de l’histoire pour faire revivre des époques révolues. Mais il lui aura fallu 77 ans pour nous emmener dans le cours de sa propre vie (même si c’est de manière quelque peu romancée). The Fabelmans nous faire revivre la prime jeunesse du cinéaste et le chemin qui l’a conduit à devenir un des plus grands prodiges du 7ème art. Le tout à travers un grand film évidemment.

Spielberg tient aussi la plume

The Fabelmans est un des rares films où Steven Spielberg en tant que scénariste. Ce n’est même que la troisième fois pour sa propre filmographie de réalisateur après Rencontre du Troisième Type et A.I. (mais avec des circonstances particulières pour ce dernier). Preuve que ce long métrage occupe une place particulière dans sa carrière. Il y met beaucoup de cœur et cela se traduit par beaucoup d’émotions pour le spectateur. Le film n’est pas dénué de longueurs, mais il nous offre quelques passages mémorables qui parlera à tous ceux qui aiment le cinéma.

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DIASPORA PROBLEMS (Soul Glo), INSIDE PROBLEMS (Andrew Bird), BIG TIME (Angel Olsen) : Constance dans la qualité

Diaspora Problems (Soul Glo) : Mauvaise caricature

Diaspora Problems de Soul GloOn commence avec un groupe très rock, les Américains de Soul Glo et leur album Diaspora Problems, sorti en 2022. Malheureusement, l’excès de rock fait que le chant ressemble plutôt à un hurlement. Vomir dans le micro serait un terme approprié. Alors, certes, c’est énergique. Mais absolument pas entraînant. Parfois, on se demande s’il ne s’agit pas d’une parodie. Mais une parodie insupportable, même pas drôle. Aucun titre ne parvient à se démarquer et à sauver l’ensemble.

Inside Problems (Andrew Bird) : Ruptures surprise

Inside Problems d'Andrew BirdOn enchaîne avec l’Américain Andrew Bird, que j’avais découvert à travers Noble Beast, dont la voix très claire interpelle immédiatement à l’entame de Inside Problems. Elle se pose sur des instrumentations jazzy, le plus souvent dans la douceur, le tout formant une belle harmonie, malgré le côté asynchrone des deux éléments. Les mélodies sont ponctuées de ruptures de rythme surprenantes. Il fait preuve au final d’une belle maîtrise et d’une vraie classe. La qualité est constante, le résultat très agréable.

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ANT-MAN ET LA GUÊPE : QUANTUMANIA : Petite surprise

Ant-Man et la Guêpe : Quantumania affiche

Pourquoi continuer à aller voir des films Marvel pour finalement tous les trouver décevants. Que ce soit Doctor Strange in the Multiverse of Madness, Thor : Love and Thunder ou Black Panther : Wakanda forever, aucune des dernières productions n’a répondu aux attentes des fans. Vu l’accueil critique très froid qu’a reçu Ant-Man et la Guêpe : Quantumania, c’est sans grande illusion que certains (dont je fais partie) ont pu se rendre voir ce dernier. Et bien, avec sans doute un lien de cause à effet, la surprise que personne n’attendait se montre plutôt bonne.

Pas de prise au sérieux

Ant-Man et la Guêpe : Quantumania n’est certainement pas le film de super-héros du siècle mais il fait le job comme on dit. Une bonne dose d’humour, des scènes d’action bien troussées avec un final particulièrement spectaculaire. Pas de grand souffle épique certes, mais de la légèreté et un petit vent de fraîcheur réjouissant. Ce film nous montre, et c’est tant mieux, que Marvel continue de ne jamais se prendre totalement au sérieux. On retrouve ce qu’on aime dans cet univers. Peut-être pas tout ce qu’on aime, mais rien que ce qu’on aime.

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TÀR : Paroles et musique

Tàr affiche

Cate Blanchett est une très grande dame du cinéma. Donc quoi de plus normal que de faire appel à elle pour donner vie à une très grande dame de la musique. Dans Tàr, elle trouve un rôle à la mesure de son talent, taillée pour elle dans les moindres millimètres. Mais un peu comme précédemment avec Emma Thomson dans My Lady, quand un film est trop conçu pour mettre en valeur sa principale interprète, il perd de son naturel. Du grand film que ce long métrage aurait pu être, il ne reste qu’un exercice de style présentant de vrais moments de grâce. Mais aussi de nombreuses longueurs et un sens profond qui nous échappe.

