UN BEAU MATIN : Construction, déconstruction

Un Beau Matin affiche

Le moins que l’on puisse dire est que les artistes ont plusieurs fois leurs chances de faire leurs preuves auprès de moi. Je suis capable de continuer à lire des livres, écouter des albums ou bien encore voir des films signés de la même personne, même quand je n’ai pas vraiment apprécié ses œuvres précédentes. Ainsi, le fait de n’avoir jamais trop aimé les films de Mia Hansen-Løve (notamment un Amour de Jeunesse ou Bergman Island) ne m’a pas découragé d’aller voir un Beau Matin, en espérant que cette fois, je mêle mes louages à celles formulées par ailleurs par les critiques. Et bien, pour une fois, ma persévérance a eu du bon car ce film est incontestablement réussi et profondément touchant. Il marque par sa richesse et un propos loin de tout lieu commun. Cette fois-ci, la réalisatrice a utilisé sa sensibilité à très bon escient.

Mouvement perpétuel

Un Beau Matin nous raconte finalement deux histoires en une. Ou plutôt le double bouleversement qui vient frapper la vie du personnage principal. La jeune femme voit d’un côté le lien avec son père, atteint d’une maladie neurodégénérative, se déliter doucement et de l’autre la relation qu’elle a avec un vieil ami, pourtant marié, changer profondément de nature. Construction et déconstruction vont marquer cette histoire, fait d’allers et retours, d’éloignements de rapprochements. Ce mouvement perpétuel donne son souffle à cette histoire qui véhicule beaucoup d’émotion, sans misérabilisme. Si le sujet et son traitement pourrait de faire de ce film une caricature de film français, on peut aussi se dire que s’ils étaient tous de cette qualité, il y aurait moins de raison d’ironiser à leur sujet.

Continue reading UN BEAU MATIN : Construction, déconstruction

JACK MIMOUN ET LES SECRETS DE VAL VERDE : Aventures rétros

Jack Mimoun et le Secret de Val Verde affiche

Dans les années 80, la comédie d’aventures était un genre qui avait le vent en poupe. On pense évidemment à Indiana Jones, mais on trouvait des productions encore plus orientées vers l’humour, comme A la Poursuite du Diamant Vert ou encore les Goonies, soit autant de films culte pour les gens de ma génération. Tout cela est désormais quelque peu tombé en désuétude. C’est donc avec un peu de nostalgie que l’on peut aller voir Jack Mimoun et les Secrets de Val Verde. Un film qui ne va pas rentrer dans les annales du 7ème art, mais offre un pur divertissement qui se laisse regarder avec grand plaisir. Surtout que les moyens ont été mis pour que les décors paraissent suffisamment convainquant pour se prendre au jeu de ces aventures un rien burlesques.

1er degré rythmé

Jack Mimoun et les Secrets de Val Verde n’est pas dénué de certaines lourdeurs. L’humour est quand même orienté premier degré et ne fait pas toujours dans une finesse absolue. Mais, même si on parfois honte de le reconnaître, on rit d’un rire franc et sincère. On n’échappe pas à tous les clichés du genre et tout est très attendu, de la morsure de serpent au pont suspendu, mais fonctionne plutôt bien. Le film est rythmé, les gags s’enchaînent et donnent du souffle à l’aventure en tant que tel. On reprochera juste des rebondissements qui se voient arriver de très loin. Cela met en exergue les faiblesses du scénario, qui se contente de surfer sur l’humour.

Continue reading JACK MIMOUN ET LES SECRETS DE VAL VERDE : Aventures rétros

LE CHAGRIN ENTRE LES FILS (Tony Hillerman) : Voyage à Vide

Le Chagrin Entre les Fils

A travers le cinéma ou la littérature, on a l’impression de tout connaître et savoir des États-Unis. Mais il reste tout de même quelques rares zones conservant un minimum de mystère. Les réserves indiennes en font partie. Les romans de Tony Hillerman se déroulent dans ce décor vraiment particulier. Le Chagrin entre les Fils est le 19ème (et dernier, écrit peu avant la mort de l’auteur) roman de cette série que je ne connaissais pas. Une nouvelle découverte après celle de Val Mc Dermid récemment Malheureusement, ce ne fut vraiment pas une révélation et je pense pas découvrir les autres volumes.

Une tapisserie sans éclat

Le titre le Chagrin entre les Fils comporte le mot fil au pluriel. En effet, l’histoire tourne notamment autour d’une tapisserie navajo. Un point de départ qui ne vend pas du rêve… et ce n’est pas pour rien puisque l’intrigue n’a rien de bien passionnante. On a beaucoup de mal à se passionner pour cette chasse à l’homme, sur les traces d’un tueur supposé mort des années auparavant. Le tout dans une enquête menée par un policier qui se sent obligé de sortir de sa retraite. Tout cela est un peu cliché à première vue… et en fait à seconde vue également.

Continue reading LE CHAGRIN ENTRE LES FILS (Tony Hillerman) : Voyage à Vide

TORI ET LOKITA : La misère du monde

Tori et Lokita affiche

Les frères Dardenne ne sont pas connus pour nous offrir des films légers, joyeux et rigolos, célébrant la fraternité et l’amour entre les individus. Cela ne va pas changer avec Tori et Lokita. Et si vous attendiez une forme un peu plus attractive et spectaculaire, ce ne sera pas le cas non plus. Par exemple, toujours pas de musique à l’horizon. En un mot, un long métrage dans la lignée du reste de leur filmographie. En tout cas, on ne pourra pas les accuser de tromper le spectateur. Mais ceux qui savent apprécier l’immense talent qui réside derrière cette austérité trouveront bien des mérites à ce film.

Le monde tel qu’il est

Le principal reproche adressé aux Frères Dardenne est un excès de misérabilisme. En montrant la cruauté du monde sans fard et en dessinant rarement des chemins vers le bonheur pour leurs personnages, ils font naître une émotion brute qui vous tombe dessus avec force. Mais de force à forcée, il n’y a qu’un pas. On peut y voir un manque de subtilité, le tout noir ne valant pas mieux que le tout rose, la vie étant faite de nuances de gris. Pour Tori et Lokita, le débat peut être ouvert. Néanmoins, l’attachement que l’on ressent pour les personnages est tellement profond qu’on ne peut échapper à une émotion tout aussi profonde, mais surtout parfaitement sincère.

Continue reading TORI ET LOKITA : La misère du monde

ANTS FROM UP THERE (Black Country, New Road), THE OVERLOAD (Yard Act), ADMONITIONS (Endless Boogie) : Quelque chose en moins

Ants From Up There (Black Country, New Road) : Truc en moins, truc en trop

Ants From Up There de Black Country, New RoadOn commence cet avis plutôt moyen avec un groupe britannique appelé Black Country, New Road et leur album Ants From Up There, sorti en 2022. Leur musique rappelle dans un premier temps celle de Gogol Bordello, en un peu plus maîtrisé, avant de se calmer quelque peu. Elle affiche paradoxalement une certaine personnalité, mais sans pour autant être d’une originalité folle. Il y a bien de l’émotion dans la voix, de la conviction dans les interprétations, mais il manque tout de même quelque chose au final pour réellement toucher l’auditeur. En fait, c’est peut-être justement parce qu’ils en font trop que ce manque existe.

The Overload (Yard Act) : Electro rétro

The Overload de Yard ActOn reste de l’autre côté de la Manche avec Yard Act et leur premier album, The Overload. Un rock un peu électro, un rien rétro aussi. C’est énergique, leur musique a du punch, mais ce n’est pas toujours harmonieux, ni réellement entraînant. Globalement, on est porté par la grande énergie qu’ils déploient. Mais les titres sont parfois ponctués de passages parlés qui coupent le rythme. L’album propose un deuxième CD live, qui nous propose un rock beaucoup plus basique. Mais ni l’un, ni l’autre ne se montre enthousiasmant.