Intensité intermittente

Tár nous plonge immédiatement dans un certaine tension. Mais dès le départ, il manque au soutien de cette tension une réelle intensité. Certes, certains passages sont bien intenses, mais ils prennent place entre des séquences où on ne sent pas saisi au tripes comme on devrait l’être. L’ambiguïté et la richesse du personnage se dessine peu à peu, mais le film a déjà perdu une partie de l’intérêt du public au moment où elle se révèle vraiment. Et quand le public est enfin rentré totalement dans cette histoire, celle-ci le conduit à un dénouement qui ne conclut que très partiellement le propos. On en ressort en ayant l’impression d’être passé à côté d’un très grand film.

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WET LEG (Wet Leg), SKINTY FIA (Fontaines D.C.), GROWING UP (The Lindas Lindas) : Punk au féminin

Wet Leg de Wet Leg : Basique mais efficace

On démarre avec les Britanniques de Wet Leg et leur premier album, tout simplement intitulé Wet Leg, sorti en 2022. Un duo féminin pour une musique électro-rock assez directe, où les introductions sont parfois en option. Les voix sont parfois un rien aigrelettes, mais dès qu’elles se posent un peu pour prendre de la profondeur, elles ont immédiatement plus d’impact. Elles font preuve d’énergie et de conviction. C’est certes un peu basique, mais très efficace. Et surtout suffisamment varié pour que l’on prenne plaisir à découvrir cet album d’une qualité constante.

Skinty Fia de The Fontaine D.C. : Toujours pas ça

Skinty Fia de Fontaine D.C.Skinty Fia est le troisième album du groupe irlandais Fontaine D.C. que j’évoque dans ces pages. Dogrel m’avait profondément déplu, A Hero’s Death ne m’avait convaincu qu’à moitié. Celui-ci m’a encore une fois laissé sur ma faim. Cela début assez mal dans une ambiance sombre et évaporée, presque mystique, avec un rythme lent. Une des voix est franchement pénible pour un résultat répétitif et criard. Puis l’album monte en puissance. Les titres sont plus posés, mais ne parviennent jamais à vraiment embarquer l’auditeur avec lui. Quelques titres plus pop, plus légers finissent quand même par nous ravir. Globalement, le résultat est solide artistiquement, mais assez transparent.

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LA FAMILLE ASADA : La belle famille

La Famille Asada affiche

Chaque année, le palmarès des meilleurs films de l’année comporte son lot de films asiatiques. 2023 n’échappera pas à la règle en nous proposant précocement un petit bijou venu du Japon : la Famille Asada. Un film, qui à l’image de Tempura l’année dernière, comporte plusieurs parties assez différentes. Cette fois cependant, chacune des deux moitiés est d’une qualité égale et nous émeut chacune à sa manière. Deux fois plus de bonheur donc.

Portrait de famille

La première moitié de la Famille Asada est un… portrait de famille. Cela n’étonnera personne vu le titre du film. Mais un portrait aussi tendre que drôle. Avec ce petit rien de décalage qui confère au film toute son originalité et sa personnalité. La seconde moitié nous plonge dans les suites du tsunami ayant déferlé sur la région de Fukishima. Elle nous permet de mieux comprendre l’étendue de ce drame dont nous avons surtout retenu l’incident nucléaire. Un passage moins drôle, mais qui conserve cette infinie tendresse qui nous fait garder le sourire même quand une petite larme vient perler aux paupières.

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BABYLON : Pour l’amour du cinéma

Babylon affiche

Pour beaucoup Damien Chazelle est un grand cinéaste puisque qu’il a signé La La Land pour lequel il a reçu un Oscar. Pour moi, il est un immense cinéaste parce qu’il a signé Whiplash, un des chefs d’œuvre absolus du 7ème art. Pour tous, il est désormais un cinéaste gigantesque parce qu’il a signé Babylon. Un film de trois heures qui semble durer une heure et demi à peine tant il happe le spectateur dès la première seconde que pour le lâcher à la dernière seconde du générique. Entre les deux, un tourbillon de musique, de péripéties, de visions ébouriffantes et d’amour profond du cinéma.

Aux amoureux du 7ème art

Babylon est avant tout un sublime hommage à la part de rêve véhiculée par le cinéma hollywoodien. S’il nous plonge plus particulièrement dans l’ambiance fantasmée d’une époque, il nous fait réaliser dans ses dernières minutes à quel point l’histoire racontée est en fait celle du 7ème art de manière intemporelle. Ou plutôt l’histoire de tous ceux qui se sont un jour rendu dans une salle obscure pour se sortir de la réalité et s’offrir une heure, ou deux, ou trois dans des mondes sans limite. Cette œuvre, qui pouvait paraître relativement impersonnelle, devient dans ses ultimes instants un moment de partage intense avec Damien Chazelle pour tous ceux qui, comme lui, sont amoureux du cinéma.

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