Continue reading ANTS FROM UP THERE (Black Country, New Road), THE OVERLOAD (Yard Act), ADMONITIONS (Endless Boogie) : Quelque chose en moins

L’ORIGINE DU MAL : Famille à rebondissements

L'Origine du Mal affiche

Certaines choses peuvent nous réjouir au cinéma, mais se montrent beaucoup moins réjouissantes dans la vraie vie. Les familles dysfonctionnelles font incontestablement partie de cette catégorie. Elles se retrouvent au centre de beaucoup d’excellents scénarios. On peut évidemment à Festen, le chef d’œuvre du genre, mais plus proche de nous, on peut citer récemment ADN ou Frère et Sœur. L’Origine du Mal n’aura vraiment rien à leur envier en termes de rapports familiaux tordus et destructeurs. On remerciera également Sébastien Marnier pour avoir réussi à faire revenir l’espace de deux heures l’immense et regretté Claude Chabrol.

Claude Chabrol ressuscité

La parenté avec le réalisateur du Boucher ou de la Cérémonie est plus qu’évidente. La promotion du film met d’ailleurs en avant cette parenté. Et pour une fois, ce n’est vraiment pas artificiel ou usurpé. L’Origine du Mal nous fait plonger avec force dans tout ce que l’âme humaine peut avoir de sombre et de cruel. Les personnages verront tous leur verni initial sauter au fur et à mesure de l’intrigue et ce qui se cache en-dessous est souvent inattendu et rarement synonyme de droiture morale. Le scénario souffre de quelques invraisemblances et d’un ultime twist pas forcément convaincant, mais il aura proposé avant cela bien des surprises et des renversements de situation qui auront parfaitement atteint leur but.

Continue reading L’ORIGINE DU MAL : Famille à rebondissements

NOVEMBRE : Le feu de l’action

Novembre affiche

Les attentats du 13 novembre auront mis quelques années à venir hanter le cinéma français. Mais ces dernières semaines, ils se trouvent au centre de deux longs métrages mais de manière très différente. Tout d’abord, Revoir Paris nous avait raconté le parcours difficile des survivants. Cette fois-ci, Novembre nous fait marcher sur les traces de ceux qui ont traqué les terroristes en fuite, notamment le cerveau de l’opération. Le tout se terminera dans l’explosion d’un appartement à Saint-Denis 5 jours plus tard. Le film est d’une redoutable efficacité mais pose la question de la manière dont on peut faire revivre de tels événements.

Efficacité bien placée ?

Il est possible de ressentir un léger malaise devant la première partie de Novembre. En effet, il épouse tous les codes de la réalisation d’un film d’action et s’apparente à du grand spectacle. Le sujet n’appelle évidemment pas à nous proposer un pur divertissement. La suite nous rend plus à l’aise, quand la dimension humaine du scénario prend le pas. Mais jusqu’au bout, on retrouve le souci d’une certaine efficacité dans la réalisation et une dimension thriller que l’on peut juger malvenue. Si le film peut provoquer une vraie émotion, c’est par son aspect reconstitution méticuleuse, incluant dès que possible de vraies images. Ceci peut facilement nous renvoyer avec force à la manière dont nous avons nous-mêmes vécu ces quelques jours qui a profondément bouleversé notre pays.

Continue reading NOVEMBRE : Le feu de l’action

SANS FILTRE : Acide extrême

Sans Filtre affiche

Les Palmes d’Or font rarement l’unanimité. C’est inhérent au fait que le Festival de Cannes est supposé récompenser des œuvres audacieuses à la personnalité forte. En un mot, des films qui ne laissent personne indifférent. Il arrive même parfois que l’audace en question divise l’esprit d’un seul et même spectateur, sortant du film ne sachant pas vraiment s’il a adoré ou détesté. Ce fut mon cas précédemment notamment devant Amour de Michael Haneke, ne pouvant dire s’il était juste génial ou profondément détestable. C’est de nouveau le cas devant Sans Filtre. Parce que si je reconnais qu’il a tout d’un grand film, il m’a fait vivre un des moments le plus atroces qu’il m’ait été donné de vivre au cinéma.

Une si longue atrocité

Il est vrai que j’ai une aversion particulière pour le vomi. Et cela représente un handicap sérieux pour aller voir Sans Filtre, qui offre la plus longue (pour ne pas dire interminable) séquence cinématographique représentant de manière particulièrement directe et crue des personnes en train de vomir. Tout cela a bien un sens, mais c’est visuellement franchement insoutenable. J’avoue avoir détourner mes yeux de l’écran une bonne partie de ce passage pour pouvoir le supporter. Pour cela, je pourrais totalement récuser ce film. Cependant, la force du propos que porte ce dernier mérite infiniment mieux que de s’arrêter à cela.

Continue reading SANS FILTRE : Acide extrême

MARIA RÊVE : Fraîcheur qui réchauffe

Maria Rêve affiche

Les plus grandes comédiennes pourraient interpréter n’importe quel rôle en se montrant convaincante, même ceux qui s’éloignent considérablement de ce qu’elle est réellement en tant que personne. Karin Viard est ce qu’on appelle une grande comédienne, c’est incontestable. Mais même les plus grandes ont leur limite. Elle a touché les siennes dans Maria Rêve. Mais un autre apanage des plus grandes est de les toucher avec assez de talent pour que l’on en ait finalement pas grand chose à faire et sans que le plaisir ne soit gâché de la moindre manière.

Feel good movie

Maria Rêve est avant tout une très touchante et sympathique comédie romantique. Le tout est délicatement emballé dans un fond social, mais qui se révèle finalement assez neutre. En effet, c’est vraiment la légèreté qui domine. Le film repose avant tout sur le très fort attachement que le spectateur ressent immédiatement pour les personnages. Cela donne au final un vrai feel good movie, qui plus est se termine à Viroflay, détail qui, je l’admets, ne réjouira que peu de personnes à part moi. A l’instar de sa principale protagoniste, ce long métrage nous apporte un peu de rêve, de poésie et au final une fraîcheur réjouissante.

Continue reading MARIA RÊVE : Fraîcheur qui réchauffe

PIECE OF ME (Lady Wray), LET THE FESTIVITIES BEGIN ! (Los Bitchos), EXTREME WITCHCRAFT (Eels) : Rock and soul

Piece of Me (Lady Wray) : Douceur suave

Piece of Me Lady WrayPiece of Me, qui date de cette année, n’est que le troisième album d’une artiste qui pourtant a connu un grand succès avec son premier, sorti en 1998. Nicole Wray a pour nom d’artiste Lady Wray et nous offre une musique soul douce, de facture très classique. Sa voix est un peu plus aiguë que les standards du genre. Malgré cela, certains titres nous rappellent Amy Winhouse. On regrettera qu’elle distorde sa voix de temps en temps, mais heureusement cela reste rare et on revient vite à cette douceur qui nous charme. Le rythme est toujours lent et suave et les instrumentations tirent parfois vers le jazz. En tout cas, la qualité de cette album fait regretter le peu d’épaisseur de sa discographie.

Let the Festivities Begin ! (Los Bitchos) : Intérêt limité

Let the Festivities Begin ! Los BitchosLos Bitchos est, comme son nom l’indique pas vraiment, un groupe anglais de rock psychédélique, si j’en crois leur page Wikipédia. Let the Festivities Begin ! est leur premier album qui se caractérise par l’absence de parole. Les titres ne sont que des longs instrumentaux souvent lancinants et présentant rarement de l’intérêt. Les sonorités ne sont pas agréables, souvent marquées par des instrumentations déformées artificiellement. Ce n’est au final ni harmonieux, ni entraînant. Aucune raison de s’y attarder donc.

Continue reading PIECE OF ME (Lady Wray), LET THE FESTIVITIES BEGIN ! (Los Bitchos), EXTREME WITCHCRAFT (Eels) : Rock and soul